43e législature | 2e session

Transcription

Journal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

43e législature, 1re session
(29 novembre 2022 au 10 septembre 2025)

Le mardi 27 mai 2025 - Vol. 47 N° 214

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Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner le 50e anniversaire de l'organisme Sports-Loisirs L'Ormière

M. Sylvain Lévesque

Souligner le 110e anniversaire des Chevaliers de Colomb du conseil de Lachine

M. Enrico Ciccone

Souligner le 30e anniversaire de la ligue de quilles Les Gaillards

Mme Karine Boivin Roy

Souligner le 30e anniversaire de la marche Du pain et des roses

Mme Manon Massé

Rendre hommage à M. Michel Trudel

Mme Marie-Louise Tardif

Rendre hommage à M. Guy Pilon

Mme Marie-Claude Nichols

Souligner la Semaine québécoise des services de garde éducatifs à l'enfance

Mme Suzanne Roy

Rendre hommage à Mme Eugénie Lecot-Lavoie

Mme Valérie Schmaltz

Souligner le travail de l'organisme Pouvoir d'Agir

Mme Marie-Belle Gendron

Souligner le 30e anniversaire de la Coopérative de soutien à domicile de Laval

Mme Céline Haytayan

Souligner le succès du spectacle F du Regroupement des femmes de la Côte-de-Gaspé

M. Stéphane Sainte-Croix

Souligner le 35e anniversaire de l'organisme Cible Famille Brandon

Mme Caroline Proulx

Présence de l'ambassadrice du Royaume des Pays-Bas, Mme Margriet Vonno

Présence de membres du Cercle des ex-parlementaires de l'Assemblée nationale
du Québec


Présence de Mme Louise Harel et de M. François Gendron, ex-parlementaires de
l'Assemblée nationale


Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 991 — Loi sur la procédure de sélection et de nomination des décideurs
administratifs indépendants et de renouvellement de leur mandat

M. André Albert Morin

Mise aux voix

Dépôt de documents

Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 100 — Loi sur la négociation et la
détermination des conditions de travail requérant une coordination nationale
notamment dans les secteurs public et parapublic

Étude détaillée du projet de loi n° 98 — Loi modifiant la Loi électorale principalement
afin de préserver l'intégrité du processus électoral


Dépôt de pétitions

Adopter une charte des droits des enfants

Questions et réponses orales

Hausse des tarifs d'électricité pour les petites et moyennes entreprises

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

Bilan du gouvernement en matière d'énergie

M. Gregory Kelley

Mme Christine Fréchette

M. Gregory Kelley

Mme Christine Fréchette

M. Gregory Kelley

Mme Christine Fréchette

Investissement du gouvernement dans La Compagnie électrique Lion

M. Frédéric Beauchemin

Mme Christine Fréchette

M. Frédéric Beauchemin

Mme Christine Fréchette

M. Frédéric Beauchemin

M. Simon Jolin-Barrette

Blocs d'énergie destinés aux entreprises

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

Bilan du gouvernement en matière de santé

Mme Ruba Ghazal

M. François Legault

Mme Ruba Ghazal

M. François Legault

Mme Ruba Ghazal

M. François Legault

Projet de loi visant principalement à instaurer la responsabilité collective et l'imputabilité
des médecins quant à l'amélioration de l'accès aux services médicaux

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

Vente d'électricité par le secteur privé

M. Paul St-Pierre Plamondon

M. François Legault

M. Paul St-Pierre Plamondon

M. François Legault

M. Pascal Paradis

Mme Christine Fréchette

Construction d'un poste électrique d'Hydro-Québec dans le Quartier latin

Mme Manon Massé

M. Mathieu Lacombe

Mme Manon Massé

M. Mathieu Lacombe

Votes reportés

Adoption du principe du projet de loi n° 94 — Loi visant notamment à renforcer la laïcité
dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives

Renvoi à la Commission de la culture et de l'éducation

Mise aux voix

Adoption du projet de loi n° 81 — Loi modifiant diverses dispositions en matière
d'environnement


Motions sans préavis

Convenir d'abolir le lien entre l'État du Québec et la monarchie britannique

Mise aux voix

Rappeler à VIA Rail que les citoyens de la Gaspésie ont droit à des services de transport
accessibles, fiables et équitables

Mise aux voix

Souligner le 25e anniversaire du décès de M. Maurice Richard

Mise aux voix

Entériner le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de
loi n° 101 — Loi visant l'amélioration de certaines lois du travail

Mise aux voix

Entériner le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de
loi n° 103 — Loi visant principalement à réglementer les sites de consommation
supervisée afin de favoriser une cohabitation harmonieuse avec la communauté

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 89 —  Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de
grève ou de lock-out

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

M. Jean Boulet

Mme Elisabeth Prass

M. Alexandre Leduc

Mise aux voix du rapport

Avis touchant les travaux des commissions (suite)

Projet de loi n° 84 — Loi sur l'intégration à la nation québécoise (titre modifié)

Adoption

M. Jean-François Roberge

M. André Albert Morin

M. Pascal Bérubé

M. Guillaume Cliche-Rivard

Vote reporté

Ajournement

Journal des débats

(Treize heures quarante-deux minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon mardi. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Donc, nous allons débuter nos travaux à la déclaration de députés, et je cède immédiatement la parole à M. le député de Chauveau.

Souligner le 50e anniversaire de l'organisme Sports-Loisirs L'Ormière

M. Sylvain Lévesque

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. En 2025, sous le thème Le plaisir d'être actif, Sports-Loisirs L'Ormière souffle ses 50 bougies, un demi-siècle pour cet organisme qui joue un rôle essentiel dans le dynamisme de notre milieu en favorisant l'accès aux sports, aux loisirs et à des activités rassembleuses. Je salue, dans les tribunes, Jean-Guy Levesque, président, Mario Bédard, directeur général, Marie-Pier Gonthier et Françoise Paradis.

Cet organisme a vu le jour le 16 avril 1975 grâce à l'initiative de trois bénévoles : André Morissette, Jean Bélanger et Delphis Bouchard. Il portait alors le nom de Loisirs secteur ouest, Neuchâtel, avant de devenir la Corporation des loisirs de Neuchâtel, secteur ouest.

Depuis 2016, l'organisme porte le nom de Sports-Loisirs L'Ormière. Tout en demeurant fidèle à sa mission d'origine, il continue d'offrir une vaste gamme d'activités aquatiques, sportives et culturelles, incluant les camps de jours.

Bon 50e à tous!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Chauveau. Maintenant, nous poursuivons avec M. le député de Marquette.

Souligner le 110e anniversaire des Chevaliers de
Colomb du conseil de Lachine

M. Enrico Ciccone

M. Ciccone : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais souligner le 110e anniversaire des Chevaliers de Colomb de Lachine, conseil 1776.

Le conseil de Lachine des Chevaliers de Colomb a été fondé le 21 mars 1915, et le premier grand chevalier a été M. Dalbé Viau. Aujourd'hui, les Chevaliers de Colomb de Lachine comptent environ 300 membres en règle, dont un sous-conseil à Kahnawake depuis environ 50 ans.

L'ordre des Chevaliers de Colomb est un mouvement de bienfaisance sans but lucratif qui regroupe 2 millions de membres à travers le monde. Ils forment un ordre engagé dans la communauté avec comme premier principe la charité. Outre les activités de bienfaisance, les Chevaliers de Colomb de Lachine organisent une panoplie d'activités, dont des après-midis karaoké, des visionnements sportifs, des soupers thématiques, des repas hebdomadaires et plusieurs activités sociales ouvertes à tous.

Félicitations au grand chevalier actuel, M. Pierre Huard, à ceux du passé et à tous les membres du conseil 1776 des Chevaliers de Colomb de Lachine pour ce 110e anniversaire! Bonne continuation. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous poursuivons avec Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Souligner le 30e anniversaire de la ligue de quilles Les Gaillards

Mme Karine Boivin Roy

Mme Boivin Roy : Merci, Mme la Présidente. Je prends la parole aujourd'hui pour souligner l'anniversaire d'un organisme communautaire dans l'est de Montréal qui, depuis 30 ans, allie le sport, l'inclusion et le vivre-ensemble. Il s'agit de la ligue de quilles Les Gaillards.

Fondée en 1995, cette ligue offre bien plus qu'un cadre sportif accessible. Elle est un lieu de rassemblement, de camaraderie, et surtout de respect et d'inclusion pour les membres de la communauté gaie de Montréal, le tout dans un esprit de saine compétition. Les Gaillards incarnent ainsi l'esprit de solidarité et de diversité, qui fait la richesse de notre société.

En réunissant des hommes et des femmes de tous âges, de parcours et d'expériences variés, autour d'une activité conviviale, la ligue contribue à briser l'isolement et à renforcer les liens sociaux, semaine après semaine, depuis trois décennies. La ligue participe activement à bâtir une société ouverte et plus humaine.

Je salue chaleureusement les fondateurs, les bénévoles et tous les participants, participantes qui, depuis trois décennies, font vivre cette belle initiative.

Joyeux 30e anniversaire à la ligue des Gaillards!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, à vous la parole.

Souligner le 30e anniversaire de la marche Du pain et des roses

Mme Manon Massé

Mme Massé : Je me souviens. Je me souviens de ces 850 femmes qui ont marché du 26 mai au 4 juin 1995 pour Du pain et des roses. De ces dizaines de milliers qui les ont accueillies et soutenues tout au long des 200 kilomètres de cette marche qui voulait lutter contre la pauvreté. Vos pas résonnent encore.

Je veux honorer toutes celles qui marchent jour après jour, année après année, décennie après décennie pour affirmer notre droit inaliénable de vivre dans la dignité et la sécurité.

À chaque jour, vous êtes des milliers, mesdames, à trimer dur pour faire que notre monde soit un monde meilleur, un monde où personne n'est mis de côté, où le bonheur des uns ne fait pas le malheur des autres.

On ne vous dira jamais assez merci. Par vos gestes quotidiens et votre détermination, vous rendez l'humanité plus humaine. Merci, mesdames.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.

Rendre hommage à M. Michel Trudel

Mme Marie-Louise Tardif

Mme Tardif : Merci, Mme la Présidente. J'aime reconnaître les gens pour ce qu'ils sont et non seulement pour ce qu'ils font. Et, aujourd'hui, c'est un très bel exemple d'un être d'exception.

Je dirais que M. Michel Trudel porte La Cité de l'Énergie, ses spectacles, ses expositions et les diverses activités sur ses épaules depuis sa création, en 1997, soit depuis 28 ans. C'est la personne qui est partout en même temps, de jour, de soir et même de nuit, en plus de s'occuper des employés sur le terrain.

Travailleur de l'ombre, il permet de mettre la lumière sur l'organisme et sur les autres, mais jamais sur lui. Mais, sans lui, le socle de cet organisme ne serait pas aussi stable et solide. C'est un être efficace, travaillant, au service des autres, dévoué et très fidèle. Sans lui, la sonorisation des spectacles, l'aménagement d'Espace Shawinigan, la propreté et le montage des salles et des sites extérieurs n'atteindraient pas ce niveau de qualité.

Michel, merci d'être qui tu es.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je vous rappelle que vous avez une minute pour faire vos déclarations de députés. S'il vous plaît, respectez votre temps.

Mme la députée de Vaudreuil, à vous la parole.

Rendre hommage à M. Guy Pilon

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à souligner le départ à la retraite de Guy Pilon, maire de Vaudreuil-Dorion, qui conclura une carrière municipale de plus de trois décennies, dont près de 20 ans à la tête de la ville.

J'ai eu l'occasion de collaborer avec lui comme mairesse, préfète et députée sur plusieurs dossiers importants, notamment en santé et en transports. J'ai toujours apprécié son engagement, que je qualifierais de franc, direct et sans détour. Guy n'a jamais hésité à dire ce qu'il pense avec passion, surtout lorsqu'il s'agissait de défendre les intérêts de sa population.

Sous sa gouverne, Vaudreuil-Dorion a connu une croissance impressionnante, ayant doublé, au cours des 25 dernières années, et ce, toujours accompagné d'un développement soutenu des services et des infrastructures. Le futur hôpital, le parc 405, le Festival de cirque, le nouveau pôle municipal ainsi que les distinctions reçues au fil des ans, dont le récent Mérite Ovation municipale, sont des traces concrètes de son passage.

Je salue un maire déterminé, au style bien à lui, qui aura marqué notre histoire.

M. Pilon, Guy, mon ami, bonne retraite!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je suis prête à céder la parole à Mme la députée de Verchères.

Souligner la Semaine québécoise des services de garde éducatifs à l'enfance

Mme Suzanne Roy

Mme Roy (Verchères) : Merci, Mme la Présidente. Du 26 mai au 1er juin, c'est la Semaine québécoise des services de garde éducatifs à l'enfance. Le thème cette année : S'enraciner pour mieux grandir.

Les services de garde éducatifs à l'enfance sont des lieux propices à l'apprentissage et au développement de nos tout-petits. Ils leur donnent des bases solides aux valeurs qui leur sont inculquées et les expériences qu'ils sont appelés à vivre.

Je le dis souvent, la beauté de la grande famille du réseau des services de garde éducatifs à l'enfance réside dans sa diversité. Le personnel qui travaille en CPE, en garderie, subventionnée ou non, les responsables de milieux familiaux partagent tous la même...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je vous demanderais de garder le silence, en haut, dans les tribunes, s'il vous plaît, parce que ça résonne ici, en bas. Alors, nous sommes en travaux. S'il vous plaît. Merci.

Vous pouvez poursuivre, Mme la députée.

Mme Roy (Verchères) : Je vais reprendre, si vous permettez, Mme la Présidente. Il y avait vraiment beaucoup de bruit.

• (13 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Allez-y.

Mme Roy (Verchères) : Alors, merci, Mme la Présidente. Du 26 mai au 1er juin, c'est la Semaine québécoise des services de garde éducatifs à l'enfance. Le thème cette année : S'enraciner pour mieux grandir.

Les services de garde éducatifs à l'enfance sont des lieux propices à l'apprentissage et au développement de nos tout-petits. Ils leur donnent des bases solides grâce aux valeurs qui leur sont inculquées et des expériences qu'ils sont appelés à vivre.

Je le dis souvent, la beauté de la grande famille du réseau des services de garde éducatifs à l'enfance réside dans sa diversité. Le personnel qui travaille en CPE, en garderie, subventionnée ou non, les responsables de milieux familiaux partagent tous la même volonté de favoriser le bien-être des tout-petits et des familles du Québec.

Le Québec peut être fier de pouvoir compter sur des personnes dévouées et compétentes qui oeuvrent chaque jour, Mme la Présidente, avec bienveillance auprès de nos enfants. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous poursuivons avec Mme la députée de Vimont.

Rendre hommage à Mme Eugénie Lecot-Lavoie

Mme Valérie Schmaltz

Mme Schmaltz : Merci, Mme la Présidente. Alors, notre centre communautaire de Vimont porte maintenant un nouveau nom en hommage à Eugénie Lecot-Lavoie.

Mme Lecot-Lavoie est née à Laval en 1913 et a consacré plus de 60 ans de sa vie au service de sa communauté. Maîtresse de poste pendant 42 ans, elle a transformé son lieu de travail en espace d'accueil et de soutien, notamment pour les personnes immigrantes. Elle a aussi participé activement à la fondation du Centre communautaire de Vimont, où elle a animé, par son engagement, au club de l'âge d'or, au cercle des fermières et à la chorale féminine.

En reconnaissance de cet engagement exemplaire, j'ai remis à titre posthume la Médaille de la députée afin de souligner son parcours inspirant.

Mme Lecot-Lavoix est devenue la première femme dont son nom a été donné à un lieu public à Vimont, et celui-ci est désormais gravé dans notre quartier et continuera d'inspirer les générations futures. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous poursuivons avec Mme la députée de Châteauguay.

Souligner le travail de l'organisme Pouvoir d'Agir

Mme Marie-Belle Gendron

Mme Gendron : Merci, Mme la Présidente. Il y a 35 ans, un petit groupe de personnes s'est rassemblé autour d'une idée simple mais puissante : que chaque enfant, quels que soient son parcours ou ses difficultés, puisse vivre une enfance en sécurité et sans violence.

Depuis, l'organisme Pouvoir d'Agir a bien grandi et évolué pour devenir un maillon essentiel de notre communauté. Durant ces 35 années d'expérience, tant de jeunes ont participé à des ateliers et trouvé un espace pour se relever et pour avancer, des actions qui ont su sensibiliser des générations de jeunes.

Alors, aujourd'hui, on ne souligne pas seulement un anniversaire, mais on célèbre la force vive et une conviction, celle que nos jeunes peuvent libérer leur pouvoir d'agir pour mieux contrôler leur vie et leurs actions.

Donc, derrière chacune de ces réussites, une équipe extraordinaire. Bravo à la coordonnatrice, Mme Julie Mailhot, et à son équipe, ainsi qu'aux membres du conseil d'administration!

Joyeux 35e anniversaire, Pouvoir d'Agir, et surtout merci!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous poursuivons avec Mme la députée de Laval-des-Rapides.

Souligner le 30e anniversaire de la Coopérative
de soutien à domicile de Laval

Mme Céline Haytayan

Mme Haytayan : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je souhaite souligner le 30e anniversaire de la Coopérative de soutien à domicile de Laval.

Fondée en 1995, la coopérative offre des services personnalisés d'entretien ménager et de préparation de repas pour les aînés et les personnes en perte d'autonomie. La coopérative permet ainsi à de nombreux Lavallois de vieillir dans le confort et la quiétude de leur foyer avec un soutien régulier à domicile.

Merci à la directrice générale, Gynet Séguin, au conseil d'administration, à toute l'équipe dynamique de la coop et aux nombreux bénévoles pour leur dévouement à améliorer la qualité de vie de nos aînés. Joyeux 30e anniversaire à la Coop de soutien à domicile de Laval. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je rappelle, aux gens qui sont dans les tribunes, vous devez vous tenir assis et en silence, s'il vous plaît. Ça résonne énormément en bas. Alors, merci.

Maintenant, monsieur...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : C'est correct, Mme la députée. Merci.

Alors, je cède immédiatement la parole à M. le député de Gaspé.

Souligner le succès du spectacle F du Regroupement
des femmes de la Côte-de-Gaspé

M. Stéphane Sainte-Croix

M. Sainte-Croix : Merci, Mme la Présidente. À Gaspé, un moment fort de création et d'engagement a récemment été offert au public avec le spectacle F, une oeuvre collective portée par le Regroupement des femmes de la Côte-de-Gaspé, à l'occasion du 25e anniversaire de la Marche mondiale des femmes.

Sur scène et en coulisse, 150 femmes — choristes, comédiennes, figurantes et musiciennes — venues de la Gaspésie, du Québec et de la France ont uni leurs voix pour dénoncer les violences faites aux femmes et pour célébrer la solidarité, la résilience et l'espoir.

Je tiens à souligner le travail remarquable des directrices artistiques Jeanine Fournier et Guylaine Fournier, ainsi que leur équipe, qui ont profondément ému le public par leur démarche sensible et engagée.

F restera un événement artistique social marquant, porteur d'un message puissant pour un monde plus juste, plus égalitaire et plus sécuritaire. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Alors, pour conclure cette rubrique, je cède la parole à Mme la députée de Berthier.

Souligner le 35e anniversaire de l'organisme Cible Famille Brandon

Mme Caroline Proulx

Mme Proulx : Oui. Moment important, madame, pour s'adresser à nos citoyens, merci de respecter l'enceinte ici, pour souligner un événement marquant qui s'est déroulé dans la communauté de Saint-Gabriel-de-Brandon, chez nous, des nouveaux locaux pour Cible Famille Brandon, qui célébrait 35 ans, un espace de soutien pour des parents qui veulent cheminer dans leur rôle. Un organisme qui a fait un truc assez intéressant : un courrier intergénérationnel, Plume-âge, où les jeunes communiquaient avec des personnes plus âgées, des bénévoles. Une belle initiative, qui a été récompensée, d'ailleurs, comme lauréat de l'année dans la catégorie littéraire Intergénérations Québec la semaine dernière.

Bravo à toute l'équipe pour dévouement, agrandissement porteur d'avenir! J'espère que ça va permettre à Cible Famille Brandon de poursuivre son excellent travail au moins pour les 35 prochaines années. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de Berthier. Ceci met fin à la rubrique de déclarations de députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 58)

(Reprise à 14 h 07)

La Présidente : Bonjour, tout le monde. Vous êtes nombreux, aujourd'hui. Le parlement du Québec, c'est chez vous. Bienvenue, mesdames messieurs. Il y a beaucoup d'effervescence. C'est le début de notre première semaine intensive, et il y en a deux.

Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie, tout le monde. Veuillez vous asseoir.

Présence de l'ambassadrice du Royaume des
Pays-Bas, Mme Margriet Vonno

Alors, aujourd'hui, mardi le 27 mai, j'ai le plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, de l'ambassadrice du Royaume des Pays-Bas, Son Excellence Mme Margriet Vonno, à l'occasion de sa visite officielle.

Présence de membres du Cercle des ex-parlementaires
de l'Assemblée nationale du Québec

Et j'ai également le plaisir de souligner, à l'occasion de la 31e Assemblée générale du Cercle des ex-parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec, la présence, dans les tribunes, d'ex-parlementaires, dont les membres du conseil d'administration, sous la présidence de M. Normand Jutras.

Présence de Mme Louise Harel et de M. François Gendron,
ex-parlementaires de l'Assemblée nationale

Et je souligne également la présence de l'ancienne présidente de l'Assemblée nationale, Mme Louise Harel, et de l'ancien président de l'Assemblée nationale, M. François Gendron. Vous pouvez les applaudir.

(Applaudissements)

La Présidente : Et, sur ce, nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Derraji : Bonjour, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article a de notre feuilleton. Merci.

Projet de loi n° 991

La Présidente : À l'article a du feuilleton, M. le député de l'Acadie présente le projet de loi n° 991, Loi sur la procédure de sélection et de nomination des décideurs administratifs indépendants et de renouvellement de leur mandat. M. le député.

M. André Albert Morin

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi a pour objet d'établir une procédure formelle, transparente et uniforme pour la sélection et la nomination de décideurs administratifs ainsi que pour le renouvellement de leur mandat afin d'assurer leur indépendance et leur impartialité.

Le projet de loi institue la charge de secrétaire à la sélection des décideurs administratifs indépendants dont le mandat est d'administrer, à l'abri de toute intervention politique, la procédure de sélection, de nomination et de renouvellement des mandats des décideurs administratifs. Le secrétaire est nommé par l'Assemblée nationale pour une période de 10 ans avec l'approbation des deux tiers de ses membres, provenant minimalement de deux partis autorisés qui y sont représentés.

Le projet de loi prévoit que pour être déclarée apte à devenir décideur administratif au sein d'un organisme une personne doit réussir un concours au cours duquel ses aptitudes sont examinées à l'aide d'une épreuve écrite et d'une évaluation par un comité de sélection. Le secrétaire tient un registre des candidats intéressés pour chaque organisme et le ministre de la Justice recommande au gouvernement la nomination, à titre de décideur, d'une personne dont le nom est inscrit au registre de l'organisme où un poste est à pourvoir.

Également, le projet de loi institue un comité de la rémunération des décideurs administratifs qui a pour mandat de fixer le mode, les normes et les barèmes de la rémunération des décideurs administratifs, basés sur des critères objectifs.

De plus, le projet de loi soumet l'ensemble des décideurs administratifs aux mêmes règles déontologiques, à la compétence du Conseil de la justice administrative ainsi qu'à un processus d'évaluation de rendement faite annuellement par le président de l'organisme.

Enfin, le projet de loi comporte des dispositions modificatives, transitoires, diverses et finale.

Merci, Mme la Présidente.

• (14 h 10) •

La Présidente : Et je reconnais le leader de l'opposition officielle. Vous voulez nous dire?

M. Derraji : ...Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Présidente : Vous voulez un vote? Alors, parfait. Vous êtes toutes et tous en place. La période de vote est ouverte.

Pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, à cette étape-ci tous les micros sont coupés.

Maintenant, la période de vote est terminée. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  108

                      Contre :              0

                      Abstentions :      0

La Présidente : Cette motion est adoptée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Derraji : Avec votre permission, Mme la Présidente, je sais que le leader du gouvernement, quand il était à l'opposition, il a déposé presque le même projet de loi, en 2017. Donc, Mme la Présidente, est-ce que je peux compter sur son ouverture pour que ce projet de loi soit appelé d'ici la fin de cette session parlementaire, Mme la Présidente?

Dépôt de documents

La Présidente : Maintenant, à la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit.

M. Lafrenière : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de déposer le rapport annuel 2024‑2025, version révisée, de la Loi autorisant la communication de renseignements personnels aux familles d'enfants autochtones disparus ou décédés à la suite d'une admission en établissement. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Bonjour, Mme la Présidente. Je dépose les réponses aux questions inscrites au feuilleton le 29 avril 2025 par la députée de Sherbrooke et le 8 mai 2025 par la députée de D'Arcy-McGee. Merci.

La Présidente : Ces documents sont déposés.

Pour ma part, je dépose le texte de loi adopté ainsi que le rapport du mandat d'initiative déposé par les membres de la 22e législature du Parlement des jeunes.

Et je dépose également les textes de loi adoptés par les membres de la 27e législature du Parlement écolier.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission des finances publiques et député de Montmorency.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 100

M. Simard : Oui. Mme la Présidente, je dépose le rapport très attendu de la Commission des finances publiques qui, les 21, 22 et 27 mai 2025, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 100, Loi sur la négociation et la détermination des conditions de travail requérant une coordination nationale notamment dans les secteurs public et parapublic. Je vous remercie.

La Présidente : Ce rapport est déposé. M. le président de la Commission des institutions et député de Richmond.

Étude détaillée du projet de loi n° 98

M. Bachand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je dépose le rapport de la Commission des institutions qui, les 21, 22 de même que le 27 mai 2025, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 98, Loi modifiant la Loi électorale principalement afin de préserver l'intégrité du processus électoral. La commission a adopté le texte du projet de loi avec amendements. Merci.

La Présidente : Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

Adopter une charte des droits des enfants

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 984 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que le rapport de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse recommande l'adoption de la Charte des droits des enfants;

«Considérant que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être au coeur de toutes les décisions qui le concernent;

«Considérant que les enfants ont le droit d'être entendus et de participer aux décisions qui les concernent, de manière adaptée à leur âge;

«Considérant que les enfants sont particulièrement vulnérables à la maltraitance, à la négligence et à l'exploitation;

«Considérant que la société québécoise doit se doter d'un cadre garantissant les droits fondamentaux des enfants en misant sur la prévention;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, signataires, demandons au gouvernement du Québec d'adopter une Charte des droits des enfants afin de garantir à tous les enfants du Québec un environnement sécuritaire, bienveillant et respectueux de leurs droits fondamentaux.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci beaucoup.

La Présidente : Cet extrait de pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation du droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales seront tenus les votes reportés suivants : le vote reporté sur l'adoption du principe du projet de loi n° 94 et le vote reporté sur l'adoption du projet de loi n° 81.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. Pour ce faire, je cède la parole, en question principale, au chef de l'opposition officielle.

Hausse des tarifs d'électricité pour les
petites et moyennes entreprises

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Mme la Présidente, la CAQ démontre une fin de régime lente et triste. La CAQ n'aura jamais été le parti de l'économie, n'aura jamais été le parti de l'énergie.

Hier, Radio-Canada, sous la plume de Thomas Gerbet, révèle que les 52 amendements qui ont été déposés dans le projet de loi n° 69 ont été faits sous pression d'Hydro-Québec. La ministre l'a même reconnu, qu'Hydro-Québec est derrière ça. Depuis le départ de Pierre Fitzgibbon, c'est Hydro-Québec qui fait ce qu'elle veut. La ministre de l'Énergie est en situation de faiblesse et ne décide pas, et le premier ministre est d'accord avec ça.

Le plan : développer l'art de plumer la poule, Mme la Présidente. Et la poule, ce sont nos PME et nos entreprises du Québec, qui vont, en quelque sorte, ramasser la facture... pas en quelque sorte, c'est ça, dans le projet de loi, l'amendement, la facture des ententes avec les Premières Nations. Ce sont les PME et les entreprises du Québec qui vont être directement facturées. Ce sont les PME et les entreprises du Québec qui vont directement être facturées si d'aventure les coûts de production excèdent les recettes des ventes. Et ça, ça ne s'est jamais fait comme ça, Mme la Présidente. Ce qui fait dire à Jocelyn Allard, président de l'association des consommateurs industriels d'électricité, je le cite : «C'est inadmissible. Pile, je gagne. Face, tu perds.»

Depuis quand le premier ministre a-t-il développé cet art de plumer la poule que sont nos PME, Mme la Présidente? Depuis sa décote, son déficit record?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bon, Mme la Présidente, je vais me retenir, suivre sur la poule. Mais revenons à l'économie d'abord. Depuis six ans, c'est historique, le Québec a battu l'Ontario puis le reste du Canada, depuis six ans, dans le PIB par habitant, dans l'augmentation du salaire moyen et dans l'augmentation du revenu disponible, ce qui reste dans le portefeuille. Pendant six ans, on a battu l'Ontario et le reste du Canada.

Mme la Présidente, parlons maintenant des augmentations de tarifs d'Hydro-Québec. On se rappelle, le Parti libéral a augmenté les tarifs de 4,4 %, en 2004, alors que l'inflation était à 2 %. Le Parti libéral a augmenté les tarifs d'électricité de 5,3 %, en 2006, alors que l'inflation était de 1,7 %. Ce n'est pas mieux du côté du PQ. En 2014, ils ont augmenté les tarifs de 4,3 %, alors que l'inflation était de 1,4 %.

Mme la Présidente, malgré le fait que, dans les dernières années, on a eu des taux d'inflation de 6,7 %, jamais notre gouvernement n'a augmenté les tarifs de plus que 3 %. Puis on s'assure, dans le projet de loi n° 69, que jamais les tarifs pour le résidentiel ne vont augmenter de plus de 3 %.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Je n'avais pas besoin de faire de façon plus éloquente la preuve qu'il n'est pas le parti de l'économie, quand il passe sous silence les PME et les entreprises du Québec. Réalise-t-il que 6,4 %, ça, c'est plus haut que tous les chiffres qu'il vient de donner... 6,4 %, 2023, hausse des tarifs d'électricité pour nos PME, nos entreprises. 5,1 % l'année d'après, 3,6 % l'année d'après. En trois ans, c'est plus de 15 % de hausse pour nos PME. C'est ça, le parti qui n'est pas de l'économie.

• (14 h 20) •

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, Mme la Présidente, encore une fois, je dois corriger le chef de l'opposition officielle. Les interventions d'Investissement Québec, depuis qu'on est au gouvernement, ont augmenté de 81 %. 81 % d'augmentation. Puis, dans les interventions totales, 90 % des interventions s'adressent à des PME. Donc, comment peut-il dire ce qu'il vient de dire?

Mme la Présidente, on protège le consommateur. On protège les individus, les Québécois. C'est à eux autres, Hydro-Québec. Donc, ce ne sera pas plus que 3 %. Pour ce qui est des entreprises, on va rester compétitifs.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Je l'attendais, son argument des... Là, il me parle des entreprises, enfin, là on est sur le même terrain, on parle d'économie, là, parlez-moi des entreprises. Il me dit : On va rester compétitifs. Le fait de rester compétitif ou pas est indépendant du choc tarifaire que ça représente. 15 % en trois ans, ça, Mme la Présidente, c'est un choc tarifaire. Nos entreprises sont déjà prises à la gorge. Ils ont de la misère, Mme la Présidente. Puis le premier ministre, lui, il fait très peu de cas de cela, et il va aller encore plus loin avec son projet de loi où Hydro-Québec, puis il applaudit à ça, va encore plus égorger nos entreprises.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bon, la semaine dernière, le chef de l'opposition officielle avait baissé le ton, il avait pris son Bovril, mais cette semaine on voit que le naturel est revenu.

Parlons des entreprises, Mme la Présidente. Hydro-Québec prévoit que les tarifs pour les entreprises vont augmenter de 4 % par année. On va continuer d'avoir les tarifs pour les entreprises les plus bas en Amérique du Nord. Et ce que n'aime pas le Parti libéral, Mme la Présidente, c'est que, si on fait une entente pour rehausser les centrales La Grande avec les Cris, si on donne un montant aux Cris... ils ne veulent pas que ce soit compté dans les coûts d'Hydro-Québec. Quelle drôle de façon de faire les choses.

La Présidente : Troisième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Juin 2024, François Vincent, de la FCEI, parlant des PME : «Ce choc tarifaire va limiter leur capacité à investir, à innover et à se positionner avantageusement pour leur avenir et pour l'économie de nos régions.» On parle de nos entreprises, de nos PME, qui sont surtaxées. Ça, c'est une taxe déguisée, Mme la Présidente. On refile la facture à nos entreprises, nos créateurs de richesse, pour qu'on puisse se les payer, les services. Ça, Mme la Présidente, c'est l'art de plumer la poule. Ça, c'est la taxe Hydro. Ça, c'est la taxe Hydro Legault.

La Présidente : Oui, M. le leader du gouvernement, je vais vous reconnaître pour votre rappel au règlement. Quel est-il?

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, c'était prévisible de la part du chef de l'opposition officielle, de ne pas respecter le règlement. On se nomme ici par notre titre, par notre fonction, et non pas par notre patronyme.

La Présidente : Merci. M. le chef, vous le savez, retirez le dernier petit bout. Vous le retirez? Merci beaucoup. La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, le choix qu'on a fait, c'est de dire : Chez Hydro-Québec, il y a des vieux chantiers qui sont déjà amortis, on en fait profiter les individus, les Québécois, c'est à eux autres d'en profiter. Pour ce qui est des entreprises, on regarde les coûts réels. Puis, bien sûr, les coûts réels, pour les nouveaux chantiers, aujourd'hui, sont plus élevés que les anciens chantiers. Mais, malgré ça, ce qu'il est important de dire, c'est qu'on garde puis on va garder, au Québec, les plus bas tarifs en Amérique du Nord pour les entreprises.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député de Jacques-Cartier.

Bilan du gouvernement en matière d'énergie

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Mme la Présidente, quand la CAQ est arrivée au pouvoir, en 2018, ils ont nagé dans les surplus d'électricité, ils ont nagé dans les surplus budgétaires, puis présentement nous sommes dans le rouge avec ces deux-là, et c'est vraiment la faute de la mauvaise gestion dans le dossier de l'énergie de ce gouvernement.

Le premier ministre a décidé de liquider nos surplus de l'énergie, il est allé partout sur la planète, de vendre nos blocs d'énergie à des entreprises étrangères, il est allé à New York pour vendre notre électricité à des Américains. C'étaient vraiment des mauvais choix de ce gouvernement parce que ça a fait mal. Ça a fait mal à notre économie, ça a fait mal à Hydro-Québec, ça a fait mal à notre société.

Et je veux juste savoir, très simplement, avec tout ce désastre de gestion de ce dossier, plusieurs projets de loi qui arrivent, aucune décision prise qui est claire, on change les projets de loi à la dernière minute avec 52 amendements, est-ce que la ministre est vraiment fière du bilan de la CAQ dans le dossier de l'énergie?

La Présidente : La réponse de la ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, en tant que ministre de l'Énergie, bien, moi, j'ai deux priorités, deux grands objectifs, d'une part protéger le portefeuille des Québécois à travers le tarif résidentiel d'électricité. Les libéraux, quand ils étaient au pouvoir, ils ont décidé de faire un cadeau aux industriels, ils ont dit : On va indexer le tarif de tout le monde, sauf de vous. Depuis 2013 que c'est comme ça. Nous, on a mis fin à ça. On propose de mettre fin parce qu'il faut que l'équité prévale. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va protéger les hausses tarifaires appliquées aux clients résidentiels, et, les autres, incluant les industriels, on va rétablir l'équité, il y aura une indexation.

J'aimerais que le député de Jacques-Cartier vérifie, dans son comté, s'il est d'accord avec le fait qu'on rétablisse l'équité et s'il est d'accord avec la décision qu'avait prise le Parti libéral de donner un cadeau aux industriels. J'aimerais l'inviter à sonder ses électeurs.

Ma deuxième grande priorité, c'est d'assurer la compétitivité de nos tarifs, nos tarifs, notamment, commerciaux. Et, quand on se compare, il y a vraiment un écart considérable. On a l'électricité parmi la plus faible...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...au plus faible coût en Amérique du Nord, et on va préserver ça.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Avant de demander si nous sommes d'accord, peut-être c'est important d'aller voir le caucus caquiste, s'ils sont d'accord, parce que l'ancien ministre Fitzgibbon, il a quitté parce qu'il n'était pas d'accord avec le premier ministre, le conseiller principal de la ministre a quitté parce qu'il n'est pas d'accord avec les 52 amendements déposés à la dernière minute. Puis on peut parler avec une députée de la CAQ qui est allée sur une radio, une station de radio pour dire que ce gouvernement a mal géré des blocs d'énergie, et elle a exprimé pour l'opinion de tout ce caucus caquiste qui n'est pas d'accord avec la gestion du dossier de l'énergie de ce gouvernement.

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Quand je dis qu'on va assurer la compétitivité de nos tarifs commerciaux, prenez, par exemple, les hausses tarifaires qu'il y a eu pour des clients commerciaux de faible puissance, là, au cours de la dernière année, 2023 à 2024. À New York, il y a eu une augmentation de 26 %, 26 %. À Chicago, une augmentation de 9 %. San Francisco, une augmentation de 31 %. Alors, somme toute, nos prévisions, en termes de hausses, n'ont rien à voir avec ce que des compétiteurs, des États compétiteurs font de leur côté.

De notre côté, on va miser sur l'énergie verte qu'on a. Elle s'inscrit pleinement dans ce que la planète recherche. La planète est à la recherche d'énergie verte. Partout dans le monde, on a besoin de s'inscrire dans la transition énergétique. Et c'est ce qu'on fait. On va miser sur nos ressources puis on va, ce faisant...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...enrichir les Québécois.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Exactement. Ils sont allés chercher des entreprises étrangères, puis vous savez qu'il y a toujours une file d'attente pour les blocs d'énergie des entreprises d'ici. Et ce n'est pas juste nous qui pense que ce gouvernement a mal géré les blocs d'énergie, c'est le Pr Pineau, qui a clairement dit que nous sommes dans la situation actuelle à cause de la mauvaise gestion des blocs d'énergie de ce gouvernement. C'est aussi M. Sabia, qui a clairement dit, en commission, que ce gouvernement a mal géré les blocs d'énergie. Une chose, une bonne nouvelle, en 2026 : dehors, avec le CAQ, dehors avec ce gouvernement qui n'est pas bon.

Des voix : ...

La Présidente : Article 32, article 32. Bon, on ne s'interpelle pas des deux côtés. Voilà. Ça a été dit. On demeure respectueux. La réponse de la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui. Que fait le Parti libéral, quand il est au pouvoir, par rapport aux blocs d'énergie? Il dort.

Alors, il n'a pas prévu d'investissement qui vaille dans le développement de l'offre énergétique alors qu'il était au pouvoir. Donc là, il y a un manque à gagner qui est important, il y a un rattrapage qui est à faire. En plus, on est dans une période de transition énergétique, ce qui fait rehausser la demande en énergie.

Alors, nous, on a demandé à Hydro-Québec de développer son plan de développement en vue de doubler sa production. Et qu'est-ce que ça va faire? Ça va rehausser considérablement la richesse collective des Québécois.

Que serait le Québec, aujourd'hui, si on n'avait pas eu ces investissements qui avaient été faits en énergie verte il y a des décennies? On serait ailleurs en termes de richesse collective. Eh bien, on va continuer à positionner avantageusement le Québec dans la transition énergétique...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...via notre énergie verte.

La Présidente : En question principale...

Des voix : ...

La Présidente : Alors, je vais vous rappeler juste la règle, pour les gens qui nous écoutent. Article 32, on garde le silence. Une seule personne a droit de parole, et c'est le député de Marguerite-Bourgeoys.

Investissement du gouvernement dans La Compagnie électrique Lion

M. Frédéric Beauchemin

M. Beauchemin : En crédits, il y a trois semaines, main sur le coeur, la ministre de l'Économie nous jurait que la CAQ n'allait pas donner directement 24 millions à Lion pour sa relance. J'aurais dû accrocher sur le mot «directement».

La semaine dernière, la CAQ renouvelle le programme pour l'électrification du transport scolaire, et on augmente en moyenne la subvention de 90 000 $ par autobus. À 90 000 $ par autobus, ça prend 266 autobus pour que Lion touche son 24 millions.

Et la générosité de la ministre ne s'arrête pas là, ça va encore plus loin. On donne encore le monopole à Lion. Mais ça, Mme la Présidente, c'est parce que la CAQ pense encore qu'elle est capable de choisir les gagnants, des gagnants comme Northvolt, Recyclage Carbone Varennes, SAAQclic, les Kings de Los Angeles, Panier bleu, les chèques électoralistes. 10 milliards de gaspillage, Mme la Présidente.

Est-ce que la ministre peut avouer que le bilan économique de ce gouvernement est un échec?

Une voix : ...

• (14 h 30) •

La Présidente : Pas de bravo, M. le chef, vous le savez. La réponse de la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui, Mme la Présidente. Alors, comme vous savez, le gouvernement avait investi des fonds dans Lion. Maintenant, l'évolution de la compagnie n'a pas été celle qui était souhaitée, alors on s'est avancés pour dire qu'il n'y aurait pas davantage d'investissement dans cette compagnie.

Il y a eu un groupe d'investisseurs privés qui s'est montré intéressé à racheter la compagnie, donc ça a été une transaction qui a été autorisée il y a quelques jours, et en soi c'est une bonne nouvelle parce que ça va permettre à ceux qui ont acquis des autobus de Lion de bénéficier d'un service après vente. Et c'est important d'avoir accès, pour une rentrée ordonnée, une rentrée scolaire ordonnée, au cours de l'automne prochain, qu'il y ait ces services qui soient offerts à ceux qui ont déjà acquis, et il y en a plus de 1 200, de ces autobus, qui roulent au Québec, des autobus Lion.

Donc, je me réjouis que la compagnie ait été maintenant acquise par un groupe d'investisseurs privés. Donc, on va regarder l'évolution qu'ils donnent à l'entreprise. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'au niveau des services qui sont rendus aux élèves du Québec, eh bien, ces services-là vont être au rendez-vous. On va pouvoir avoir une rentrée ordonnée, qui va permettre aux élèves de se déplacer...

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : ...de manière fluide vers les établissements d'enseignement.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Frédéric Beauchemin

M. Beauchemin : La ministre fait exactement ce qu'elle nous a promis de ne pas faire, donner 24 millions à Lion. Pas un sou de plus, disait-elle, mais on donne 90 000 $ de plus par autobus. Après 270 autobus, c'est 24 millions de dollars que vous aviez promis de ne pas donner. Mme la Présidente, on est rendu dans un modèle économique caquiste où on essaie de choisir les gagnants et les perdants. La ministre est-elle fière de ça?

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Oui. Alors, on ne met pas davantage d'argent dans l'entreprise Lion Électrique. On s'assure, par ailleurs, que les élèves sont au coeur de nos actions. Et c'est ce qu'on fait en renouvelant le programme de transport scolaire pour écoliers. On renouvelle ce programme de telle sorte qu'on puisse continuer l'électrification du système de transport scolaire. C'est important, on est dans une phase de transition énergétique.

Je constate que le Parti libéral n'adhère pas à cette idée de transition énergétique. Ils dénoncent les investissements qu'on fait dans Hydro-Québec et ils ne veulent pas qu'on aille de l'avant avec des soutiens aux transporteurs publics qui transportent les élèves de manière électrique.

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : Alors, nous, on s'y engage, la transition énergétique, parce que c'est un défi collectif et c'est une responsabilité collective.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Frédéric Beauchemin

M. Beauchemin : Avec ce qu'on vient d'entendre, là, dans le modèle caquiste, on choisit les gagnants puis on détermine les perdants. Girardin, Autobus Thomas, eux autres aussi, ils font des autobus, mais ils n'ont juste pas la même chance, Mme la Présidente. C'est-tu ça, le legs du premier ministre puis de sa ministre de l'Économie, de choisir qui gagne, qui perd, au Québec, avec l'argent des Québécois? C'est honteux, amateur. Dehors, la CAQ!

La Présidente : Oui. M. le leader du gouvernement, dites-moi quel est votre rappel. M. le leader du gouvernement, quel est votre rappel?

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Ah! ce n'est pas un rappel.

La Présidente : Vous voulez répondre? Répondez.

M. Jolin-Barrette : Je veux répondre au député de Marguerite-Bourgeoys. Écoutez, amateur, honteux d'avoir investi dans Lion, le député de Marguerite-Bourgeoys devrait se regarder lui-même dans le miroir, lui-même a investi personnellement dans Lion Électrique, il l'a affirmé dans les ondes. Alors, je me demande, à ce moment-ci, qui est honteux et qui est amateur d'avoir cru dans une entreprise québécoise qui donne des jobs à des Québécois pour électrifier le transport, pour assurer la desserte des enfants dans nos écoles. On a le devoir de soutenir.

Alors, manifestement, Mme la Présidente, ce n'est pas la première fois que le député de Marguerite-Bourgeoys dit quelque chose, exemple : Je suis en faveur du troisième lien, puis ensuite se retourner vers un candidat à la chefferie qui est en désaccord avec le troisième lien. On fait une chose et son contraire, du côté du Parti libéral.

La Présidente : En question principale...

Des voix : ...

La Présidente : On retrouve... On retrouve le silence. Je sais qu'il fait beau et qu'il fait chaud. Une seule personne...

Des voix : ...

La Présidente : Du côté du gouvernement, demeurez silencieux. Une seule personne a le droit de parole, et je reconnais le chef de l'opposition officielle.

Blocs d'énergie destinés aux entreprises

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Alors, comptez sur moi, Mme la Présidente, pour calmer le jeu. La CAQ, donc...

Des voix : ...

La Présidente : Alors, on perd du temps, dans ce temps-là, là. Tout le monde a ri? Parfait. Moi, je veux entendre votre question, M. le chef. Allez-y.

M. Tanguay : Bien oui, j'y allais.

Alors, Mme la Présidente, la CAQ, on le sait maintenant, c'est démontré, n'a jamais été le parti de l'économie. On a vu, dans les questions qui ont été posées et les réponses, il y a une taxe déguisée, via Hydro-Québec, qui va venir alourdir le fardeau, le fardeau fiscal, le fardeau pécuniaire des entreprises, à cause du tarif d'hydroélectricité qui va augmenter pour les PME et les entreprises du Québec. En plus, Mme la Présidente, de payer plus cher pour leur énergie, partout en région, les PME n'ont pas les blocs d'énergie nécessaire pour pouvoir croître, pour pouvoir développer l'économie. On a vu, en ce contexte-là, Frédéric Laurin, professeur de l'économie de l'UQTR, qui posait les bonnes questions, je le cite : «Avons-nous prévu des blocs d'électricité pour assurer le développement de nos PME sur 10 ans? Quelle est la grille d'analyse pour donner des blocs d'électricité? La priorité, ce sont les entreprises d'ici.» Fin de la citation. Pierre-Olivier Pineau, prof des HEC Montréal, disait, et je le cite : «C'est inacceptable. Ce n'est pas aux consommateurs d'électricité de subir les mauvais choix des allocations de blocs d'énergie.» Fin de la citation.

Alors, Mme la Présidente, fut un temps où la ministre parlait de séquençage, de libérer les blocs d'énergie. Aujourd'hui, nos PME, dans toutes les régions du Québec, sont doublement perdantes. Elles paient plus cher puis elles n'ont pas les blocs d'énergie pour se développer. Que va faire le premier ministre?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, Mme la Présidente, quand je suis arrivé comme premier ministre, en 2018, une de mes premières rencontres, ça a été avec le président d'Hydro-Québec, à l'époque, Éric Martel. Et ce que m'a dit Éric, c'est qu'à l'époque Hydro-Québec jetait de l'électricité, jetait de l'électricité parce qu'il n'y avait pas assez de projets d'entreprises. Je pense qu'au grand total, sur notre table, on avait deux petits projets économiques. On est rendus qu'on a une centaine de projets, Mme la Présidente, et on en annonce régulièrement, à un point tel qu'on a réussi à écouler le surplus d'Hydro-Québec, et ça permet à Hydro-Québec d'avoir un plan pour doubler sa capacité.

Mme la Présidente, on ne parle pas de la Baie James, là, on parle de plus que ça, on parle de doubler la taille d'Hydro-Québec. Ça nous a permis, entre autres, de négocier, avec Terre-Neuve, une entente qui nous permet d'augmenter de 50 % la capacité qui va venir de Terre-Neuve. Non seulement on va rehausser Churchill Falls, mais on va développer, avec l'expertise d'Hydro-Québec, Gull Island.

Mme la Présidente, le Québec s'est remis en marche, depuis six ans. On a battu la croissance économique par habitant de l'Ontario, du reste du Canada. Jamais en 15 ans les libéraux n'ont été capables de faire tout ça. Il ne faut être pas gêné, Mme la Présidente, pour venir dire : Comment ça se fait que vous avez trouvé trop de projets puis qu'il ne reste plus d'électricité?

Mme la Présidente, il y a encore beaucoup de projets, on va sortir plus d'électricité...

La Présidente : En terminant.

M. Legault : ...puis on va continuer d'enrichir le Québec.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Ouf! Ne touchez plus à rien, ne continuez pas. Wow!

Mme la Présidente, il est clair, le bloc... l'octroi des blocs d'énergie a été fait au détriment des entreprises du Québec, a été fait au détriment des régions. J'aimerais offrir cette question complémentaire, puis je vais dire au premier ministre de qui elle vient, et je vais citer la personne, qui allait dans exactement le même sens : «On a des enjeux d'énergie. Le gouvernement, actuellement, réserve l'énergie pour les projets dans le sud de la province.» Fin de la citation. C'est une question qui lui est donnée par son député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, quand on regarde l'énergie qui est disponible en Abitibi-Témiscamingue, il y a quatre projets. Dans le temps des libéraux, il y en avait zéro. Maintenant, il y en a quatre. On ne peut malheureusement pas desservir les quatre. Par contre, il y en a un qui est très important, Dumont Nickel, 750 emplois. Il y en a trois autres qu'il y a un petit peu moins d'emplois, mais beaucoup d'emplois.

Mme la Présidente, c'est ce que j'appelle des beaux problèmes. On a trop de projets, actuellement, au Québec. On va continuer de mieux faire que l'Ontario puis que le reste du Canada.

La Présidente : En terminant.

M. Legault : C'est le contraire de ce que faisaient les libéraux.

La Présidente : Troisième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Là, je suis conscient, Mme la Présidente, que le premier ministre a accepté les excuses de son député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, qui disait néanmoins la vérité, que la région... Et ça fait suite d'un rapport qui a été déposé, entre autres, par les élus régionaux, locaux, qui ont dit qu'ils n'ont pas leur part du butin, ils ne sont pas capables de développer leur économie, en Abitibi-Témiscamingue. Son propre député l'a dit. Son député, il ne s'est pas dédit. Il s'est excusé, mais il ne s'est pas dédit, Mme la Présidente. Quand ça vient de votre propre caucus, c'est une preuve additionnelle d'une fin de régime, Mme la Présidente.

• (14 h 40) •

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, Mme la Présidente, d'abord, je viens de dire que, du côté des projets économiques, on compte faire des annonces bientôt, puis il va y avoir de l'électricité disponible.

Maintenant, le député de Rouyn-Noranda parlait aussi de l'utilisation des agences privées dans nos hôpitaux. On le sait, on a réussi, le ministre de la Santé a réussi à se débarrasser d'une bonne partie des agences privées. C'est un peu plus difficile en Abitibi-Témiscamingue, donc on s'ajuste, Mme la Présidente. Mais reconnaissons qu'on a baissé de 50 % l'utilisation des agences privées dans nos hôpitaux.

La Présidente : En terminant.

M. Legault : C'est quand même pas mal mieux que les libéraux.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la cheffe du deuxième groupe d'opposition.

Bilan du gouvernement en matière de santé

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Je veux parler de santé au premier ministre du Québec, qui a aussi été ministre de la Santé, il y a 20 ans, donc c'est un homme d'expérience.

En 2018, le premier ministre promettait un médecin de famille par Québécois. Résultat, c'est un échec. Il a aussi promis 90 minutes d'attente dans les urgences. Résultat, c'est un échec. Il y a eu plusieurs promesses de la CAQ, du premier ministre, et il y a eu peu de choses qui ont été livrées, peu de résultats.

Par contre, ce qu'il a livré, c'est Santé Québec, un mammouth dysfonctionnel et bureaucratique, qui ne donne pas plus de services de qualité aux patients, la fermeture de départements d'obstétrique en région, comme à Lac-Mégantic, c'est un véritable électrochoc que ça a lieu dans la communauté, délabrement des infrastructures hospitalières, manque de premiers répondants et découverture ambulancière, austérité dans un système de santé déjà gravement malade. Et, la semaine dernière, qu'est-ce que le premier ministre nous promettait, avec son projet de loi n° 106? Un bras de fer avec les médecins. Il nous a dit, il nous a promis : Ça va brasser. Puis ça, par exemple, on a des résultats, parce que ça brasse, avec les médecins, mais ça ne donne pas plus de soins aux patients.

Ma question au premier ministre : Est-ce qu'il est fier de son bilan en santé?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, quand j'ai été ministre de la Santé, pour un an, j'ai ouvert le premier... le premier GMF. Ça avait été préparé par Rémy Trudel, qui avait été là avant moi. Puis j'avais dit, à l'époque : La prochaine étape, ça va être de changer le mode de rémunération pour mettre une partie de la rémunération par patient pris en charge. Ça s'appelle la capitation.

Mme la Présidente, tous les gouvernements qui se sont succédé, par la suite, n'ont pas eu le courage de se battre contre les syndicats de médecins. Je rappelle qu'un médecin de famille fait en moyenne 414 000 $ par année, un médecin spécialiste fait 548 000 $ par année. Et savez-vous quoi, Mme la Présidente? Il y a quelques jours, j'avais fait une farce en disant : Regardez bien ça, si QS ne sera pas sur les lignes de piquetage avec les médecins. Bien, Mme la Présidente, c'est arrivé, ils étaient avec les médecins de l'est de Montréal pour dire : Ra, ra, ra! on ne veut pas changer le mode de rémunération, on veut défendre le statu quo. Nous, ce qui est important, c'est de défendre les syndicats, avant de défendre les patients puis les Québécois. Honte à Québec solidaire.

La Présidente : Oui, M. le leader du deuxième groupe, je vous reconnais. Quel est votre rappel au règlement? Je vous écoute.

M. Cliche-Rivard : Mme la Présidente, on a déjà eu exactement ce débat-là. Je vous demanderais de dire au premier ministre de retirer ses propos, s'il vous plaît.

La Présidente : Et vous avez raison. Retirez le mot «honte», M. le premier ministre. Vous le retirez? Vous le retirez.

M. Legault : ...honte, oui.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, retiré, il vient de dire qu'il le retire. Moi, j'aimerais entendre, maintenant...

Des voix : ...

La Présidente : On garde le silence. Première complémentaire.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Mme la Présidente, nous, à Québec solidaire, on se tient debout auprès de ceux et celles qui pensent aux patients. Nous défendons les patients. J'aimerais ça... Je ne l'ai pas entendu dire...

Des voix : ...

La Présidente : Article 32. On écoute la question. On demeure silencieux, je vous prie. Mme la cheffe, poursuivez.

Mme Ghazal : Je veux lui parler des patients. Je ne l'ai pas entendu dire qu'il était fier de son bilan. J'aimerais ça qu'il le dise, qu'il est fier, en regardant dans les yeux les femmes enceintes qui doivent faire de longues heures de route pour pouvoir accoucher, les gens malades qui n'ont pas de médecin de famille. J'aimerais ça qu'il leur dise qu'il est fier de son bilan, au lieu de se chicaner puis d'inquiéter tout le monde avec les médecins de famille.

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, depuis qu'on est arrivés, on est passés de 6,4 millions de Québécois qui avaient accès à un médecin de famille à 7,1 millions. Il y avait 22 000 patients en attente depuis plus qu'un an, on est rendus à 6 300. Mais, Mme la Présidente, si on veut aller jusqu'au bout, il faut changer le mode de rémunération des médecins. Pourquoi Québec solidaire est-il du côté des médecins, plutôt que d'être du côté des Québécois, des patients qui attendent? Parce que, oui, il faut travailler différemment.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Je répète, Mme la Présidente, nous sommes du côté des patients, et c'est pour ça que je me lève, aujourd'hui, et que je lui pose des questions. Ce qu'il fait, en engageant ce bras de fer avec les médecins, c'est qu'il inquiète tout le monde. Avec son projet de loi n° 106, en se chicanant avec les médecins, comment est-ce que ça va donner plus de services aux patients? Comment est-ce que ça va aider les gens qui n'ont pas de médecin de famille, les gens qui attendent dans les urgences, les femmes enceintes qui doivent faire la route? Comment est-ce que ça va les aider? Le système de santé, ce n'est pas une usine à saucisses. Quand est-ce que le premier ministre va réaliser que le système de santé doit prendre soin des humains?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, j'invite la cheffe de Québec solidaire à lire le rapport de l'ancien ministre Michel Clair. Au moins, j'ai entendu, tantôt, le chef du Parti québécois dire qu'il était d'accord avec nous. Québec solidaire est en désaccord parce qu'ils ne comprennent pas ce qu'on est en train de faire. Actuellement, les médecins sont payés à l'acte, donc il n'y a pas un incitatif à prendre en charge, à déléguer les actes moins lourds aux infirmières. Il faut changer la façon de travailler. Que Québec solidaire lise le rapport de Michel Clair, ils vont comprendre, comme le chef du Parti québécois.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député de Rosemont.

Projet de loi visant principalement à instaurer la responsabilité collective
et l'imputabilité des médecins quant à l'amélioration
de l'accès aux services médicaux

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je ne sais pas où le premier ministre a vu une ligne de piquetage de médecins, mais moi, je n'ai jamais vu ça, et ce n'est pas là qu'on était hier, mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve et moi. Nous étions avec de jeunes femmes médecins dans Hochelaga-Maisonneuve qui tiennent ça à bout de bras puis qui essaient d'aider les plus mal pris de Montréal.

Alors, le premier ministre continue à faire une fixation sur les lignes de piquetage, mais ça n'arrive pas, avec les médecins. Non. Nous, on défend les patients, parce que ça devient redondant, les querelles avec les médecins. La chicane trimestrielle du premier ministre avec les médecins, ça fait écran de fumée. Pendant ce temps-là, on ne parle pas du bilan désastreux de la CAQ en santé. Pendant ce temps-là, on ne parle pas des fermetures d'urgences. On ne parle pas de HMR, d'un gouvernement qui n'est même pas capable de livrer un parking d'hôpital.

C'est pratique, les chicanes avec les médecins, mais, dites-moi donc, ça fait quoi pour les patients, la chicane trimestrielle du premier ministre puis de son ministre? Ça fait quoi pour les patients, ça? Ça ne fait rien.

La Présidente : La réponse du ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, je ne sais pas, Mme la Présidente, s'il y avait une question. Je vais essayer de donner une réponse à un énoncé.

C'est sûr, Mme la Présidente, que, si ça fait 50 ans que les différents gouvernements essaient de revoir la rémunération des médecins, ce n'est pas quelque chose de facile à faire. Puis je pense qu'il y a eu énormément de résistance de la part des deux grands syndicats. Et moi, je parle à beaucoup de médecins qui nous disent que, dans le fond, ce qu'on est en train de faire, ça devrait être fait depuis longtemps. Alors donc, c'est ça qu'on est en train de faire, Mme la Présidente.

Maintenant, il y a un enjeu qui est important, puis je pense que de plus en plus de médecins le comprennent, puis on l'a vu avec la mise en place du système GAP qu'on a mis, c'est d'être capables de passer d'une prise en charge individuelle à une prise en charge collective. Qu'est-ce que ça veut dire? Quand il manque de médecins, quand il manque de professionnels, c'est beaucoup plus facile et correct de mettre la charge sur plusieurs médecins dans un GMF plutôt que sur un seul. Ça, ça s'appelle la prise en charge collective. Puis, savez-vous, Mme la Présidente, ça a fonctionné pour 1,1 million de Québécois grâce au GAP...

La Présidente : En terminant.

M. Dubé : ...c'est un des apprentissages du GAP, puis j'y reviendrai tout à l'heure, Mme la Présidente.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : La réalité, là, c'est que le ministre est pris avec son nouvel engagement. Il ne sait plus quoi inventer pour pousser par en avant ce qu'il n'est pas capable de livrer. Là, il est rendu, là, à un an des élections, ça fait que, là, il dit : Tous les Québécois, Québécoises seront pris en charge d'ici 2026. Le temps presse. C'est fort pratique, de s'en prendre aux médecins. Là, il est en train de préparer ses prochains boucs émissaires, ça va être la faute des vilains médecins, mais on a vu neiger, avec ce ministre-là. Il n'est pas capable de livrer, c'est toujours la faute des autres.

Alors, ça sert qui, à part lui, les querelles avec les médecins?

La Présidente : La réponse du ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je vais passer par-dessus ses commentaires puis je vais continuer. On a réussi... Comme le premier ministre a dit tout à l'heure, on est rendus à 85 % des Québécois qui ont un médecin de famille, mais, savez-vous, c'est 100 % des Québécois qui paient, grâce à leurs impôts, grâce à tout ce qu'on fait pour le gouvernement, qui paient pour être assurés. Il y a 15 % des personnes qui ne sont pas assurées qu'ils vont voir un médecin de famille. Moi, ce qui m'inquiète encore plus, j'ai 1,5 million de Québécois qui n'ont pas accès aux services, dont 600 000 vulnérables, avec des maladies chroniques. Ça, ce n'est pas acceptable, Mme la Présidente. Et c'est ça qu'on fait avec le projet qui est présenté, d'aller vers une prise en charge qui est collective, pour enlever de la pression sur les médecins individuellement puis d'être capables d'aller chercher ces patients-là.

• (14 h 50) •

La Présidente : En terminant.

M. Dubé : C'est ça qu'on fait.

La Présidente : En question principale?

Une voix : ...

La Présidente : Oui. Deuxième complémentaire. Allez-y.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Je peux la prendre. Non, blague à part, blague à part, là, le ministre aime ça, des chiffres, là, on va lui parler des siens, parce que, la semaine dernière, le premier ministre a dit ici, en cette Chambre, qu'il y a assez de médecins de famille au Québec. Les propres chiffres de son propre gouvernement, du ministre, là, de la Santé, qui est juste derrière lui. Leurs propres chiffres disent le contraire. On ne sera pas à l'équilibre avec les médecins de famille avant au moins 10 ans, on ne sera pas à l'équilibre avec les médecins spécialistes avant au moins 14 ans. Alors, où est-ce qu'ils prennent leurs chiffres?

Je pense qu'ils sont bien plus intéressés à se chicaner avec les médecins. Mais je repose la question : Ça sert qui, les...

La Présidente : La réponse du ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je vais continuer, Mme la Présidente. Puis c'est ça qu'on va faire au cours des prochaines semaines, parce que non seulement on est en commission parlementaire aujourd'hui, demain, jeudi, on sera en étude détaillée la semaine prochaine. Ce que je veux dire, c'est que, les médecins qui prennent en charge, en ce moment, on a les médecins de famille les mieux payés au Canada, on a le plus de médecins de famille par habitant au Québec, et, en plus, Mme la Présidente, ces gens-là nous disent que, si on travaillait différemment, on aurait assez de médecins.

Alors, Mme la Présidente, c'est exactement ce que le projet de loi n° 106 met en place, des principes de rémunération pour les médecins de famille et des objectifs et des cibles pour être capables d'avoir des résultats pour 9 milliards par année, qu'on investit dans nos médecins à chaque année.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef du troisième groupe d'opposition.

Vente d'électricité par le secteur privé

M. Paul St-Pierre Plamondon

M. St-Pierre Plamondon : Mme la Présidente, il se passe des choses importantes à l'étude du projet de loi n° 69 réformant le secteur de l'énergie. Notamment, on pave la voie à une privatisation de la vente d'électricité, qui, en principe, est le monopole d'Hydro-Québec, le tout sans que le gouvernement n'ait de modélisation ou de projection sur l'ampleur de la privatisation qu'elle est en train... qu'il est en train d'opérer. Donc, combien de projets privés le premier ministre prévoit-il dans les prochaines années? En commission parlementaire, il n'y a pas de réponse à cette question-là. On ne sait pas non plus de combien de revenus le Québec va se priver. Or, des experts d'Hydro-Québec ont fait le calcul, et cette brèche représente... priverait le Québec de 3 milliards de dollars d'ici 2030, évidemment avec l'impact sur nos services publics. Donc, pourquoi est-ce qu'on a le luxe de se priver de cette somme, mais qu'on n'a pas d'argent dans plein d'autres dossiers?

Le projet de loi est clair, le monopole d'Hydro-Québec est brisé. On a demandé au gouvernement à plusieurs reprises d'être transparent et de reconnaître qu'il modifie le pacte québécois sur l'électricité en donnant une place plus grande au privé.

Est-ce que le premier ministre peut, aujourd'hui, se lever en Chambre et avouer aux Québécoises et aux Québécois qu'il est en train de privatiser la vente de l'électricité au Québec?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Je suis surpris de cette question du chef du Parti québécois. D'abord, de notre côté, on a été très clairs : jamais, jamais il n'est question puis il ne sera question de privatiser Hydro-Québec. Par contre, le chef du Parti québécois ne peut pas dire la même chose. Voici ce qu'il a écrit : «La Suède ne craint pas de remettre en question les monopoles étatiques. Elle a introduit le privé dans le secteur de l'hydroélectricité. Le Québec doit se pencher sur l'introduction du privé dans certains secteurs publics.» On a le droit de changer d'idée, monsieur... de Matane, à ce point-là, là, sur la privatisation d'Hydro-Québec?

Mme la Présidente, jamais je n'ai été pour, jamais je ne serai pour. Ce qu'on regarde, actuellement, c'est ce que René Lévesque a fait dès le début d'Hydro-Québec. Quand il y a un projet de barrage ou de développement d'électricité pour une compagnie, que le terrain est adjacent, c'est permis, sinon ce n'est pas permis. Que le PQ puis le chef du PQ arrêtent de faire peur au monde.

Des voix : ...

La Présidente : Alors... Attendez, M. le chef. M. le premier ministre, je redemande de retirer vos paroles. Vous retirez. Et je vous rappelle qu'on ne s'interpelle pas des deux côtés de la Chambre. Une seule personne a le droit de parole. Première complémentaire, le chef.

M. Paul St-Pierre Plamondon

M. St-Pierre Plamondon : Mme la Présidente, ce n'est pas sérieux. Je dis au premier ministre : Vous privatisez la vente d'électricité, qui, normalement, est le monopole d'Hydro-Québec. Il répond : On ne privatisera pas Hydro-Québec. Mais vous voyez la confusion. Ce sont deux sujets distincts. On se prive de 3 milliards d'ici 2030, selon les experts, et là il me cite une description du modèle en Suède en 2014. Ce n'est pas sérieux.

Est-ce qu'il peut reconnaître qu'il est en train de privatiser la vente d'électricité au Québec?

La Présidente : La réponse du premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, l'objectif premier du projet de loi n° 69, c'est de plafonner l'augmentation des tarifs pour les individus, pour le résidentiel, à 3 %. Maintenant, pour ce qui est de la vente d'électricité entre un producteur et un seul consommateur situé sur un terrain adjacent, c'est la seule exception. Puis, en plus, chaque projet devra être approuvé au préalable par le gouvernement.

Mme la Présidente, c'est n'importe quoi. Puis, que ce soit en Suède ou ailleurs, le chef du PQ a déjà été pour la privatisation d'Hydro-Québec.

La Présidente : En terminant.

M. Legault : Qu'il vive avec ça.

La Présidente : Deuxième complémentaire. Et, pour ce faire, je reconnais le député de Jean-Talon.

M. Pascal Paradis

M. Paradis : Jusqu'à aujourd'hui, c'est Hydro-Québec qui a le monopole de vente de l'électricité. Il n'y en a pas d'autre, exception. Aujourd'hui, le gouvernement ouvre une brèche, dit : Des entreprises privées vont pouvoir vendre à d'autres entreprises privées. C'est un changement fondamental au pacte sur l'électricité, qui dit depuis 1963 que l'électricité, l'énergie, ça appartient aux Québécois.

J'ai posé plusieurs fois la question à la ministre, elle n'est pas capable de le dire. Va-t-elle l'admettre? Il y a une privatisation de la vente d'électricité, au Québec, qui est en train de s'opérer.

La Présidente : La réponse de la ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie. On l'écoute.

Mme Christine Fréchette

Mme Fréchette : Écoutez, Mme la Présidente, c'est important de rétablir les faits, là, plutôt que d'induire les gens en erreur. La possibilité de vendre à un terrain adjacent...

Une voix : ...

La Présidente : M. le député de Matane-Matapédia, quel est votre rappel au règlement?

M. Bérubé : ...vous l'avez entendu comme moi.

La Présidente : C'est la critique du travail. Ce n'est pas un mot non parlementaire. Faisons attention. Moi, je veux entendre la réponse de la ministre.

Mme Fréchette : Merci, Mme la Présidente. Donc, j'aimerais souligner, parce que c'est important de le faire, que la possibilité de vendre de l'électricité à un consommateur sur un terrain adjacent, ça existe déjà. Et ça existe déjà parce que le Parti québécois a adopté une règle le permettant lorsque c'est de la biomasse qui est utilisée en termes de source énergétique. Alors, j'aimerais bien que le PQ le reconnaisse, puisque ça résulte de leur propre action.

La Présidente : En terminant.

Mme Fréchette : Ce que l'on amène dans le projet de loi, c'est la possibilité d'utiliser d'autres sources d'énergies renouvelables, tout simplement.

La Présidente : Et vous allez me permettre ici de faire une correction. J'ai commis une erreur. «Induire en erreur» est dans notre lexique. Alors, je vous demande, Mme la ministre, de le retirer.

Une voix : ...

La Présidente : Voilà. L'erreur est humaine.

En question principale, je reconnais la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. La parole est à vous.

Construction d'un poste électrique d'Hydro-Québec
dans le Quartier latin

Mme Manon Massé

Mme Massé : Depuis plusieurs mois, j'implore le ministre de la Culture de ne pas signer le décret qui autorisera la vente du terrain adjacent à la BANQ à Hydro-Québec pour construire son mégaposte de transformation électrique de 315 000 volts en plein coeur du Quartier latin de Montréal. Depuis des mois, plusieurs citoyens et citoyennes prennent tous les moyens qui sont les leurs pour démontrer qu'il n'y a pas d'acceptabilité sociale pour la construction d'une telle infrastructure industrielle adjacente à notre joyau culturel. Le 10 mai dernier, nous étions des centaines réunis pour déclarer notre amour à la Grande Bibliothèque et surtout pour exiger qu'Hydro-Québec fasse mieux, mais surtout fasse ailleurs.

Mme la Présidente, les citoyens et citoyennes de ma circonscription craignent que le ministre profite de l'été pour signer ce décret. Alors, moi aussi, en leur nom, aujourd'hui, je demande au ministre qu'il prenne l'engagement de ne pas signer le décret, surtout pas durant l'été.

Va-t-il le faire?

La Présidente : La réponse du ministre de la Culture et des Communications.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci, Mme la Présidente. En fait, je vais être plus clair : l'engagement que je prends, il est envers le milieu culturel. Et, je l'ai déjà dit, s'il devait y avoir une transaction, s'il devait y en avoir une, cette transaction-là, elle devrait se faire au bénéfice du milieu culturel.

Les discussions qu'on a actuellement avec Hydro-Québec sont encourageantes. Les discussions qu'Hydro-Québec a actuellement avec Bibliothèque et Archives nationales du Québec sont encourageantes. Il y a un fait, et ce fait-là, il est implacable, la réalité est implacable, Hydro-Québec nous dit qu'il n'y a pas d'autre site disponible dans ce secteur-là pour assurer la sécurité énergétique des citoyens du secteur.

Maintenant, le défi qu'on a, le défi qui est devant nous, c'est de nous assurer que, si le projet va de l'avant, il se fasse dans les meilleures conditions possible, qu'il ne défigure pas le quartier et que cette transaction-là se fasse au bénéfice du monde culturel.

Il y a plusieurs éléments qui ont été mis sur la table. Je sais qu'il reste beaucoup de questions. Hydro-Québec comprend bien qu'elle a un travail à faire, un travail d'acceptabilité sociale, en ce sens où elle doit aller vers les citoyens, elle doit aller vers les institutions pour leur expliquer le projet, un projet qui a été présenté à des gens qui, au départ, avaient des doutes...

La Présidente : En terminant.

M. Lacombe : ...et qui, une fois qu'ils ont eu les informations, trouvaient que le projet avait du bon sens.

• (15 heures) •

La Présidente : Première complémentaire.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Mme la Présidente, aujourd'hui, dans les gradins, là, il y a plusieurs ex-parlementaires qui étaient là quand, collectivement, on a décidé de se doter de cette magnifique institution culturelle qu'est la Grande Bibliothèque. Un poste de transformation électrique à côté de notre Grande Bibliothèque nationale. Bien, voyons donc! Pourquoi le ministre continue de répéter ce que dit Hydro-Québec, alors qu'il existe des solutions alternatives?

Va-t-il prendre le temps de ne pas signer ce décret-là?

La Présidente : La réponse du ministre.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Bien, Mme la Présidente, je pense qu'on est vraiment dans les nuances, en ce moment. Quand on parle d'un poste de transformation... Moi-même, quand on m'a parlé du projet, j'ai été surpris, parce que ce que j'avais en tête, c'est, effectivement, le poste de transformation actuel, qu'on voit d'ailleurs très bien. Quand on est chez BANQ, on le voit. Disons que le moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas très élégant.

Maintenant, ce n'est pas du tout ce type de projet là qui est dans les cartons d'Hydro-Québec. Et, encore une fois, si le projet va de l'avant sur ce terrain-là, à cet endroit-là, ça n'aura absolument rien à voir. Mme la Présidente, on agit de façon responsable. On ne souhaite pas défigurer le quartier, au contraire, on souhaite que, si une transaction va de l'avant, elle se fasse au bénéfice du secteur culturel. C'est ces discussions-là qu'on a actuellement.

La Présidente : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Demeurez en place pour la tenue des votes reportés. Et, pour ce faire, je cède la place à la première vice-présidente de l'Assemblée nationale. Bonne fin de journée, tout le monde.

Votes reportés

Adoption du principe du projet de loi n° 94

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le ministre de l'Éducation proposant que le principe du projet de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives, soit adopté.

Le vote est maintenant ouvert.

Le vote est maintenant terminé. M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  99

                      Contre :          11

                      Abstentions :   0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, la motion est adoptée. En conséquence, le principe du projet de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives, est adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission de la culture et de l'éducation

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci, Mme la Présidente. Donc, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 94, la Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives, soit déféré à la Commission de la culture et de l'éducation pour son étude détaillée et que le ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Adoption du projet de loi n° 81

Nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs proposant que le projet de loi n° 81, Loi modifiant diverses dispositions en matière d'environnement, soit adopté.

Le vote est maintenant ouvert.

La période de vote est terminée. M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  77

                      Contre :          33

                      Abstentions :   0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, la motion est adoptée. En conséquence, le projet de loi n° 81, Loi modifiant diverses dispositions en matière d'environnement, est adopté.

Motions sans préavis

Maintenant, nous allons poursuivre à la rubrique Motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je suis prête à reconnaître un membre du troisième groupe d'opposition. M. le chef du troisième groupe d'opposition. M. le chef.

Convenir d'abolir le lien entre l'État du Québec
et la monarchie britannique

M. St-Pierre Plamondon : Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la cheffe du deuxième groupe d'opposition, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale affirme sans équivoque qu'elle est [la] seule dépositaire de l'expression démocratique du peuple québécois;

«Qu'elle souligne qu'une très forte majorité de Québécois et [de] Québécoises n'éprouve aucun attachement envers la monarchie britannique;

«Que l'Assemblée nationale convienne d'abolir le lien entre l'État du Québec et la monarchie britannique.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le chef. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Il y a consentement, sans débat, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée? M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Pourquoi ne pas voter, Mme la Présidente?

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, le vote est maintenant ouvert.

Le vote est terminé. M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  106

                      Contre :              0

                      Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, cette motion est adoptée. M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Mme la Présidente, on aimerait envoyer le résultat de cette motion au premier ministre canadien et au palais de Buckingham.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Ce sera fait, M. le député. Donc, nous allons poursuivre.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Gardez le silence, s'il vous plaît, qu'on puisse procéder à nos travaux. Merci. Donc...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît!

Maintenant, je suis prête à entendre un membre du groupe formant le gouvernement. Mme la députée de Bonaventure, à vous la parole.

Rappeler à VIA Rail que les citoyens de la Gaspésie
ont droit à des services de transport accessibles,
fiables et équitables

Mme Blouin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'investissement massif du gouvernement du Québec dans l'infrastructure ferroviaire en Gaspésie;

«Qu'elle constate que l'infrastructure a été remise en état, qu'elle est sécuritaire et qu'elle permettra de voyager à des vitesses raisonnables jusqu'à Port-Daniel—Gascons d'ici quelques semaines;

«Que l'Assemblée nationale rappelle à VIA Rail que les liaisons régionales sont au coeur du mandat de la société d'État fédérale et que la liaison régionale Matapédia-Gaspé est essentielle pour desservir les communautés de la Gaspésie;

«Qu'elle demande à VIA Rail de rétablir, au minimum, le service ferroviaire jusqu'à New Carlisle dans les plus brefs délais et de mettre en place une navette adaptée assurant la liaison jusqu'à Gaspé;

«Qu'enfin, l'Assemblée nationale rappelle à VIA Rail que les citoyennes et citoyens de la Gaspésie, comme ceux de toutes les régions du Québec, ont droit à des services de transport accessibles, fiables et équitables.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader.

• (15 h 10) •

Une voix : ...

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Motion adoptée.

Maintenant, un membre du groupe formant l'opposition officielle. M. le député de Marquette, à vous la parole.

Souligner le 25e anniversaire du décès de M. Maurice Richard

M. Ciccone : Merci.Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le ministre de la Culture et des Communications, le député de Maurice-Richard, la députée de Terrebonne, la députée de Vaudreuil et le député de Saint-Jérôme :

«Que l'Assemblée nationale souligne le 25e anniversaire du décès de M. Maurice Richard, légendaire hockeyeur et ex-capitaine des Canadiens de Montréal;

«Qu'elle salue la mémoire de cet homme dont le courage, la fougue et la résilience, sur la patinoire et en dehors de celle-ci, l'ont transformé en porteur des aspirations de toute une nation;

«Qu'elle souligne les multiples records sportifs cumulés au cours de sa carrière qui lui auront permis de se placer au sein de l'élite de son sport;

«Qu'elle souligne que par son exemple personnel, ses performances et son sens inébranlable de la justice, il a fait progresser la cause des Québécois au sein du monde du hockey;

«Qu'elle prenne acte de l'hommage qui lui a été rendu par l'octroi de la désignation de [personne] historique par le gouvernement du Québec à l'occasion de l'anniversaire de son décès;

«Qu'enfin, elle observe une minute de silence à la mémoire de ce grand Québécois dont la pierre tombale est ornée de l'épitaphe "Ne jamais abandonner. Never give up".»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, il y a consentement, sans débat, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Cette motion est-elle adoptée? Motion adoptée?

Une voix : ...

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, le vote est maintenant ouvert.

Donc, le vote est terminé. M. le secrétaire général, pour le résultat.

Le Secrétaire : Pour :  103

                      Contre :              0

                      Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, cette motion est adoptée. Je vous invite à vous lever et conserver une minute de silence.

• (15 h 13   15 h 14) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.

Nous allons poursuivre, et je suis prête à reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante conjointement avec le député de Pontiac, le député des Îles-de-la-Madeleine et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale exprime sa pleine reconnaissance envers le travail essentiel et rigoureux des professionnel.les de la santé, qui oeuvrent chaque jour au service des patient.es dans un contexte souvent difficile;

«Qu'elle souligne que toute réforme du système de santé doit se faire en concertation avec le personnel médical et viser à renforcer leur capacité d'offrir des soins accessibles, humains et durables, en tenant compte de la réalité des patients les plus vulnérables;

«Qu'elle rappelle que la prévention est un pilier fondamental d'un système de santé efficace et équitable;

«Qu'elle réitère son engagement à soutenir les professionnel.les de la santé dans leur mission et à défendre une médecine centrée sur les besoins des patient.es.» Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Il n'y a pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, nous allons poursuivre nos travaux. Une motion sans préavis ayant déjà été présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a consentement pour permettre la lecture d'une autre motion sans préavis. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Alors, je vous cède la parole, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, avec la permission des autres groupes parlementaires, avec leur consentement, je vous demanderais qu'on soit exonérés de la lecture des deux motions rétroactives de consultations, soit celle sur le projet de loi n° 101 et celle sur le projet de loi n° 103.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

Entériner le mandat de procéder à des consultations
particulières sur le projet de loi n° 101

M. Jolin-Barrette : Alors, je fais motion, Mme la Présidente, pour que la motion rétroactive du projet loi n° 101 soit adoptée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce qu'il y a consentement qu'elle soit adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté.

Entériner le mandat de procéder à des consultations
particulières sur le projet de loi
n° 103

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je demande le consentement pour l'adoption de la motion rétroactive du projet de loi n° 103.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce qu'il y a consentement qu'elle soit adoptée? Consentement. Donc, adopté. Parfait.

Avis touchant les travaux des commissions

Donc, je vous... Oui. Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

Et donc j'avise cette Assemblée que la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles va poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 69, la Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 19 heures à 21 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des relations avec les citoyens va poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 95, la Loi favorisant l'équité dans l'accès aux services de garde éducatifs à l'enfance subventionnés dispensés par les titulaires de permis, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 19 heures à 21 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland;

La Commission des finances publiques va entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 92, la Loi modifiant diverses dispositions principalement dans le secteur financier, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 19 heures à 21 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de la santé et des services sociaux va poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet loi n° 106, la Loi visant principalement à instaurer la responsabilité collective et l'imputabilité des médecins quant à l'amélioration de l'accès aux services médicaux, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 40 et de 18 h 40 à 20 h 15, à la salle Pauline-Marois.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'ordre spécial concernant l'horaire des travaux des commissions?

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Donc, c'est jusqu'à 21 h 15, à la salle Pauline-Marois. J'avais une petite coquille dans mon ordre du jour. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

Donc, nous allons maintenant poursuivre à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et, pour ce faire, je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement. Et j'ai besoin des feuilles, s'il vous plaît.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 16 du feuilleton, s'il vous plaît. Merci.

Projet de loi n° 89

Prise en considération du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, à l'article 16 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 89, Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out.

Y a-t-il des interventions sur ce projet de loi? M. le ministre du Travail, à vous la parole.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Oui. Merci, Mme la Présidente. Évidemment, on est heureux d'avoir complété l'étude détaillée de ce projet de loi n° 89, dont le titre est assez révélateur, considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out. Est-il besoin de le répéter, Mme la Présidente, on est les champions, au Québec, en termes de nombre de conflits de travail, 691, selon Statistique Canada, en 2023, 753 — on a battu notre record de 2023 — en 2024, 91 % des conflits de travail au Canada. Et ça, inéluctablement, il y a des impacts sur la population. Et c'était ce qui nous a guidés dans l'élaboration, et la préparation, et les travaux parlementaires menant à la fin de l'étude détaillée, le bien-être de la population, mais toujours dans un souci ou une quête incessante de trouver un bon équilibre entre l'exercice du droit de grève et les besoins de la population.

• (15 h 20) •

Évidemment, c'est une minorité de conflits de travail. Quand on négocie une première convention ou un renouvellement de convention collective de travail, on essaie d'utiliser tous les outils. On fait de la négociation raisonnée. On cherche des solutions et on règle à près de 95 % sans conflit. Mais, dans le 5 % ou 6 % de conflits, c'est là qu'il y a des impacts, des retombées qui vont au-delà de simples inconvénients. Dans plusieurs situations, la population était même prise en otage. Souvenons-nous, dans le transport scolaire, dans le transport en commun, dans les services funéraires, en éducation, dans à peu près tous les secteurs d'activités humaines et sociales, il y a eu des conflits qui ont généré des retombées inadmissibles pour la population, souvent devenue impuissante, vulnérable ou sans aucun moyen de substitution, en raison de ces grèves qui se poursuivent actuellement au Québec.

On maintient l'intégralité du régime des services essentiels en santé et services sociaux. On a maintenant, avec l'adoption de cette loi-là, si c'est fait cette semaine ou au jour approprié, un nouveau régime de maintien de services pour assurer le bien-être de la population, pour s'assurer que sa sécurité sociale, économique ou environnementale ne soit pas affectée de manière disproportionnée.

C'est un nouvel outil, encore une fois, qui respecte la constitutionnalisation du droit de grève. En même temps, de manière parallèle, il y a des besoins fondamentaux que la population doit combler de façon urgente, parfois, même en situation de conflit de travail.

Donc, c'est un nouveau mécanisme qui vise le maintien d'un niveau de service minimal avec un recours qui est balisé, qui permet au gouvernement d'adopter un décret, qui confie à un tribunal impartial et indépendant le devoir de déterminer si les parties sont assujetties aux critères prévus dans le projet de loi, et, s'il y a une décision d'assujettissement, les parties auront à déterminer les tenants et aboutissants de ces services minimums là à maintenir, et par la suite le tribunal aura à juger si les services sont suffisants et intervenir, le cas échéant.

Il y a un deuxième outil qui permet, en cas de préjudice grave ou irréparable à la population, si c'est une menace appréhendée ou si c'est effectif... Le ministre du Travail pourra, après, bien sûr, une conciliation-médiation infructueuse, déférer le dossier à un arbitre de différends, qui, lui aussi, est une personne indépendante et impartiale... aura comme mandat de déterminer le contenu de la convention collective, en fait, de bien identifier ce qui constitue le différend et de s'assurer de prévoir la solution appropriée dans la convention collective de travail.

Il y a eu quelques amendements de précision, mais le projet de loi est demeuré, dans sa substance, dans son libellé, quasi identique à sa mouture initiale.

Je veux revenir sur le fait que c'est un processus qui est bien balisé, qui se distingue de ce que nous retrouvons dans le Code canadien du travail, qui est apolitique, qui ne met pas fin, quant à son premier mécanisme, à l'exercice effectif du droit de grève. Dans son deuxième mécanisme, à partir du moment où le ministre du Travail défère à un arbitre de différends, là, ça met fin à un conflit, que ce soit une grève ou un lock-out.

Donc, en terminant, Mme la Présidente, je remercie l'ensemble des collègues gouvernementaux qui étaient à la Commission de l'économie du travail, j'aurai l'occasion de le faire de façon plus précise au moment de l'adoption, le cas échéant, encore une fois, et évidemment tous les participants aux consultations particulières. Je suis fondamentalement convaincu que c'est un projet de loi qui aura des retombées positives pour assurer un bien-être à la population, pour éviter les préjudices que nous avons vécus dans certains conflits de travail. Et je recommande, en conséquence, que cette Assemblée prenne en considération le rapport de la Commission de l'économie et du travail afin que nous puissions procéder dans les meilleurs délais à l'adoption de ce projet de loi là, pour le bénéfice des Québécoises et des Québécois. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, nous allons poursuivre avec l'intervention de Mme la députée de D'Arcy-McGee.

Mme Elisabeth Prass

Mme Prass : Merci, Mme la Présidente. Je prends la parole aujourd'hui pour la prise en considération du projet de loi n° 89, Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out, un texte qui a suscité à la fois des inquiétudes et de grandes espérances, car il touche à l'un des piliers fondamentaux de notre démocratie, le droit de grève.

Le droit de grève n'est pas une simple revendication sociale. Il est un principe à valeur constitutionnelle inscrit dans notre histoire, forgé par les luttes syndicales et reconnu par nos engagements internationaux. En tant que législateurs, nous avons tous une responsabilité à assurer l'équilibre entre la liberté d'expression et la continuité du service public pour les populations les plus vulnérables.

Ce projet de loi part d'un constat réel que le droit de grève doit être protégé, mais les grèves peuvent avoir des conséquences parfois lourdes sur la vie quotidienne des citoyens les plus vulnérables. Il faut le reconnaître d'emblée, ce projet de loi soulève des questions fondamentales sur l'équilibre que nous devons maintenir, comme législateurs, entre le respect des droits des travailleurs, notamment celui de recourir à la grève ou de recourir au lock-out, et la nécessité d'assurer un accès minimal et continu à des services essentiels pour les populations vulnérables.

Je ne peux pas me mettre à la place du gouvernement pour savoir quel est l'événement qui a inspiré à mettre ce projet de loi de l'avant, mais je peux vous parler, en tant que maman d'un fils lourdement atteint du trouble du spectre de l'autisme, les conséquences que certaines grèves peuvent avoir non seulement sur nos élèves, mais sur nos familles.

Lorsque les écoles ferment, ce sont des milliers de familles d'enfants avec des besoins particuliers qui doivent s'organiser avec la précipitation et s'inquiéter de la perte d'accès à des thérapies que leurs enfants ont à l'école et la perte potentielle des atouts de leurs enfants. Il faut comprendre qu'on... qu'un jeune avec des besoins particuliers, ce qui fait en sorte qu'il peut apprendre de nouveaux acquis et de nouveaux atouts, c'est la répétition, c'est l'habitude. Et donc les éducateurs, éducatrices spécialisés et le personnel de soutien dans le réseau scolaire, justement, élaborent un plan avec ces enfants-là et leurs parents pour s'assurer qu'ils vont les aider et... à acquérir ces acquis qui feront en sorte qu'ils pourront avoir une certaine autonomie, selon leurs habiletés. Dans le secteur de l'éducation, une grève prolongée peut avoir des répercussions significatives sur la réussite et le bien-être des élèves avec des besoins particuliers, qui reçoivent non seulement des services éducatifs à l'école, mais aussi des services thérapeutiques dans le cadre de leurs plans d'intervention.

En tant que maman d'un jeune garçon avec un trouble du spectre de l'autisme, la période de la pandémie a été plutôt difficile. Alors, comme tout le monde l'a vécu au Québec et à travers le monde, du jour au lendemain, le monde a arrêté, si vous voulez, à un certain point. Et donc les enfants ont été à l'école... été à la maison à temps plein. Les parents ont été demandés de reprendre ce rôle d'éducateur qui leur était fourni dans les écoles. Ce n'était pas évident pour les parents avec des enfants qui n'ont pas de besoin particulier, déjà, de devoir organiser, faire son travail à partir de la maison, mais aussi s'occuper de nos jeunes, et s'assurer qu'ils ne passent pas la journée devant la télévision ou un écran, et, justement, les stimuler de façon éducative.

Donc, moi, ce que j'ai vu durant la pandémie, donc les trois... trois mois et demi pour lesquels nos enfants étaient à la maison, moi, j'ai vu mon fils perdre plusieurs acquis qu'il avait appris dans les dernières années, des acquis qui ne sont pas tous revenus. Et, justement, il a pu retourner à l'école pour les deux dernières semaines de l'année scolaire lors de la pandémie, parce que le gouvernement a consulté auprès des experts, y compris Dr Royer, qui est venu nous parler lors des consultations sur le projet de loi n° 89, pour expliquer au gouvernement les conséquences à long terme que la fermeture des écoles avait et aurait pu avoir davantage sur nos jeunes avec des besoins particuliers lors de la pandémie, et le gouvernement a pris une décision courageuse d'exiger que les écoles spécialisées pour ces jeunes-là devraient ouvrir et les desservir, encore une fois, parce qu'on sait les conséquences que ça pourrait avoir sur ces jeunes-là.

Donc, la question, c'est : Si le gouvernement a trouvé bon de réouvrir ces écoles de façon exceptionnelle lors de la pandémie, en raison des conséquences potentielles, bien, le même résultat devrait être... le même résultat devrait être là pour ces jeunes n'importe quand, même s'il y a une grève ou s'il y a d'autres perturbations dans la société.

• (15 h 30) •

Le ministre du Travail, quand on s'est questionnés à ce sujet-là lors des consultations et lors de l'étude détaillée, a lui-même dit qu'il ne devrait jamais y avoir de bris de service et que c'était une des choses qui l'inspiraient à déposer ce projet de loi. En 2025, il y a eu plus de 4 500 bris de service scolaire au Québec, une augmentation de plus de 1 000, avec l'année antérieure. Si le gouvernement croit bon de mettre en place un projet de loi qui permettrait au Tribunal administratif du travail d'offrir un service minimalement requis pour ces jeunes-là pour qu'il n'y ait pas de bris de service, justement, en raison d'une grève, bien, on espère que le gouvernement et le ministre de l'Éducation auront la même sensibilité, justement, pour s'assurer que les bris de service soient en recul et pas en hausse d'une année à l'autre.

On sait que les professeurs, le personnel de soutien, les éducateurs, éducatrices spécialisés font un travail extraordinaire et, en tant que parents et en tant que société, on veut être là pour les soutenir, parce qu'on sait la différence qu'ils font dans la vie de nos jeunes et dans la vie de nos familles. Donc, ce projet de loi, entre autres, adresse cet enjeu-là. Mais, comme j'ai dit, on espère que le gouvernement fera en sorte de s'assurer qu'il n'y aura plus de coupures de programmes, qu'il n'y a plus de coupures de postes qui fait en sorte que des jeunes doivent rester à la maison parce qu'il y a un bris de service scolaire, que leurs parents doivent s'absenter ou quitter leur travail pour s'occuper d'eux à temps plein, des parents qui n'ont pas les capacités, eux, d'entreprendre l'éducation que leurs enfants recevaient à l'école une fois qu'il y a un bris de service et qu'ils sont à la maison.

Et j'encouragerais également le gouvernement à appeler le projet de loi de ma collègue, projet de loi n° 398 de ma collègue de Westmount—Saint-Louis, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique afin de consacrer le droit des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage de recevoir des services éducatifs équivalents à ceux dispensés par l'école. Si le premier ministre, qui dit que la persévérance scolaire est une de ses priorités... bien, il faut que la persévérance scolaire et les moyens pour y arriver soient là pour tous nos jeunes, pas seulement dans les classes régulières. Et donc il y a un projet de loi qui a été déposé avec un article que le gouvernement pourrait facilement adopter pour s'assurer, justement, que nos jeunes soient toujours encadrés et soutenus dans le cadre de leur parcours éducatif, que ce soit à l'école ou lors d'un bris de service où les services peuvent être rendus à la maison.

Comme j'ai mentionné, quand les enfants avec des besoins particuliers sont demandés de rester à la maison pour des périodes prolongées, bien, les parents ont également des... il y a également des conséquences pour les parents, comme j'ai dit, qui doivent quitter ou s'absenter du travail et s'occuper de leur enfant à temps plein.

Ce projet de loi repose sur un dialogue renforcé entre les parties concernées. Il ne s'agit pas d'imposer des restrictions unilatérales, mais bien de mettre en place un cadre qui oblige à prendre en compte les besoins de la population... des populations plus vulnérables dès le début des négociations et tout au long du conflit de travail.

Il faudra assurer... Il ne fait... Excusez-moi. Il ne fait aucun doute que le droit de grève et le droit au lock-out sont des piliers du droit de travail au Québec. Ils permettent aux parties patronales et syndicales de négocier en bonne foi et d'exercer une pression légitime pour parvenir à une entente équitable. Toutefois, il nous incombe, comme législateurs, d'assurer que ces conflits ne viennent pas compromettre indûment les populations vulnérables, notamment en ce qui concerne l'accès aux services essentiels et au bon fonctionnement de notre société.

Ce projet de loi soulève des questions fondamentales sur l'équilibre entre deux principes qui nous tiennent à coeur : d'une part, le respect des droits des travailleurs qui ont le droit de revendiquer de meilleures conditions de travail et de négocier dans un rapport de force équilibré et, d'autre part, la nécessité de protéger des services essentiels et de minimiser les impacts sur les populations les plus vulnérables lors de conflits de travail.

Le projet de loi n° 89 propose donc une réflexion sur la manière dont nous pouvons mieux considérer les besoins des populations vulnérables dans ces situations de conflit de travail. Il ne remet pas en question le droit de grève ni le droit au lock-out, mais cherche plutôt à établir des balises claires pour que ces droits s'exercent dans le respect des citoyens qui, bien souvent, subissent les contrecoups de ces tensions sans en être directement impliqués.

Nous devons être prudents et veiller à ce que cet encadrement ne devienne pas une atteinte au droit fondamental de négociation des travailleurs. Nous devons nous assurer que les services essentiels... que les services sont maintenus sans affaiblir indûment le pouvoir de négociation des employés.

Nous sommes conscients que des mécanismes existent déjà pour garantir le maintien de certains services essentiels, notamment dans le domaine de la santé et la sécurité publique, toutefois, nous croyons qu'il est pertinent d'examiner si ces mécanismes sont suffisants et s'il est nécessaire d'y apporter des ajustements, comme le fait le projet de loi.

Nous pensons notamment que le gouvernement doit jouer un rôle plus actif en amont des conflits en favorisant la médiation préventive et en facilitant le dialogue entre les parties. Trop souvent, les grèves et les lock-out sont le résultat d'un climat de négociation qui s'est détérioré, faute d'accompagnement suffisant.

En somme, Mme la Présidente, nous reconnaissons la pertinence des objectifs du projet de loi n° 89 et nous sommes... et nous croyons qu'il est essentiel d'examiner attentivement les implications de cette loi une fois qu'elle aura été adoptée. Nous avons une responsabilité de légiférer avec mesure, écoute et discernement. Le projet de loin° 89 doit être vu non comme un outil pour trancher un conflit entre deux camps, mais comme une tentative de moderniser notre cadre législatif face à une société en mutation.

Le droit de grève et de lock-out doit être protégé, et les besoins essentiels des populations les plus vulnérables doivent l'être aussi. Notre rôle est de faire en sorte que ces deux exigences ne soient pas opposées mais articulées.

Je voterai donc, au nom de mon parti politique, en faveur de la prise en considération du projet de loi n° 89, mais je le ferai avec des attentes claires que le gouvernement n'en abuse pas, car notre but ultime, c'est de renforcer la confiance du public dans nos institutions en montrant que nous sommes capables de concilier justice sociale et intérêt collectif. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je suis prête à reconnaître un prochain intervenant. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Quelle tristesse de se retrouver ici, au salon rouge, pour parler du projet de loi n° 89! J'aurais sincèrement préféré ne pas avoir à faire ça. C'est un immense recul en droit du travail auquel nous assistons. On l'a vu venir dès le départ, que ce ne serait pas quelque chose qui servirait les intérêts des travailleurs, travailleuses du Québec, ce projet de loi là. Et, tout au long de l'étude du projet de loi, malheureusement, le ministre nous a démontré, article après article, que ce n'était pas ça qu'il avait à coeur, l'intérêt des travailleurs, travailleuses du Québec.

On a même fait une interpellation, ici la semaine dernière, où on a dû essayer de le faire réaliser que les grèves, même, qui peuvent être... qui sont nuisibles, qui sont des nuisances, parfois, pour les citoyens, citoyennes, en particulier dans les services publics, bien, amènent à des changements sociaux. Malgré tout, le ministre est allé de l'avant intégralement avec son projet de loi. Il dit souvent que son projet de loi est perfectible, mais, dans les faits, il n'y a pas vraiment de virgules qui bougent tant que ça sur la matière.

Il utilise des drôles d'arguments, aussi, mon collègue le ministre du Travail, quand il dit : Ah! il y a plus de grèves ici qu'ailleurs au Canada. Bien oui, mais on en a parlé, ça, à l'étude détaillée. Il oublie peut-être de mentionner qu'il y a 40 % de syndicalisation aussi puis qu'ailleurs au Canada c'est pas mal plus bas que ça. Donc, c'est un peu spécial de me faire servir l'argument : Il y a plus de grèves ici qu'ailleurs. Bien oui, parce qu'il y a plus de syndicats ici qu'ailleurs. Quelle surprise! Un plus un égal deux, Mme la Présidente. Il le sait très bien, d'ailleurs, mais, même si on le corrige en étude détaillée, il se permet de revenir ici, à l'étude... à l'adoption du rapport, avec le même argument qu'on a démonté plus tôt, mais, bon, ça lui appartient.

L'autre argument qu'il n'utilise pas, c'est celui que les experts sont venus nous dire. Il y avait un graphique impressionnant, très, très simple, qui mettait en lien le nombre de grèves au Québec avec la hausse de l'inflation. Oh! on remarquait assez vite, quand on superposait les deux courbes, là, qu'elles étaient exactement similaires. Quelle surprise aussi que, dans le cas où il y a de l'inflation très forte, les travailleurs, travailleuses aient plus envie d'aller se battre pour aller chercher des augmentations de salaire dans le sens du monde qui viendraient couvrir ces inflations-là! Bien, rien de surprenant là.

Alors, est-ce qu'il y a eu une résurgence d'un certain nombre de grèves dans les dernières années? Oui. Objectivement, les faits sont là. Est-ce qu'il y a une hausse aussi impressionnante de l'inflation dans les dernières années? Ben oui, évidemment, puis c'est à ça que ça sert, un syndicat, d'aller défendre ses conditions de travail, alors que, souvent, il y a un patron qui essaie de profiter de la conjoncture pour ne pas avoir à payer plus de cents, plus de dollars, puis devoir garder le maximum de profit pour lui puis ses investisseurs. Qui, qui la fait, l'économie, Mme la Présidente? C'est les travailleurs et travailleuses. Bien, j'espère qu'ils se donnent des outils pour aller chercher leur dû.

Quand il y a des moments où est-ce que c'est plus le chômage qui est endémique, bien là on voit souvent une baisse du nombre de grèves parce que la conjoncture est plus difficile, le rapport de force est plus difficile, mais, quand le rapport de force est favorable, j'espère que le monde en... que les travailleurs en profitent, sinon la redistribution de la richesse, elle n'arrivera jamais. Alors, qu'on me dise, là : Bien là, il faudrait peut-être un retour du balancier parce qu'il y a trop de grèves, bien, un instant, là, il y a une conjoncture particulière qui l'explique et qui fait en sorte qu'il y a une redistribution de la richesse un peu plus forte que d'habitude qui a lieu en ce moment.

• (15 h 40) •

Est-ce que c'est toujours agréable, des grèves? Non. On en a parlé ad nauseam dans l'étude détaillée. J'ai été un conseil syndical pendant de nombreuses années avant de faire mon arrivée ici, Mme la Présidente, en 2018. J'en ai organisé, des grèves. Ce n'est pas agréable, faire ça. On essaie de rendre ça le plus sympathique possible, là, que le monde y trouve de l'entrain puis qu'ils aient de l'énergie, c'est un peu ça, notre travail, quand on est conseiller syndical, mais on préfère ne pas avoir à organiser des grèves. On préfère à avoir du monde qui sont capables d'avoir un rapport de force de base puis d'avoir une convention collective signée. C'est souvent le cas. D'ailleurs, le ministre l'a dit lui-même, une écrasante majorité des conventions collectives sont l'objet, bien sûr, de négociations, parfois une négociation serrée, mais elles finissent par avoir une conclusion heureuse, une conclusion négociée sans avoir recours à la grève ou au lock-out.

Alors, qu'on me dise que, là, il faut aller attaquer les droits des travailleurs, travailleuses à travers un projet de loi parce que, tout à coup, il y aurait trop de grèves, je n'achète pas. Je n'achète pas, ça n'a pas lieu d'être comme argument. La démonstration n'est pas faite de la nécessité de ce projet de loi là. C'est probablement, à mon avis, un des plus inutiles que nous avons eus à débattre, le ministre et moi, depuis notre arrivée respective dans cette Chambre, notre 13e ou 14e, je pense, projet de loi ensemble, certainement le plus inutile et, en même temps, le plus dangereux d'un point de vue de droit du travail.

Qu'est-ce qu'il fait, son projet de loi, au ministre? Il fait essentiellement deux choses. La première, il décide d'aller jouer dans le droit de grève. Lui, il dit qu'on prend en considération les besoins de la population, le vrai titre du projet de loi ça aurait dû être projet de loi pour limiter le droit de grève au Québec parce que c'est ça que ça fait.

On a eu un débat ici, un des premiers projets de loi que le ministre et moi, on a négocié, c'était le projet de loi pour mettre à jour la loi sur les services essentiels. Il n'avait pas le choix. Ce n'était pas ça qui était dans sa priorité de travail, mais il n'avait pas le choix, il y avait eu un jugement, le jugement Flageole, du Tribunal administratif du travail, qui obligeait à revoir les principes de cette loi-là qui commençait à être un peu datée parce qu'il y avait des pourcentages précis de présence au travail dans le projet de loi qui étaient... qui avaient été plaidés comme anticonstitutionnels, non respectueux de la Charte des droits et libertés, du droit d'association.

Alors, on l'a renégocié ensemble. On a atterri sur des nouvelles conceptions : le droit à la sécurité physique des personnes. Et c'est ça qui est devenu le moteur, et je vous dirais même plus que le moteur, la charpente même du concept des services essentiels. À l'époque, le ministre avait même permis au TAT de pouvoir élargir la portée des services essentiels. Moi, j'étais plus ou moins d'accord avec ça à l'époque, mais c'est ça que lui avait fait dans la perspective, j'imagine, de pouvoir étendre son champ d'application éventuellement.

Ça a été testé, ça, Mme la Présidente. Le ministre a utilisé, encore une fois, ad nauseam l'exemple du RTC. À l'été 2023, si je ne me trompe pas, 2022 ou 2023, le ministre a utilisé l'exemple d'une grève de quelques jours, juste avant le Festival d'été de Québec, du RTC ici, le Réseau de transport de la Capitale, pour justifier, donc, son intervention. Mais, quand est venu le temps, pour les dirigeants du RTC, d'aller plaider pour l'élargissement des services essentiels puis que ce soit inclus, les transports collectifs de la ville de Québec, bien, ils ont perdu. Le Tribunal administratif du travail a décidé que ça n'avait pas lieu d'être, qu'il n'y avait pas eu de danger pour la sécurité physique des personnes ou la santé physique des personnes, que le chaos appréhendé qui avait été dessiné par les administrateurs du RTC n'est pas arrivé. La démonstration avait été faite, par les faits, que c'était nuisible, ça pouvait constituer un problème, ce n'était pas agréable pour plusieurs personnes, mais ce n'était pas le chaos avéré qui avait été vendu par les dirigeants du RTC.

Et, pour démontrer que cette loi est complètement inutile et que la loi des services essentiels fonctionnait, dans un autre dossier de transport collectif, celui de la STM, pas plus tard que la semaine dernière, le jour même où on faisait l'interpellation de ministres, donc vendredi dernier, jugement du TAT où, là, il décide que, dans le cas de la STM, sous des représentations différentes, j'imagine, un plaidoyer différent, bien, il n'y avait pas lieu d'être d'avoir la grève comme ils l'avaient convoquée au départ. Le syndicat a dû changer ses plans au niveau de la STM par rapport à la grève qui était souhaitée à l'origine. Mais la loi fonctionne, alors. Selon ce qui est plaidé des deux parties, le TAT peut, oui ou non, élargir la portée des services essentiels. Pourquoi donc venir inventer une nouvelle patente du ministre, puis là faire entrer le concept du bien-être de la population? Qu'est-ce que c'est que ça, le bien-être de la population? On a eu à essayer d'aller chercher la substantifique moelle de ces concepts-là auprès du ministre. Je n'ai pas été particulièrement impressionné par la démonstration pendant l'étude détaillée, Mme la Présidente.

La... de la population, après ça, ça se détaillait en deux, trois exemples. Ça disait : Pour la sécurité économique, sociale et environnementale. Là, on a commencé à creuser. Qu'est-ce que ça veut dire, ça, la sécurité sociale? Qui qui est inclus là-dedans? Qui qui n'est pas inclus là-dedans? C'était très, très flou, Mme la Présidente. C'était encore pire pour la sécurité économique. Qu'est-ce qui n'est pas de la sécurité économique? Donnez-moi des exemples. J'ai mis au défi le ministre de me donner des exemples. J'ai même été chercher, dans le site de la... du ministère du Travail, tous les conflits de travail en cours. On peut aller voir ça, hein, c'est public. Vous allez sur le site Internet, vous voyez toute la liste des conflits en cours, peu importent les régions, les types, etc. J'ai voulu dire au ministre : Est-ce qu'un de ceux-là... je les ai tous nommés. Qu'est-ce qui constitue ou pas de la sécurité économique? Évidemment, le ministre n'a pas voulu se prononcer.

Alors, on est dans le flou total. Bonne chance, bonne chance à nos collègues du TAT pour essayer de comprendre la fameuse intention du législateur. Bonne chance. Le ministre ne nous donne à peu près aucun outil.

Puis là la sécurité environnementale, bien, ça, c'était, à la limite, un peu loufoque, Mme la Présidente. Je ne comprends même pas pourquoi ça a été évoqué par le ministre. D'ailleurs, si la CAQ s'intéressait à l'environnement, ça se saurait. Ce n'est pas ce qu'on a vu dans le dossier Stablex, par exemple, ou dans plein d'autres dossiers. Fin de la parenthèse. La sécurité environnementale, tout à coup, ça intéressait le gouvernement puis ça a été introduit dans la loi, tout bonnement. Je pense que c'était un peu pour essayer d'attirer notre sympathie, à Québec solidaire, pour qu'on s'émeuve, de l'autre côté de la Chambre, que nous ne soyons pas d'accord avec le projet de loi parce qu'ils veulent protéger la sécurité environnementale. On s'en occupe très bien, de l'environnement, Mme la Présidente, on n'a pas besoin de descendre de la CAQ à ce niveau-là.

Donc, ce mécanisme-là, le ministre l'a mis en place, mais il s'expose à une drôle de situation, parce que, pour que ça s'active, là, pour que le tribunal du travail décide de voir si, oui ou non, dans tel ou tel cas, en fonction de ces trois critères, là, sécurité économique, sociale et environnementale, il a le droit, le TAT, d'imposer un certain nombre de... un certain pourcentage de maintien au travail des travailleurs, pour pouvoir faire ça, le tout début de l'exercice, c'est une décision politique du Conseil des ministres, par décret, qui va désigner un groupe en conflit.

Donc, le Conseil des ministres, sur recommandation du ministre, va dire : Nous désignons tel conflit de travail qui pourrait être dorénavant assujetti aux services essentiels déguisés, là, c'est-à-dire les trucs de bien-être que le ministre a inventés. Bien, c'est un geste politique important, ça. C'est très éditorial. Ce n'est pas neutre, de désigner tel ou tel conflit. Et surtout qu'est-ce que ça va faire? Ça va générer une pression complètement indue sur le gouvernement, ses ministres et ses députés dans chacune des régions, en particulier dans les régions concernées par un conflit de travail.

Qu'est-ce que vous pensez qu'il va arriver si on reprend, par exemple, le conflit qui avait lieu dans les traversiers, dans le bas du fleuve puis sur la Côte-Nord? Bien, quelle surprise, vous pensez? Les chambres de commerce vont commencer à appeler les ministres puis les députés, les commerces du coin, les éditoriaux, ça va faire des lignes ouvertes, il va y avoir des courriels au bureau du député. Les gens vont dire : Bien là, il faut que ce soit un service essentiel. Toute l'ironie de la chose, Mme la Présidente, moi, j'appelle ça les services essentiels déguisés, c'est ce que c'est, le ministre a fait très attention de ne pas se tromper pendant l'étude détaillée, il sait que ça pourrait le nuire dans la contestation judiciaire à venir, mais beaucoup de groupes patronaux qui sont venus appuyer le projet de loi utilisaient eux-mêmes le concept de services essentiels pour désigner le contenu du projet de loi, même si le ministre, lui, faisait extrêmement attention de ne pas mélanger les deux, bien sûr que c'était la même chose.

Donc, la pression qui va s'ouvrir... qui va s'ouvrir de la part de tout ce qui va grenouiller d'intérêt économique dans une région donnée, dans le cas d'un conflit de travail, va mettre la... va mettre une forme de lobbyisme extrême sur le dos du ministre puis de ses députés, peu importe la couleur du gouvernement qui aura à gérer ça dans le futur, d'ailleurs. Un gouvernement solidaire aurait la même pression, un gouvernement libéral aurait la même pression. Mais de volontairement décider de se mettre dans ce cas-là de lobbyisme de la part d'intérêts économiques particuliers, c'est spécial, Mme la Présidente. Je n'ai pas vu ça souvent. On aime ça compliqué du côté de la CAQ. On aime ça compliqué.

Parce qu'une fois qu'on a désigné un groupe, bien là il faut qu'un des deux partis souhaite être assujetti par le TAT. Le ministre présentait ça comme : Ah! chacune des deux parties pourra être assujettie, si elle le désire. Voyons donc! 99 % du temps, ça va être la partie patronale qui va vouloir être assujettie. Dans quel univers pense-t-il, le ministre, qu'un syndicat... que les travailleurs ont intérêt à aller solliciter de ne pas pouvoir faire la grève en fonction des soi-disant intérêts du bien-être de la population? Ça n'a aucun rapport. Qu'il l'assume, qu'il le dise, c'est fait pour les patrons, ce projet de loi là, cette mesure-là en particulier. Faites-moi pas accroire que, oui, oui, les deux parties pourront y avoir recours. Voyons! Dans quel univers il vit? C'est comme s'il pensait qu'on ne connaissait pas ça, le droit du travail. Bien, ça adonne mal, j'en ai fait autant que lui, du droit du travail, puis des affaires de même, je n'en laisse pas passer.

Ça fait que ça, c'est le premier mécanisme, Mme la Présidente, qui vise objectivement à limiter le droit de grève au Québec. Ça va être contesté juridiquement en fonction de la charte québécoise des droits et libertés. Je pense que ça ne respecte pas le droit d'association duquel découle le droit de grève. Et les chances sont bonnes que ça se fasse démonter en Cour suprême. Malheureusement, ça va prendre probablement une dizaine d'années, ces dossiers-là, à monter jusqu'en Cour suprême. Mais, dans 10 ans, si je suis encore de ce monde, et que le ministre aussi l'est, et que c'est moi qui ai raison, je l'appellerai, le ministre Travail, pour lui dire : Je t'avais dit, Jean, que c'est moi qui avais raison. Vous me permettez de l'exagération du «Jean» cette fois-ci. Il ne sera plus ministre rendu là. Je ne serai certainement plus député, moi non plus. On verra bien.

• (15 h 50) •

L'autre mécanisme, Mme la Présidente, deuxième mécanisme, si le conflit dégénère ou prend du temps sur le moyen, long terme, au-delà de la limitation du droit de grève du conflit, le ministre se donne le pouvoir de cesser le conflit, d'arrêter le conflit frette, net, sec. Il décide de dire : Ce conflit-là, je l'arrête et je décrète que tout ça se ramasse en arbitrage exécutoire.

Ce pouvoir-là, Mme la Présidente, il est dangereux, je pense. Le premier, on limite le droit de grève, je ne suis pas d'accord, je trouve, c'est un recul, ça se conteste. Le deuxième, il est arbitraire. J'ai même dit, et je le soutiens, que je le trouve autoritaire. La grève, là, c'est déclenché démocratiquement par des membres ou un lock-out, c'est décidé par un conseil d'administration. Que le ministre décide d'intervenir puis de dire : Je décrète la fin de ce conflit de travail, moi, tout seul de mon côté, et que tout ça va se terminer par un arbitrage automatique exécutoire, on est dans le déni, là, du droit de grève. On n'est pas dans la modélisation de la... On est dans le déni pur et simple du droit de grève.

Puis c'est tellement une mauvaise idée, Mme la Présidente, que les organisations patronales qui sont venues étaient unanimes sur le premier mécanisme, mais il y en avait une couple qui étaient un peu gênées sur le deuxième mécanisme, qui trouvaient... ils trouvaient que ça allait trop loin. Et je veux saluer l'Ordre des conseillers en ressources humaines, qui ne sont pas les possédants, hein, c'est des gens qui sont dans la gestion, bien sûr, mais c'est souvent les cadres, les cadres intermédiaires, ceux qui gèrent les ressources humaines, qui ont évidemment... qui sont... qui travaillent pour des patrons, eux autres aussi, qui sont dans... qui ne sont pas des travailleurs, évidemment, syndiqués la plupart du temps, mais qui sont un peu à mi-chemin, hein, qui ont un pied dans le monde du travail, un pied dans le monde patronal. Eux, ils ont dit que ce deuxième mécanisme-là était un véritable problème et qu'il devait être retiré du projet de loi, l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, que je salue.

Ça me permet de dire, d'ailleurs, par rapport aux mémoires, et ça, ça m'a irrité tout le long... Puis il l'a redit tantôt encore, le ministre, il dit : Mon projet de loi est équilibré. Bien, voyons donc! Si vous avez 100 % des organisations patronales qui viennent dire : Oui, quelle excellente idée et 100 % des organisations de travailleurs qui viennent dire : Mais quel immense recul démocratique, il est où, l'équilibre? Il n'y en a pas, d'équilibre. C'est au contraire une démonstration d'un déséquilibre. Qu'il ne vienne pas me dire que c'est un équilibre quand tout le monde est d'accord d'un bord puis que tout le monde est contre de l'autre bord. Si tout le monde était contre, on viendrait dire : J'ai réussi à équilibrer tout le monde, et tout le monde est plus ou moins content et mécontent, oui, O.K., ça se plaide. Mais là tout le monde est pour, tout le monde est contre. Il n'y en a pas, d'équilibre, c'est comme du novlangue. C'est assez hallucinant d'entendre ça, Mme la Présidente.

Donc, décret du ministre. Puis là, contrairement au premier mécanisme, le deuxième mécanisme, lui, on ne passe pas par le Conseil des ministres, c'est, un bon matin, le ministre se lève, prend son café, puis, voilà, il envoie un beau courriel aux patrons puis aux syndicats d'un conflit x, puis il dit : C'est terminé, j'ai décidé moi-même, dans mon bureau, que c'est la fin de votre conflit de travail, et que, voilà, on envoie ça à un arbitre, puis que c'est lui qui va décréter le contenu de votre convention collective.

Bien, l'arbitrage automatique, Mme la Présidente, ça existe dans le Code du travail dans une seule occasion. Savez-vous c'est où? C'est intéressant, d'ailleurs, ce n'est pas utilisé souvent, mais, dans le Code du travail, pour contrer une fâcheuse pratique, parfois, d'un patron dans le cadre d'un nouveau syndicat, donc les travailleurs se sont organisés, ils veulent dénoncer des conditions de travail ou des pratiques patronales, se créent un syndicat. Malheureusement, je l'ai déjà vécu, moi, personnellement, un patron peut décider de mettre la pédale sur le frein, en français, en bon français, qui veut quoi, on dit «stâler» un peu, donc ralentir volontairement le processus. Bien, pour éviter que ce soit tellement long, puis tellement long, puis tellement long, puis qu'à un moment donné même les travailleurs se tannent, puis qu'il y ait une requête désaccréditation, ce qui est l'objectif du ralentissement allégué, bien, on peut permettre à l'association syndicale de demander un arbitrage automatique de première convention collective. On ne peut pas refaire ça par la suite. C'est seulement pour la première convention collective.

Puis ça marche assez bien. Quand il y a malheureusement des patrons qui peuvent être parfois de mauvaise foi, une minorité, hein, soyons clairs, veulent faire ce ralentissement, bien, ils se font servir cette médecine-là, puis souvent, bien, l'arbitre, il va regarder à peu près les salaires dans le domaine, les conditions de travail dans le domaine, il va couper la poire en deux, puis, voilà, il y a une première convention, puis le syndicat peut commencer à travailler. Bien, c'est très bien comme ça. C'est une bonne disposition du Code du travail du Québec, dont on doit être fier, qui est utilisée de temps en temps puis qui est bien utilisée.

Mais un arbitrage automatique de convention collective, Mme la Présidente, je viens juste de vous l'expliquer, l'arbitre, là, il va entendre un peu les deux parties, ils vont plaider qu'est-ce qui devrait être le contenu de la convention, puis il va trancher en deux, souvent. Un salaire... O.K. Quel salaire vous voulez revendiquer? Patron, quel salaire vous offrez? Oui, O.K., l'industrie, c'est à peu près là. O.K.

Bien, des avancées sociales, du rattrapage salarial, ça ne se gagne pas avec des arbitrages. L'arbitrage vise justement à mettre quelque chose qui n'est gênant ni pour l'un ni pour l'autre. Mais, quand vous avez des conventions collectives avec des retards de plusieurs dollars de l'heure, comme celle, par exemple, des éducatrices en CPE, comme celle qui avait lieu pour les professeurs du réseau public il y a quelques mois, quelques années maintenant, de tout dire qu'on va référer ça à l'arbitrage automatique, c'est une garantie que le conflit ne va pas se régler puis il va juste être décalé d'une couple d'années. Parce que, s'il y a des frustrations intrinsèques dans le réseau x ou y ou dans une entreprise X ou Y puis que le conflit de travail ne les résout pas, vous faites juste pelleter en avant. Ça fait que ce qui était un conflit qui pouvait être nuisible à l'année 1, puis vous imposez un arbitrage automatique et exécutoire, bien, quelle surprise, à l'année 2, 3, il va être encore dommageable, le conflit, puis il va repartir parce qu'il n'aura pas été réglé. Le vrai règlement d'un conflit, c'est une entente négociée et signée, ce n'est pas un arbitrage automatique.

Ça fait que, que le ministre se donne le pouvoir similaire à ce qui a été fait au fédéral de dire : J'impose la fin d'un conflit de travail, c'est terrible, c'est terrible. C'est un énorme recul. On l'a dénoncé dès que ça a été déposé. On l'a dénoncé pendant le projet de loi. Il y a des belles mobilisations de travailleurs, travailleuses contre ce projet de loi là. Je pense que le gouvernement va perdre devant les tribunaux quand ça va être contesté puis que ça va monter jusqu'en Cour suprême, on s'en reparlera dans 10 ans, mais je ne vois pas comment il peut maintenir sérieusement qu'il respecte la Charte des droits et libertés, le droit d'association avec le projet de loi n° 89.

La seule petite victoire qu'on a réussi à lui arracher, que j'ai réussi à lui arracher, au ministre, c'est le délai d'application. Au début en cette Chambre, d'ailleurs, je plaidais qu'il était apparent que le gouvernement déposait ce projet de loi là pour mettre une pression sur les travailleuses du réseau des CPE, éducatrices, service d'alimentation, et tous les autres travailleurs et travailleuses qui étaient en grève, hein? C'étaient des grèves de deux ou trois journées à ce moment-là, mais tout indiquait que ça allait potentiellement se ramasser en grève générale illimitée. Pour l'instant, on semble avoir évité ça. Puis il y a eu une entente de principe qui a été négociée il y a quelques semaines. C'était une bonne nouvelle. J'avais réussi à faire dire au ministre, assez tôt en étude détaillée, qu'il s'engage à ce que ça ne s'applique pas aux travailleuses du service de garde, des CPE. Il avait dit oui. On allait faire un amendement à la disposition finale du projet de loi, l'article 11, si ma mémoire est bonne. Entretemps, donc, il y a eu une longue pause, là, il y a les études de crédits, il y a eu la semaine de circo, et là il y a eu le règlement pour le secteur des CPE. Bon, bonne nouvelle.

Mais je suis revenu à la charge, j'ai dit... Bien, l'argument que j'ai servi au ministre pour qu'il accepte que ça ne s'applique pas aux CPE, c'était quoi? Bien, j'ai pris sa propre médecine puis je l'ai revirée à l'envers. C'était assez amusant, je dois vous avouer, Mme la Présidente, parce que, dans un projet de loi précédent, celui de la construction, qu'on a voté ici il y a à peu près un an et des poussières, le ministre du Travail avait finalement donné raison à une de mes revendications et, bien, essentiellement, évidemment, celle du milieu de la construction d'avoir la possibilité de négocier de la rétroactivité salariale.

Les travailleurs et travailleuses de la construction étaient le seul secteur au Québec au grand complet dont on interdisait, dans la loi, la possibilité de négocier de la rétroactivité salariale. Ça n'avait juste complètement pas rapport, c'était un déni de droit assez majeur. Enfin, le ministre a décidé de le mettre dans la loi en toute fin de parcours, c'était une bonne nouvelle, mais il a mis une disposition, dans son projet de loi sur la construction, pour dire que ça n'allait pas s'appliquer à la présente négo, même si la négo, là, elle avait à peine commencé, en disant : Bien non, bien non, on ne peut pas changer le cadre, la négo a commencé, ce n'est pas juste. Je n'étais pas content à ce moment-là, bien sûr. Mais j'ai resservi son argument. J'ai dit : Bien là, M. le ministre, au moment où on se parle, là, il y a des centaines d'accréditations au Québec, tous secteurs confondus, qui négocient, qui négocient leurs conventions collectives en ce moment. Ça fait que vous, vous ne vouliez pas changer le cadre de négo pour la construction, ça se plaide, mais là vous allez être cohérent, par exemple, vous ne changerez pas le cadre de négo pour les centaines d'accréditations dans le public, dans le péripublic, dans le privé qui sont en train de négocier en ce moment. Woups! Là, il était un peu coincé. Je vais plaider que, là-dessus, il a été cohérent avec lui-même, il a accepté de déposer un amendement pour que ce soit un délai de six mois d'application de la loi.

Donc, ce qu'on va voter vraisemblablement demain ou après-demain ne sera pas applicable, les deux mécanismes ne seront pas utilisables par le ministre avant six mois. Ça nous amène à peu près jusqu'en octobre, si mon calcul est bon. Bien, ça va permettre au moins aux centaines d'accréditations qui sont en ce moment en négo d'à peu près terminer leur négo, idéalement, six mois, c'est quand même un délai relativement raisonnable pour terminer une négo et ne pas avoir cette épée de Damoclès là qu'en tout temps le ministre pourrait soit limiter leur droit de grève ou imposer la fin de leur grève avec un arbitrage obligatoire et exécutif.

• (16 heures) •

Donc, un triste projet de loi, Mme la Présidente, un immense recul en droit du travail, un projet de loi inutile, basé sur des fausses prémisses, qui cadre, je trouve, dans un état des faits où le ministre, le premier ministre aussi, cherchent querelle, on dirait, avec le milieu syndical, avec les travailleurs et travailleuses.

Même aujourd'hui, à la période de questions, le premier ministre se plaignait que mon collègue de Rosemont, hier, et moi, on est allés sur des soi-disant lignes de piquetage avec les médecins. Quel délire! On était dans une clinique à réclamer que le projet de loi n° 106 soit retiré. On n'était pas dans une ligne de piquetage. De toute façon, les médecins, ça ne fait pas ça, des lignes de piquetage.

Alors, l'espèce d'offensive antisyndicale, est-ce que c'est la montée du Parti conservateur qui pousse le gouvernement à retourner dans ces espèces de lignes, là, dignes de l'ancienne ADQ? C'est peut-être ça. C'est le contexte. Moi, c'est comme ça que je me l'explique, parce que ce n'était pas tout à fait le ton qu'on avait il y a quelques mois, même, ou quelques années avec la CAQ, mais là on y retourne puis on s'assume bien. Pendant l'étude de... l'interpellation du ministre, vendredi dernier, on a eu le droit à une charge profondément antisyndicale de la députée de Vimont contre les profs et la Fédération autonome de l'enseignement qui avaient fait une grève, que je qualifie d'héroïque, il y a quelques mois maintenant. Un discours impressionnant, un discours impressionnant. On les a traités de bras armés politiques. Là, c'était assez... un cinq minutes assez spécial. Ça a sourcillé pas mal, incluant le ministre, d'ailleurs, à ce niveau-là, mais passons.

Donc, tout ça pour dire, Mme la Présidente, que c'est un dangereux projet de loi. Je suis triste qu'on ait eu à assister à cette loi-là. Moi aussi, je souhaite, à la limite, comme mes collègues de l'opposition officielle, qu'il ne soit jamais appliqué, mais il y avait, je terminerai là-dessus, une image très forte dans un des mémoires des différents experts universitaires qui nous ont communiqué leurs réflexions. Ils utilisaient la parabole du... ils appellent ça le fusil de Tchékhov, l'auteur de théâtre russe, bien sûr, le dramaturge russe, qui disait la chose suivante — j'imagine qu'il parlait à des gens qui voulaient peut-être potentiellement écrire du théâtre — il disait : Si, dans votre pièce de théâtre, assez tôt dans la pièce, on fait référence, on dit explicitement qu'il y a une arme d'accrocher sur le mur, bien, vous devez utiliser cette arme-là, d'un point de vue scénaristique, plus tard dans votre théâtre. Sinon, ça ne servait à rien d'y faire référence. Donc, c'est comme un principe de base, mais les experts en droit du travail nous disaient : Si le ministre est en train de conclure... de se créer deux armes d'intervention législative importantes, c'est parce qu'il a l'intention de les utiliser, sinon il ne les... il ne serait pas en train de les créer. Alors, je souhaite que ce ne soit pas le cas, je souhaite qu'il ne l'utilise jamais.

Malheureusement, c'est des outils qui existent, maintenant, ce sont d'importants reculs en droit du travail. Je suis fier d'avoir contribué au moins à ce que ce soit un délai d'application de six mois, fier d'avoir fait le travail, d'avoir fait le relais pour les travailleurs, travailleuses du Québec ici, au salon rouge, en étude détaillée, pour démontrer les arguments peut-être un peu moins fondés du ministre et de faire en sorte que la voix des travailleurs, travailleuses soit entendue à l'Assemblée nationale. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci beaucoup, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de loi n° 89?

Mise aux voix du rapport

Donc, comme il n'y en a pas d'autre, le rapport de la Commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 89, Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out, est-il adopté?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.

Donc, M. le leader adjoint, je vous cède la parole. Vous avez une demande à nous faire.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous demande le consentement pour modifier l'avis des commissions.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, est-ce qu'il y a un consentement? Consentement. Vous pouvez y aller, monsieur...

Avis touchant les travaux des commissions (suite)

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et donc l'avis est modifié ainsi : La Commission de la santé et des services sociaux va poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 106, la Loi visant principalement à instaurer la responsabilité collective et l'imputabilité des médecins quant à l'amélioration de l'accès aux services médicaux, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 40 et de 18 h 40 à 21 h 05, à la salle Pauline-Marois.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Donc, nous allons poursuivre. M. le ministre... Bien, oui, vous pouvez nous... j'y allais, là, comme ça, mais vous pouvez appeler l'article au feuilleton.

M. Lévesque (Chapleau) : Bien, oui, merci beaucoup, Mme la Présidente, mais j'aurais pu vous laisser aller, on allait dans la même direction, vous et moi. Et je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 18 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 84

Adoption

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Il n'y avait pas beaucoup de directions, donc on ne pouvait pas se tromper vraiment. Alors, M. le ministre de la Langue française propose l'adoption du projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration de la nation québécoise. Je vous cède la parole, M. le ministre.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis fébrile. Je suis très fier d'avoir porté à travers toutes ses étapes le projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration à la nation québécoise, parce que, comme toute nation, le Québec se devait de se doter de son véritable modèle d'intégration. Donc, désormais, notre modèle se nommera «intégration nationale».

À partir de demain, après le vote des parlementaires, si la loi est adoptée, mais j'ai confiance, ce modèle existera enfin. Et il était temps, Mme la Présidente, parce qu'après plus de 50 ans nous mettons enfin un terme au règne du modèle canadien du multiculturalisme sur le territoire québécois. C'est un modèle qui a divisé, malheureusement, les citoyens selon leurs origines, c'est un modèle qui a nui à l'intégration des gens qui arrivent ici, qui veulent prendre racine, qui veulent devenir Québécois, mais, malheureusement, le multiculturalisme canadien a envoyé des signaux contradictoires, des signaux qui sont nuisibles, carrément, à la cohésion sociale. Et donc le multiculturalisme retournera là où il aurait dû rester, c'est-à-dire dans les limbes de l'histoire.

Mme la Présidente, notre Loi sur l'intégration à la nation québécoise est donc une loi fondamentale qui renforce la cohésion sociale, qui enrichit fortement le corpus législatif québécois et qui donne enfin des directions claires, nécessaires aux institutions de notre société pour mieux intégrer les nouveaux Québécois. Et, quand je pense à nos institutions, je pense, bien sûr, à nos écoles, nos cégeps, nos universités, l'ensemble des ministères, l'ensemble des organismes gouvernementaux, les municipalités et aussi les organismes communautaires qui jouent un rôle très important dans l'accueil, dans la francisation, dans l'intégration des nouveaux arrivants. Mais il faut s'assurer de multiplier les liens et les interactions entre les gens qui s'identifient à la majorité francophone, ceux qui s'identifient à une communauté culturelle minoritaire et les nouveaux arrivants. Il faut le faire, oui, dans une perspective interculturelle, mais il faut bien le dire très clairement, l'intégration nationale va au-delà de l'interculturalisme en amenant les gens à s'intégrer à la nation, en amenant les gens à adhérer mais aussi à contribuer à notre culture québécoise, notre culture commune. C'est une loi, donc, essentielle pour que tous puissent adhérer et contribuer au vivre-ensemble québécois, notre loi essentielle, fondamentale, qui, pour la première fois de notre histoire, définit qui nous sommes et comment nous voulons continuer d'évoluer comme société.

Enfin, avec cette loi, nous nous donnons un contrat social clair, un contrat social rassembleur qui unit tous les Québécois, peu importe leurs origines. Et, quand on parle d'accueillir les gens, d'unir les gens dans une perspective d'ouverture purement québécoise, bien, je vais citer le grand Gilles Vigneault, qui a dit... qui a chanté, plutôt :

«De ce grand pays solitaire

Je crie, avant que de me taire,

À tous les hommes de la terre :

"Ma maison, c'est votre maison!"

«Entre ses quatre murs de glace,

Je mets mon temps et mon espace

À préparer le feu, la place,

Pour les humains de l'horizon,

Et les humains sont de ma race.»

Il y a là un message très clair d'ouverture, un message très clair d'accueil, mais, en même temps, quand on dit : «Je prépare le feu, la place», ça veut dire que les gens arrivent dans un lieu qui est habité. Nous ne sommes pas un état postnational comme en rêvait le précédent premier ministre canadien Justin Trudeau, nous sommes une nation forte et fière, nous qui avons bâti un Québec accueillant, mais un Québec qui existe et qui veut défendre son identité.

Donc, le projet de loi table sur des valeurs qui nous unissent, par exemple comme la démocratie, l'égalité entre les hommes et les femmes, la laïcité de l'État, des valeurs qui forment d'une certaine manière le socle de notre société, des valeurs qui doivent s'incarner dans toutes les sphères de notre nation et qui s'enracinent dans notre histoire et sur notre territoire. Parce que, oui, nous avons une identité qui nous est propre. Et je vais citer René Lévesque, qui a dit, à l'égard de ce territoire qui nous donne une partie de notre essence, il a dit : «Nous sommes des Québécois. Ce que cela veut dire d'abord et avant tout, et au besoin exclusivement, c'est que nous sommes attachés à ce seul coin du monde où nous puissions être pleinement nous-mêmes, ce Québec qui, nous le sentons bien, est le seul endroit où il nous soit possible d'être vraiment chez nous.» Voilà ce qu'a dit René Lévesque.

Eh oui, il ne faut pas s'en excuser. Nous sommes Québécois ici, chez nous. Et les Québécois qui font le choix de venir vivre ici doivent s'intégrer, doivent adhérer à la culture commune, à nos valeurs, mais sont appelés à y contribuer aussi. Et ça, cette dyade de mots, de ces deux concepts, adhésion mais aussi contribution, amène, je pense, un équilibre très important dans un projet de loi où la réciprocité entre la société d'accueil, l'État et les nouveaux arrivants est extrêmement importante. Nous avons tous un rôle à jouer.

• (16 h 10) •

Avec cette loi, le Québec affirme qu'il est une nation qui s'affirme fièrement à travers notre langue officielle et commune, le français. Et parlons-en, du français. C'est la langue qui est à la base de notre identité. C'est avec laquelle... c'est avec elle que nous aimons, que nous créons, que nous rêvons depuis plus de 400 ans ici, en Amérique. C'est une langue qui a résisté à bien des épreuves, à bien des embûches, qui s'exprime aujourd'hui avec tous les accents du monde et, disons-le, ils sont magnifiques, les accents du monde qui s'expriment ici, au Québec, en français. C'est pourquoi cette loi sur l'intégration à la nation québécoise invite tous les Québécois à se rassembler autour de la langue, oui, de Gilles Vigneault et de Michel Tremblay, mais aussi celle de Kim Thúy et de Boucar Diouf, qui la font entendre de très belle manière.

Cette loi va s'insérer dans la lignée de lois fondamentales comme la Loi sur la laïcité de l'État, la Charte de la langue française, en statuant une fois pour toutes que le Québec, oui, est une société d'accueil, mais elle est laïque et elle est francophone.

J'ai très hâte de travailler sur la suite des choses avec mes collègues ministres de tous les ministères, de travailler à l'élaboration d'une politique gouvernementale qui facilitera la mise en oeuvre de l'intégration nationale et donc la cohérence gouvernementale qui pourra s'incarner dans chacun des gestes des organismes, des ministères, des écoles, des organismes communautaires, comme je l'ai mentionné tout à l'heure.

Comme nation, nous avions besoin de cet outil fondamental pour nous affirmer, pour nous épanouir à long terme. Nous nous sommes fait ce cadeau. Nous en avions besoin pour envisager l'avenir avec force et cohésion. Reste maintenant à la faire vivre et à tendre la main aux gens qui choisissent de devenir des Québécois comme nous. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je suis prête à entendre un autre intervenant. M. le député de l'Acadie, à vous la parole.

M. André Albert Morin

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureux de prendre la parole cet après-midi dans le cadre de l'étape finale, finalement, l'adoption du projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration à la nation québécoise, ce nouveau titre qui a été modifié lors des travaux parlementaires, un projet de loi important.

Et j'écoutais attentivement M. le ministre qui nous disait, et, au fond, il en a parlé également en commission parlementaire, que son projet de loi, son modèle, son modèle d'intégration nationale va même au-delà de l'interculturalisme. Et il le mentionnait tout à l'heure, il nous parlait finalement du modèle du multiculturalisme, qui n'est pas un modèle québécois. Et, là-dessus, M. le ministre et moi, nous sommes d'accord. Je l'ai dit, d'ailleurs, en commission parlementaire. En fait, l'interculturalisme, pour ma formation politique, pour le Parti libéral du Québec, ce n'est pas un concept qui est nouveau. Et je l'ai mentionné précédemment, Robert Bourassa en parlait. Il estimait que ce modèle était plus approprié pour le Québec que le multiculturalisme.

Je rappelle également dans l'histoire de ma formation politique que, plus récemment, M. Couillard, premier ministre, avait fait en sorte qu'une politique sur l'interculturalisme soit adoptée. Et, à l'époque, c'est Mme Kathleen Weil qui avait travaillé à l'élaboration de cette politique. Le processus ne s'est pas rendu jusqu'à un projet de loi. Donc, dans ce sens, il s'agit là ici, aujourd'hui, d'une étape supplémentaire, mais on avait quand même jeté les bases très clairement de ce que devait être le modèle du vivre-ensemble au Québec, et on parlait à ce moment-là d'interculturalisme.

Donc, c'est avec cette philosophie qu'on a entamé les travaux et qu'on a aussi écouté les groupes qui sont venus nous parler en commission parlementaire lors des consultations particulières. Et donc, au fur et à mesure qu'on a fait l'étude détaillée du projet de loi, il y a certains éléments, certaines modifications que j'ai soumises à la partie gouvernementale. Certaines ont été adoptées, d'autres refusées. Mais permettez-moi de souligner quelques ajouts qui ont été adoptés par M. le ministre et le gouvernement.

Plusieurs groupes sont venus nous dire qu'il était important, dans le cadre de ce projet de loi, de faire référence au vivre-ensemble. Parce qu'au fond, ma compréhension de la volonté du gouvernement, c'est de mettre en place des éléments qui vont faire en sorte que les gens qui sont sur le territoire du Québec vont être capables de mieux vivre ensemble et que nous pourrons, à ce moment-là, partager une culture commune. Cet amendement-là, qui a été proposé par le Parti libéral du Québec, a été adopté.

On a également regardé et puis on a modifié le terme «ethnoculturel» par «culturel». On trouvait que c'était plus approprié dans les circonstances. Ça a été également adopté par le gouvernement.

Et j'ai rappelé également à M. le ministre que, dans la politique qu'avait développée Mme Weil, et d'ailleurs il y a des groupes en consultations particulières qui nous en ont parlé, il y a deux éléments qui sont importants si on veut véritablement réussir à avoir un vivre ensemble, donc permettre aux gens qui arrivent ici ou qui vivent ici, parce que, rappelons-le, ce projet de loi ne vise pas que les immigrants ou les nouveaux arrivants, mais l'ensemble des communautés qui vivent sur le territoire québécois, donc c'était important d'y ajouter un élément économique, parce qu'une fois qu'un nouvel arrivant, par exemple, apprend la langue, notre langue commune, le français, bien, il est normal que cette personne-là veuille travailler. Donc, si on veut véritablement parler d'intégration, il faut parler aussi d'un élément socioéconomique, ce qui nous a été dit par plusieurs groupes lors des consultations particulières.

Et l'autre élément, c'était aussi la lutte contre la discrimination et le racisme. Le gouvernement nous est revenu pour la modification à la lutte contre le racisme et la discrimination avec un élément, compromis proposé par le gouvernement, où on a adopté le concept, et ça a été adopté lors de l'étude détaillée. Donc, certains éléments comme ça qui ont permis une bonification du projet de loi à différentes reprises.

Sauf qu'il y a des éléments dans le projet de loi où plusieurs groupes sont venus nous dire que, là, il fallait que le gouvernement fasse attention, que certaines dispositions du projet de loi pouvaient porter finalement ombrage à la Charte des droits et libertés de la personne, notre charte québécoise, qui est notre loi des lois. Et je fais référence particulièrement aux articles 18 et suivants de la charte québécoise. Et, permettez-moi, permettez-moi de faire référence, dans quelques minutes, à un mémoire qui nous a été déposé par la commission des droits et libertés de la personne.

En fait, avec son projet de loi, le gouvernement veut apporter une modification de l'article 9.1 de la charte québécoise. L'article 9.1 de la charte, s'il est amendé, et c'est ce que propose le gouvernement dans le projet de loi, va faire en sorte que, quand on traite des différents concepts qui doivent être utilisés, notamment par la commission ou les tribunaux, pour interpréter les droits qui sont énoncés dans la charte, il doit tenir compte de certains concepts, dont notamment le modèle d'intégration nationale, qui est distinct du modèle québécois ou, en fait, du modèle du multiculturalisme canadien. Et donc, ça fait en sorte que 9.1 de la charte québécoise est une espèce d'article qui permet de pondérer l'effet des droits, et donc dorénavant, lorsque ce sera adopté, un organisme ou un tribunal qui aurait à interpréter la charte devra tenir compte, dans l'évaluation d'une violation au droit, par exemple, de l'impact du modèle d'intégration national québécois. Et donc, ce que ça vient faire, au fond, c'est que ça vient faire en sorte que les droits collectifs sont considérés d'une façon particulière. D'ailleurs, le ministre a fait rajouter, dans un des considérants, dans le préambule du projet de loi, parce qu'il y a un long préambule, un élément où on dit qu'on doit tenir compte particulièrement des droits collectifs. Donc, le modèle d'intégration nationale, qui est distinct du multiculturalisme canadien et qui sera ajouté en 9.1, vient, au fond, concrétiser cela. Et là, ça pose un problème. Et d'ailleurs, c'est ce que nous dit la Commission des droits de la personne qui sont... en fait, qui est l'entité spécialisée dans l'interprétation et l'application de notre charte québécoise.

• (16 h 20) •

On dit, entre autres, que «la proposition de modifier l'article 9.1 apporte d'importants risques pour l'équilibre de la charte — et là je cite la commission — puisque le mécanisme prévu à l'article 9.1 de la charte est au coeur de l'interprétation des libertés et droits de la personne et de la portée qu'on doit leur conférer». La commission rappelle que «l'article 9.1 de la charte inclut deux volets. Le premier, d'abord, d'identifier et de justifier les limitations aux droits et libertés, alors que le deuxième guide l'exercice de cette pondération des droits qui doit avoir lieu en cas de conflit entre ceux-ci». Donc, s'il y a un conflit entre les droits, le tribunal, ou la commission, ou l'organisme devra tenir compte du modèle d'intégration nationale tel que défini par la loi. Donc, 9.1, c'est une disposition fondamentale en ce qui a trait à l'équilibre de la Charte et, à chaque fois que le gouvernement vient y ajouter quelque chose, il y a un risque de débalancement dans cet équilibre, et donc je me dois de le soulever, tout comme la commission l'a fait, et ils l'ont fait d'une façon très explicite, très claire, dans le mémoire qu'ils ont déposé à la commission.

Alors, on dit encore : «Modifier l'article 9.1 comme le propose le projet de loi risque d'amoindrir la protection des droits et libertés que la Charte garantit à chacune et à chacun.» Effectivement, c'est ce que je vous disais précédemment. Et la commission de rajouter que «le risque est d'ailleurs d'autant plus grand que, comme ça a été dit précédemment, le projet de loi laisse place à d'importantes imprécisions quant à la définition du modèle d'intégration qui sera retenu et que les modalités et paramètres seront en grande partie précisés dans le cadre d'une politique gouvernementale et de ses règlements. On viendrait ainsi assujettir ou conditionner les droits garantis par la Charte en vue de modalités qui ne sont pas encore connues.» Et je m'explique. En effet, dans le projet de loi du gouvernement, et je fais référence à l'article 2, 3, mais surtout l'article 5, dans le chapitre II, qui traite du modèle et des fondements, à l'article 5 il y a effectivement des fondements qui sont énoncés. C'est exact. Sauf que ces fondements-là sont évidemment importants, bien sûr, mais ils seront élaborés dans le cadre d'une politique. Et cette politique, on ne la connaît pas. Or, au niveau de la hiérarchisation des normes juridiques, ce que le gouvernement se trouve à faire, c'est de prendre la Charte québécoise, qui est la loi des lois, et de la soumettre en partie à une politique qui n'est pas un texte législatif ni réglementaire, donc qui peut être changée n'importe quand, n'importe comment, mais, pire encore, qu'on ne connaît pas. Là, on peut s'imaginer que la politique va tenir compte des fondements, évidemment, mais elle n'est pas écrite. Et je vais vous reparler aussi de la politique un peu plus tard. Donc, vous comprendrez qu'au niveau de la hiérarchie des normes, il y a là un débalancement en plus, en plus de faire en sorte que, s'il y a un conflit des droits qui sont énoncés dans la Charte, bien on devra tenir compte particulièrement, entre autres, du modèle d'intégration nationale.

Et ce qui est aussi particulier, et ça, je l'avais fait... je l'ai fait remarquer respectueusement à M. le ministre, dans le modèle, on traite d'éléments importants : nos institutions démocratiques, la langue française qui est notre langue commune, sauf qu'il y a déjà de ces éléments-là qui sont déjà inclus à 9.1. Donc, en plus, le modèle répète des concepts qui sont déjà inclus à 9.1. Donc, là, ça devient... ça devient un peu particulier, je vous dirais, au niveau de la rédaction législative. Mais la commission des droits et libertés de la personne n'est pas la seule à avoir mis le gouvernement en garde contre cette façon de procéder. Je fais référence, entre autres, au mémoire de la Ligue des droits et libertés, qui demandait carrément de retirer les articles qui apportaient une modification à la Charte québécoise des droits et libertés.

Permettez-moi également, Mme la Présidente, de citer le mémoire déposé par la CSN, qui faisait aussi état de la problématique que je viens de vous soulever et qui demandait à ce que des articles, en fait, soient éventuellement retirés. Et la CSN nous disait s'inquiéter que le présent gouvernement se permette de proposer des modifications rapides et fréquentes de la Charte des droits et libertés de la personne, ce qui a pour effet évidemment d'amoindrir l'importance de la Charte. C'est comme si ça devenait une loi ordinaire, alors que ce n'est pas le cas : «Il importe de rappeler que l'objectif ultime — et je les cite — de celui à qui on attribue en grande partie la paternité de la Charte», donc le professeur Jacques-Yvan Morin, qui a déjà été ministre et député, notamment dans le cabinet de M. Lévesque, alors, son but était de faire en sorte ou de «faire une charte des droits pleinement constitutionnelle, ce qui signifie qu'elle serait non seulement normativement supérieure aux autres lois, mais aussi qu'elle ne pourrait être modifiée que selon une procédure spéciale.» 30 ans plus tard, M. le Président, on en appelle encore à une protection élargie de la Charte québécoise, avec une procédure de modification renforcée.

Alors, vous comprendrez, le projet de loi n° 84 non seulement ne va pas dans le sens d'une modification renforcée à la Charte québécoise, mais la Charte québécoise est modifiée comme n'importe quelle autre loi de l'Assemblée nationale et, en plus, on la modifie à peu près continuellement, puis, en plus, on demande de tenir compte de ce modèle d'intégration si jamais il y a un conflit entre les droits qui y sont énoncés. Donc là il y a un enjeu. Puis, en plus, on va demander aux décideurs, éventuellement, de tenir compte d'une politique qui n'est pas encore rédigée. Donc, c'est un élément qui suscite beaucoup de questionnements et une forme d'inquiétude.

Dans le même mémoire, on dit que «l'article 9.1 est fondamental dans l'application concrète de la Charte». Et donc, ça, il faut le souligner. «L'article 9.1 est une disposition limitative des droits qui sont énoncés.» Donc, autant d'enjeux qui sont soulevés, entre autres par la CSN, et qui demandaient à ce que ces articles-là qui modifient la Charte québécoise soient retirés, ce qui n'a pas été accepté par le gouvernement malgré, je vous le dirai, malgré un plaidoyer de ma part où j'ai tenté de convaincre M. le ministre que son projet de loi, finalement, son intégration irait mieux s'il ne touchait pas à la charte québécoise des droits et libertés de la personne.

Donc, ça, c'est un enjeu important, un enjeu de taille, mais il y en a un autre. Et je fais référence au chapitre quatre, à l'élaboration de la Politique nationale sur l'intégration à la nation québécoise. Et, dans ce chapitre, on parle qu'éventuellement le ministre va élaborer une politique, mais que cette politique sera élaborée en collaboration avec les ministres concernés puis soumise à l'approbation du gouvernement. Et là, il y aura une politique nationale. Et ça, comme façon de procéder, je trouve ça un peu curieux. En fait, je trouve ça même un peu paradoxal, parce que l'objectif de la loi, c'est de viser l'intégration et, comme je le mentionnais précédemment, de permettre le vivre-ensemble, mais là, au niveau de l'élaboration de la politique, le gouvernement nous dit : Non, non, non, écoutez, nous, là, on le sait, ce qui est bon, on va faire ça entre nous, là, la politique. Bien, pour moi, ce n'est pas une bonne façon. Ce n'est pas une bonne façon de permettre une véritable intégration.

• (16 h 30) •

Il aurait fallu y avoir une consultation beaucoup plus large. Je l'ai souligné au gouvernement. Je l'ai souligné au ministre. Je lui ai tendu la main. Et d'ailleurs, j'ai même rappelé que ça avait été fait dans le passé. Et j'ai même cité en commission tout le document de consultation qui avait été fait à l'époque du gouvernement de M. Couillard et qui avait été distribué, pour en arriver, évidemment, à un consensus social intéressant. Moi, M. le Président, j'étais même prêt, et je l'ai dit au ministre, j'étais même prêt à lui remettre le document au complet et lui dire : Écoutez, la recette est faite, allez-y, ne vous gênez pas, il n'y a pas de copyright là-dessus, on vous invite à le faire, consultez les gens, consultez-le de la façon la plus large possible pour faire en sorte que, quand ce modèle-là va arriver, bien, les gens vont s'y reconnaître, parce que rappelez-vous, rappelez-vous, M. le Président, la loi ne vise pas uniquement les personnes immigrantes qui vont arriver ici, ça vise aussi les différents groupes culturels qui y sont déjà. Donc, si on veut véritablement parler de valeurs québécoises importantes, bien, il faut être capable, évidemment, d'en discuter avec eux, il faut être capable de recueillir leurs observations pour en arriver avec une politique qui va s'appliquer, bien sûr, à une foule de personnes, d'organisations, qui va faire en sorte qu'on va pouvoir rechercher ou obtenir un consensus social. Et je pense que ça, ça aurait été un pas dans la bonne direction.

C'est un pas qui aurait permis, effectivement... D'abord, ça aurait été un exercice, je vous dirais, pédagogique important pour le gouvernement parce que ça aurait permis de mieux faire connaître la loi. Bien sûr, M. le Président, il y a un adage qui dit : Nul n'est censé ignorer la loi, évidemment. Et, dans le cadre de nos débats, je regarde souvent les collègues, on est des passionnés quand on parle ici, au salon rouge, mais, avec respect, je ne suis pas certain que, présentement, à 16 h 36, notre cote d'écoute est à 2, 3 millions de gens qui visionnent nos débats. Dommage, me direz-vous. Dommage, avec tout ce qui se passe ici, mais, quand même, c'est... il faut être réaliste, M. le Président. Donc, donc, il y aurait eu un avantage, M. le Président, à faire connaître cette loi, à faire en sorte qu'on aurait pu consulter plus largement des gens, des groupes, des associations. Ça n'aura pas lieu, ça n'aura pas lieu.

Quand je lis l'article, on dit : «Le ministre élabore, en collaboration avec les ministres concernés, puis soumet à l'approbation du gouvernement une politique nationale sur l'intégration à la nation québécoise et à la culture commune conforme au modèle d'intégration et à ses fondements prévus par la [...] loi.» Eh bien, c'est dommage. C'est dommage. Ça, c'est un repli, c'est un recul de ce qui a été fait précédemment, par des précédents gouvernements qui avaient à coeur l'interculturalisme, disons-le. On ne parle pas ici de multiculturalisme, on parle d'interculturalisme, soyons clairs. Mais, bon, ça n'a pas eu lieu, ça ne s'est pas passé comme ça, et c'est dommage. Enfin, il y aura une politique.

Et, vous savez, vous savez, M. le Président, plusieurs groupes nous ont dit qu'ils souhaitaient une consultation large. Là, ce n'est pas juste moi, là, le député de l'Acadie, après-midi, qui vous dit ça, là. Et je pense et je fais référence à différents mémoires, l'Union des municipalités du Québec, la CSN, le SFPQ... la Ligue des droits et libertés, tous ont demandé à ce qu'il y ait une consultation qui soit plus large. Et donc ça n'arrivera pas. Et le gouvernement de la CAQ, ici, rompt avec une tradition au Québec de tenir des consultations plus larges, plus générales pour l'élaboration d'une telle politique. Donc, c'est un élément qui, je pense, je pense, aurait dû être retenu, mais voilà, ça ne le sera pas. Donc, c'est un enjeu de taille. Et c'est sûr qu'on est fier d'avoir une culture commune, c'est sûr qu'on veut la partager, mais évidemment qui dit partage, il faut être capable d'en discuter puis il faut être capable de consulter les gens à ce sujet-là, M. le Président. Ça, ça n'arrivera pas.

Quelques éléments également que je voulais vous soulever en lien avec le projet de loi et que je veux rappeler... Quand le ministre, tout à l'heure, dans son intervention, parlait que son projet de loi, c'était un contrat, un contrat social, bien, justement, si c'était un contrat social, bien, il faudrait, au moins, que la société en soit au courant puis qu'elle soit consultée. Parce que, permettez-moi de vous rappeler, M. le Président, Jean-Jacques Rousseau, en termes de contrat social, il était quand même pas mal, hein, comme philosophe, il savait de quoi il parlait. Mais le philosophe Rousseau nous affirme, dans son ouvrage Du contrat social, qu'il en va de la souveraineté du peuple. Bien, évidemment, si le peuple est souverain, je comprends que nous, on est des élus, mais il n'y a quand même pas de mal à consulter, à consulter la population, ça permet d'avoir une meilleure adhésion. Rappelez-vous ce que je disais au départ, quand je vous parlais du vivre-ensemble, évidemment, c'est beaucoup plus facile à convaincre les gens quand on se reconnaît dans quelque chose. Quand c'est le gouvernement qui arrive avec une politique puis qui nous dit : Ah! vous savez, moi, je sais ce qui est bon pour vous, et puis ça va être comme ça, peut-être que ça va être un peu plus difficile. Donc, moi, je prends M. le ministre au mot. On parle de contrat social. Bien, allons-y, consultons, consultons, puis en... il faut en discuter avec la population. C'est super, superimportant, superimportant. Et ça, je tiens à le... je tiens à le souligner.

Maintenant, il y a, bien sûr, des éléments importants dans le projet de loi : l'égalité hommes-femmes, la laïcité, la langue française. Mais permettez-moi de rappeler, à ce sujet-là, nous parlons toujours de la laïcité de l'État, l'État est laïque au Québec. Ça, il ne faut pas l'oublier, c'est... et c'est, évidemment, très important. Donc, quand on regarde tout ça, il y a eu un travail qui a été fait par le gouvernement. Il y a une avancée qui a été faite par le gouvernement, mais c'est dommage parce que ça aurait pu être tellement mieux. On aurait pu, évidemment, ne pas modifier la charte québécoise des droits et libertés de la personne et faire en sorte que ce modèle, basé sur l'interculturalisme, évidemment, respecte l'ensemble des droits. Et là ça va être un peu plus difficile, parce qu'il y a toute la pondération de l'article 9.1. Puis, en plus, dans le préambule, il y a un élément qui demande de considérer des droits collectifs, d'une part.

D'autre part, il aurait été facile de consulter les gens. Ça a déjà été fait. D'ailleurs, les groupes l'ont demandé. Et ce qui est dommage... M. le Président, à ce stade-ci, je pense, entre autres, à l'Union des municipalités du Québec, qui nous rappelait comment les villes jouent un rôle important dans l'intégration, entre autres, des nouveaux arrivants, qu'ils ont un contact, les élus municipaux, qu'ils ont un contact souvent direct, rapproché sur une base quotidienne avec les gens de leur communauté, et qu'ils voulaient, et qu'ils voulaient être consultés, qu'ils souhaitaient une consultation plus large. Ça n'arrivera pas. C'est la même chose pour la CSN, pour la SFPQ. Et je pense que le gouvernement, ici, avait une opportunité, une opportunité de développer une vision sociale, une possibilité de partager le vivre-ensemble, mais le gouvernement, le ministre a fait le choix, a fait le choix de ne pas aller là, a fait le choix de vouloir, éventuellement, développer une politique en vase clos avec d'autres ministres et de le présenter au Conseil des ministres. Et je pense que ça, c'est une occasion qui est ratée, d'autant plus que ça a déjà été fait.

Alors, il faut quand même... il faut quand même le souligner, ça, c'est un manque. Et donc, quand on regarde, quand on regarde le projet de loi, il aurait été tellement facile de le rendre plus perfectible, de le rendre meilleur, mais ce n'est pas le cas.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, nous allons voter contre l'adoption du projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration à la nation québécoise. Je vous remercie.

• (16 h 40) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de l'Acadie. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du projet de loi n° 84, et je reconnais M. le député de Matane-Matapédia.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, le Parti québécois est en faveur. Bien, pourquoi? Le Québec s'est toujours distingué du Canada par sa langue, sa culture, ses institutions. C'est dans notre histoire longue, dans la pérennité et l'évolution propre de nos institutions que nous, Québécois et Québécoises, avons façonné des manières de vivre et de penser qui nous sont propres, et on peut être fiers de ça.

Mais, à toutes les époques, nos gouvernements ont eu à redoubler d'ardeur pour contrer les initiatives fédérales en ces matières. C'est toujours le Canada qui a la main haute en matière d'immigration. C'est toujours le Canada qui est l'interlocuteur principal à l'international des autres gouvernements. Malgré les obstacles que le Canada pose, nous avons eu l'audace et le courage de nous donner des moyens pour que le Québec assume pleinement son identité : les symboles comme le fleurdelisé, adopté bien avant l'unifolié, la Charte de la langue française, la doctrine Gérin-Lajoie, la laïcité, par exemple, le défi de faire connaître, de faire partager, de faire aimer ces institutions qui sont les nôtres à ceux et celles qui se joignent à nous, des immigrants et des immigrantes qui n'ont pas nécessairement eu toute l'information au sujet du Québec et de son identité propre dans leur pays d'origine, d'autant plus que, lorsqu'ils arrivent au Canada, on ne leur dit pas de quoi le Québec est fait. Alors, on a un travail à faire. D'ailleurs, je rappellerai que j'ai proposé au gouvernement de faire des cérémonies d'accueil des nouveaux arrivants auxquels les parlementaires pourraient participer. Il me semble que c'est une idée intéressante. On pourrait rappeler des valeurs québécoises et parler de ce qu'est le Québec.

Le projet de loi sur l'intégration à la nation québécoise donne certains moyens de le faire, ce que nous saluons, un projet de loi dont l'essentiel tient en une phrase : Le Québec a un modèle d'intégration distinct, voire opposé au multiculturalisme canadien. Il est important de dire que le fait même d'un tel projet de loi a été proposé... ils doivent être adoptés... en lui est un symptôme du fait que le Québec n'est pas encore un pays indépendant. C'est l'ambiguïté du Québec actuel, le fait qu'il est une province dans un pays aux institutions parfois aux valeurs différentes, qui explique que nous devons faire le double des efforts pour que les immigrants et les immigrantes apprennent qui nous sommes, et s'intègrent pleinement à notre société, et participent pleinement à notre culture, et que ce soit une arrivée réussie.

Le Québec en tant que nation souveraine irait de soi, les gens qui nous rejoindraient ne viendraient pas dans un pays essentiellement anglophone, multiculturaliste, et, comme on peut le voir aujourd'hui, même profondément monarchique, même. Dans un Québec souverain, les nouveaux arrivants sauraient, au même titre que ceux et celles qui rejoignent la France, que le Québec est une nation française, laïque et républicaine.

Le projet de loi implique que le ministre définisse un modèle d'intégration nationale pour le Québec. On n'a pas attendu ce projet de loi pour réfléchir à ces questions. Quoi que le ministre en dise, ce n'est pas si historique que ça. Le Parti québécois y avait pensé bien avant, mais le ministre n'avait pas été informé, manifestement. Déjà, sur le premier gouvernement de René Lévesque, en 1978, Camille Laurin a rédigé un livre blanc qui a servi de base à la première politique de développement culturel lors du deuxième mandat du Parti québécois, de 1981 à 1985, et tous les gouvernements depuis, autant péquistes que libéraux, ont fait cet exercice de réflexion et de définition. Comme par le passé, le vrai travail de fond se fera au moment de définir cette politique. Nous surveillerons attentivement les travaux du ministre pour définir un modèle d'intégration.

Il est aussi important de souligner que ce projet de loi, même s'il utilise l'expression «intégration nationale», retient beaucoup de leçons du passé et ne fait pas table rase des notions essentielles de l'interculturalisme. Le projet de loi a été amendé de sorte aussi à préciser que l'État a également des devoirs en fait de francisation et d'intégration. La relation qui s'établit entre les Québécois et les nouveaux arrivants n'est pas à sens unique, contrairement à ce que certains intervenants ont pu redouter à la première lecture. Pour nous, ce projet de loi, sans être nécessaire, vient préciser des responsabilités de l'État. Il vient essentiellement inscrire, dans la loi, ses obligations réciproques et la nécessité de définir et de renouveler nos politiques d'intégration. Nous voterons donc en faveur de ce projet de loi, M. le Président. Merci de votre attention.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Matane-Matapédia. M. le leader adjoint de gouvernement.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Alors, nous sommes toujours dans le débat sur l'adoption du projet de loi n° 84, et je reconnais M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Guillaume Cliche-Rivard

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, on était... j'étais sur le point d'arriver. Alors, nous sommes effectivement à l'adoption du projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration à la nation québécoise. J'attends simplement un petit lutrin pour débuter, M. le Président. On va voir ce qu'il est possible de faire, comme l'intervention a débuté.

Alors, il est important, pour le Québec, de se doter d'une politique d'intégration nationale, M. le Président. Tout le monde gagne à ce que les nouveaux arrivants apprennent et contribuent à notre langue et notre culture, qu'ils participent activement à notre société, c'est très important. Le p.l. a quand même soulevé beaucoup de questions et d'opposition depuis son début, mais on doit reconnaître que le ministre a fait preuve d'ouverture et a accepté plusieurs de nos propositions de modifications dans le projet de loi. J'y reviendrai dans quelques instants.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, M. le Président, parlons des récentes déclarations du premier ministre sur la question de l'intégration. En entrevue à Stéphan Bureau, le premier ministre a déclaré les choses suivantes : «Le Québec est un endroit tranquille, un endroit sécuritaire. Là, on est en train d'importer ces conflits-là.» Il a aussi dit : «On a, depuis longtemps, dépassé notre capacité d'intégration. Moi, ça m'inquiète.» C'est ce qu'il a dit.

Ce qui m'inquiète, moi, M. le Président, c'est la place des nouveaux arrivants dans le discours du premier ministre. Ce discours prétend que l'intégration ne fonctionne pas, qu'elle est impossible. Le ministre de la Langue française, quand il rédigera sa politique d'intégration nationale, j'ai peur qu'il se rappelle de ces déclarations, parce que d'avoir la capacité d'intégrer les personnes qui choisissent le Québec comme un chez-soi, c'est entre nos mains, c'est à nous de veiller à ce que ça fonctionne. Il faut y mettre les ressources. Il faut qu'on accueille. Il faut qu'on ait les ressources en accompagnement, en francisation. Et, selon le premier ministre, notre capacité d'intégration est un frein à, je le cite, «notre capacité à avoir du fun comme peuple». C'est ce qu'il a dit au micro de M. Bureau.

Nous, on a travaillé le projet de loi de bonne foi, M. le Président, pour le bien des Québécois et Québécoises de toutes les origines, peu importe depuis combien de temps ils et elles sont au Québec. On n'acceptera pas que le travail qui s'est fait soit utilisé pour une rhétorique autre que celle-ci. Le Québec doit se doter d'une politique d'intégration nationale qui fera vibrer notre langue, notre culture et qui respectera et qui accueillera les enrichissements que les nouveaux arrivants y apportent. C'est comme ça qu'on va y arriver. C'est comme ça que ça doit fonctionner.

Le premier ministre dit qu'au Québec on importe des conflits d'ailleurs. Voyons donc, M. le Président. Je lui réponds qu'il a tort. Les Québécois et les Québécoises que je rencontre sont positifs, ouverts, prêts à accueillir ceux qui veulent faire partie de notre communauté et souhaitent enrichir le Québec à bras ouverts. Les Québécois, Québécoises, les nouveaux arrivants, on est capables de faire une intégration positive, il n'en tient qu'à nous, c'est le message que j'envoie au premier ministre. L'intégration peut et doit constituer une richesse positive pour l'histoire et l'avenir du Québec.

Sur le projet de loi, plusieurs groupes sont venus en commission et ont critiqué le projet de loi, nous ont mis en garde. Les termes utilisés à l'origine s'apparentaient au vocabulaire assimilationniste, M. le Président, comme on le voit, par exemple, aux États-Unis. C'est Gérard Bouchard, ce n'est pas moi qui le dis, qui a dit qu'on était plus proche d'un nationalisme identitaire dans la première version du projet de loi que de l'interculturalisme. D'autres, comme la Ligue des droits et libertés, le professeur David Carpentier, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, le Commissaire à la langue française, les municipalités, les villes, sont tous et toutes venus mettre en garde le ministre. Le projet de loi, et c'est important, doit se distinguer du multiculturalisme canadien, mais, dans sa première version, allait trop loin et s'éloignait de notre modèle québécois de l'interculturalisme québécois.

Pouvoir et importance du choix de mots, par exemple le mot «creuset», ce qui réfère au melting-pot américain, ont, par ailleurs, été dénoncés par M. Bouchard. Il en est suivi une lettre ouverte signée par plus de 130 groupes et experts qui mettaient en garde la population et le gouvernement, je cite : «D'abord le projet de loi n° 84 s'écarte du modèle de l'interculturalisme et opère un glissement dangereux — ce sont leurs mots — vers un modèle d'intégration de type assimilationniste. Ce projet de loi cherche à imposer une culture commune et les soi-disant valeurs québécoises aux personnes issues de l'immigration et aux membres des groupes ethniques et racisés. Il s'écarte de manière radicale des principes de réciprocité, de dialogue et de respect du pluralisme qui sont au fondement du véritable l'interculturalisme. Le projet de loi n° 84 s'inscrit dans le prolongement des discours stigmatisant les personnes immigrantes comme étant à l'origine de divers problèmes sociaux.» Ce sont leurs mots.

• (16 h 50) •

Alors, ça, c'était le début, M. le Président, mais on a eu droit à plusieurs améliorations du projet de loi, fort heureusement, j'en remercie, par ailleurs, le ministre. Il était important de rétablir l'équilibre de la responsabilité de l'intégration, qui ne donnait pas suffisamment de place à l'État et à sa responsabilisation dans la relation tripartite entre le nouvel arrivant, l'État et la population québécoise. Nous avons tous et chacun, et ça comprend l'État, une responsabilité afin de réussir l'intégration nationale de nos nouveaux arrivants.

Le portrait... Le projet de loi dresse des portraits de fondements de l'intégration nationale, en d'autres mots, les fondements et les valeurs qui constituent la nation québécoise. Dès le préambule, nous avons proposé un amendement nommant clairement la lutte au racisme et à la discrimination comme un des fondements de la nation québécoise. Je suis particulièrement fier. Grâce à cet amendement — nous avons réussi — le ministre a accepté d'envoyer un message clair à l'ensemble des personnes qui se destinent au Québec : notre intégration sera positive et ouverte. Je remercie le ministre d'avoir adopté cet amendement.

À l'article 5, nous nous sommes fait le relais de préoccupations du Commissaire à la langue française et nous avons insisté pour que l'inclusion de la Charte de la langue française se retrouve directement dans les documents nommés dans les fondements de la loi parce que le français est au coeur de l'intégration au Québec.

À l'article 6, qui énonce les devoirs de l'État, nous sommes revenus avec l'importance de la lutte au racisme et à la discrimination comme devoirs et responsabilités de l'État également. L'État du Québec, par le biais de la politique d'intégration, devra prendre des mesures en vue d'accroître l'efficacité de la lutte contre le racisme et à la discrimination.

À l'article 7, il est attendu de tous les Québécois, y compris de ceux qui sont des personnes immigrantes, qu'ils favorisent les rapprochements entre les personnes s'identifiant à la majorité francophone et à celles s'identifiant à des minorités culturelles afin de contribuer à l'établissement de relations interculturelles harmonieuses — c'est l'ajout, M. le Président — de même que la vitalité et la pérennité de la langue commune et de la langue... de la culture commune et de la langue française. Les relations interculturelles harmonieuses sont, donc, de la responsabilité de tous et chacun désormais dans le projet de loi, incluant celle de l'État.

À l'article 9 sur ce que devra contenir l'éventuelle politique d'intégration nationale, nous avons également eu un amendement adopté pour assurer la pérennité, la vitalité et le partage de la langue française, ainsi que la culture commune sous toutes ses forces, d'importants ajouts, M. le Président. 22.1, l'engagement de l'État, nous avons, à plusieurs reprises, reflété au ministre que le succès de l'intégration ne doit pas reposer seulement sur les nouveaux arrivants ou sur la société québécoise. Nous avons, donc, accueilli favorablement l'amendement du ministre, qui corrigeait cet aspect de l'engagement de l'État à l'engagement envers la vie collective de tous et chacun.

Donc, dans un projet de loi qui ne comptait, à sa base, que 28 articles, nous avons fait adopter cinq amendements substantiels, M. le Président, qui auront un impact réel sur l'application de la loi et la politique qui en découlera. Ce n'est pas tous les jours qu'on réussit, comme opposition, à influencer autant un tel projet de loi. Je remercie les groupes, les experts qui nous ont alimentés, mais aussi le ministre, qui a fait preuve d'ouverture et d'écoute sur ces enjeux importants.

Maintenant, le volet des inquiétudes. Une grande inquiétude que je partage, je dirais même une boîte de... je dirais même une boîte de Pandore, M. le Président, a été celle qui a été ouverte lorsque nous sommes arrivés à l'article 10, qui concerne le milieu communautaire. Tous les organismes recevant un financement public à la base allaient être soumis à la politique d'intégration nationale et au fondement. Plusieurs questions ont été soulevées. Qu'en est-il des médias, des universités, des organismes communautaires, des entreprises privées, même, qui font l'objet de subventions gouvernementales? On ne peut pas tolérer qu'on empiète comme ça sur l'autonomie de certains organismes. Vous connaissez, comme moi, le principe de l'autonomie du milieu communautaire, c'est fondamental dans notre réseau d'organismes communautaires. La question a été prise en délibéré par le ministre lorsque soulevée, qui nous est revenu, par la suite, avec un amendement. L'amendement est venu préserver l'autonomie des organismes à la mission, du moins partiellement dans leur mission. N'en demeure pas moins que, pour l'application de projets particuliers, l'appel à projets, la politique s'appliquera. Mais, quand on parle du PSOC, ledit financement à la mission, celui-ci sera libre d'application ou non de ladite politique d'intégration nationale. Il y a là, quand même, une amélioration substantielle et importante, bien qu'un demeure... un problème demeure sur le financement par projet. Je remercie quand même le chemin et la main tendue du ministre, bien qu'insuffisante sur cet élément-là.

La solution aurait été facile à l'article 16, le financement par projet aurait pu, lui aussi, être protégé, ce qui fait en sorte qu'actuellement il n'est pas possible de dire que l'ensemble du respect du principe de l'autonomie du milieu communautaire a été protégé dans la version telle quelle. Certes, il y a là des gains par rapport à la première version, mais on arrive court et on reste sur notre faim quant à la protection dudit principe, et cette protection et cet élément va demeurer fatal dans mon choix final, M. le Président.

Évidemment, les organismes devront aller défendre leur autonomie face aux fonctionnaires, face à la machine étatique, et je les invite, donc, à la vigilance dans l'application de ces projets pour qu'ils soient tous et toutes en mesure de juger s'il y a ou s'il n'y a pas violation de leur droit fondamental à l'autonomie communautaire.

Sur la question de la charte, modifications à la charte, M. le Président, je cite la déclaration commune de M. Bouchard et compagnie, parce qu'il y a, dans la modification législative aussi, une modification importante de la Charte des droits et libertés de la personne, M. le Président. Je cite : «Le projet de loi n° 84 propose d'apporter d'importantes modifications à la charte québécoise des droits et libertés de la personne, qui aurait pour effet de limiter la portée des droits garantis.» Ce n'est pas rien, quand même, M. le Président, que M. Bouchard vienne nous dire que les modifications limitent les droits garantis à la charte, c'est quand même très inquiétant. Je continue ma citation : «Selon les termes de ce texte législatif, l'exercice des droits humains devrait se faire dans le respect du modèle québécois d'intégration nationale, qui y est défini de façon très générale et dont les modalités restent à préciser par une politique qui sera adoptée ultérieurement par le gouvernement», M. le Président. Alors, évidemment... «Il nous apparaît hautement problématique que la portée d'une loi quasi constitutionnelle — comme la charte — puisse être restreinte de manière susceptible d'être modifiée au gré des humeurs politiques du moment, sans consultations auprès de la société civile ni débat à l'Assemblée nationale.» On parle quand même de notre charte fondamentale. «Entre autres choses, la possibilité pour le gouvernement de statuer sur les valeurs québécoises — qui, elles, auront un impact directement sur la charte — comporte des risques importants d'atteintes au droit, à l'égalité et à la liberté de conscience.»

La CDPDJ, qui est la gardienne de ladite charte, la commission des droits de la personne et de la jeunesse est venue nous mettre en garde de manière très importante dans l'étude du projet de loi. Elle nous dit qu'on procède, ici... «le gouvernement procède à un renversement de la hiérarchie des normes juridiques», ni plus ni moins. On inverse la supériorité juridique de la charte pour substituer en hauteur, dans la hiérarchie, la nouvelle loi sur l'intégration nationale, alors qu'on devrait certainement faire le contraire. Notre charte des droits et libertés, elle devrait être celle qui demeure la supralégislative et qui, elle, protège les citoyens, citoyennes dans leurs droits face à l'action gouvernementale. La charte est celle qui doit être au-dessus de nos textes législatifs et non pas le contraire.

Et, à chaque fois qu'on vient dire un «sauf si» et «sauf cela» ou «sous réserve de l'application d'une autre loi dans notre charte québécoise», bien, à chaque fois, on affaiblit, on ne renforce pas, M. le Président, chaque fois, on affaiblit notre charte. Un jour, un jour, M. le Président, on l'aura, notre charte des droits et libertés qui aura force constitutionnelle, qui ne pourra pas être modifiée par simple modification législative, qui prendra soit le deux tiers, soit l'unanimité, c'est ce qu'il arrive quand on doit modifier les textes constitutionnels, pour que, vraiment, sa force inhérente et probante demeure, et qu'on ne puisse pas amender la charte par multiples dispositions législatives, comme on est en train de vivre actuellement, ce qui l'affaiblit grandement. Alors, c'est ici, là aussi, M. le Président, pour moi, un problème fatal que de venir modifier la charte québécoise de cette façon.

Donc, évidemment, M. le Président, on réitère notre appui à l'existence d'une politique d'intégration nationale et à une loi d'intégration nationale sur le principe. D'ailleurs, nous avions voté en faveur sur le principe, il n'y a là pas d'enjeu. On aurait, par contre, aimé que le ministre consulte aussi, à l'avenir, sur ce que va contenir la politique d'intégration nationale, politique qui devra être rédigée, mais pour laquelle il n'y aura pas de consultation. On aurait aimé, par exemple, que l'exercice de planification pluriannuelle de l'immigration, qui existe déjà, serve, de la même façon, comme tremplin à ce qu'il y ait un dialogue et une consultation avec la société civile sur les questions d'intégration nationale. Malheureusement, le ministre a fermé la porte à cette proposition-là. Évidemment, nous encourageons tous les groupes, toute la société civile à faire connaître leurs opinions au ministre, parce que cette politique d'intégration nationale sera certainement importante.

Alors, plusieurs avancées, M. le Président. Je remercie, véritablement, le ministre et son équipe pour des ouvertures. Mais, malheureusement, compte tenu de l'attaque et de l'affaiblissement de l'autonomie communautaire et des modifications injustifiées à la Charte des droits et libertés de la personne, nous allons nous prononcer contre le projet de loi, M. le Président, en vous remerciant.

• (17 heures) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne et leader du deuxième groupe d'opposition. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, le projet de loi n° 84, Loi sur l'intégration à la nation québécoise, est-il adopté?

Une voix : ...

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Un vote électronique a été demandé, et cette demande a été agréée illico presto, donc ce sera reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.

Ajournement

M. Lévesque (Chapleau) : ...également d'ajourner nos travaux à demain, 9 h 40, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, par conséquent, nous ajournons nos travaux au mercredi 28 mai 2025, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 17 h 01)