43e législature

Transcription

Point de presse de M. Sylvain Gaudreault, ministre des Transports et ministre des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire

Version finale

Le mercredi 4 décembre 2013, 11 h 45

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures quarante-huit minutes)

M. Gaudreault : Oui. Alors, bonjour à tous et à toutes. Ça me fait extrêmement plaisir d'être ici aujourd'hui. C'est une journée extrêmement importante, parce que nous déposons aujourd'hui, nous vous présentons un élément majeur, un élément de plus dans notre stratégie de lutte pour l'intégrité.

Vous savez, on a déjà déposé et fait adopter la loi n° 1 sur les contrats dans le secteur public. On a fait adopter des lois sur le financement des partis politiques, autant au niveau du Québec qu'au niveau municipal. On a également, du côté du ministre des Transports, annoncé une programmation sur deux ans, qui déjà, sur 10 mois, on estime les économies à 240 millions. Vous savez également que j'ai demandé un rapport de Secor-KPMG sur les avenants, sur les extras, et on a déposé, il y a deux semaines, un plan d'action en 16 points pour un contrôle des dépenses et des coûts justes pour les contribuables.

Aujourd'hui, dans cette foulée, il me fait extrêmement plaisir de vous présenter le projet de loi sur l'Agence des infrastructures de transport et nous souhaitons son entrée en vigueur, de cette agence, le 1er avril 2015. Il s'agit d'un coup de barre pour changer la culture d'une organisation et d'une gestion des transports depuis une centaine d'années au Québec. L'agence vise quatre objectifs. L'Agence des infrastructures de transport vise quatre objectifs, que vous retrouvez ici, sur le tableau derrière moi : contrôler plus efficacement le coût des projets routiers, renforcer l'expertise de l'État québécois, éloigner l'influence politique de la réalisation des travaux et, quatrièmement, la décentralisation. Et, ces quatre objectifs, ça passe par cette nouvelle entité que sera l'Agence des infrastructures de transport du Québec, qui se verra confier les mandats de gestion et de maintien des infrastructures routières; qui se verra également développer une compétence supérieure, renforcée dans la gestion des actifs routiers et dans l'expertise; se verra confier tous les mandats de réalisation des projets routiers, comme je l'ai déjà dit, de l'appel d'offres à la coupure du ruban. Ça sera confié à l'Agence des infrastructures de transport.

Il est très important de spécifier que le ministère des Transports continue, continuera d'exister. Mais le ministère des Transports se concentrera sur son rôle de planification, de choix de projets de développement, se verra faire… concentrer sur ce qu'il doit faire comme ministère, c'est-à-dire développer une vision des transports au Québec, vision des transports de personnes, vision des transports des marchandises, vision des transports collectifs au Québec. Le ministère des Transports se verra confirmer dans sa mission de l'intermodalité, d'encourager l'intermodalité, se verra également confier, comme toujours, mais concentrer les rôles législatifs, réglementaires, et il maintiendra ses responsabilités dans le ferroviaire et dans l'aérien.

La gouvernance de l'agence sera la suivante : l'agence sera une entité indépendante, dirigée par un conseil d'administration entre neuf et 13 membres. Le président ou la présidente, directeur général, directrice générale et les vice-présidents seront nommés avec… sur la base de profils de compétence stricts, profils de compétence très stricts qui proviendront du… les profils de compétence proviendront du conseil d'administration.

L'agence sera évidemment imputable, aura une imputabilité très grande, et c'est très important, une imputabilité, évidemment, auprès du ministre des Transports, auprès du gouvernement, une imputabilité auprès, évidemment, de l'Assemblée nationale du Québec par le dépôt de son plan stratégique aussi, le dépôt également d'un rapport annuel de gestion.

Très important, l'agence sera présente dans toutes les régions du Québec. Parce que je suis convaincu, et le gouvernement du Québec est convaincu que c'est dans les régions que l'administration publique, les représentants de l'administration publique dans les transports sont les mieux placés pour maintenir les actifs et surveiller également le déroulement des travaux routiers. Il n'y a personne d'autre de mieux placé que ceux et celles qui sont dans les régions pour connaître la réalité du terrain, je peux vous en dire quelque chose.

Du côté des ressources humaines, mon premier message, c'est un message de reconnaissance, un remerciement que je veux adresser à tous les employés du ministère des Transports qui, depuis un an, collaborent, à tous les échelons, pour la création de cette agence, pour la préparation du projet de loi. J'en ai parlé à plusieurs reprises à des employés de tous les niveaux, du sous-ministre à l'ouvrier du ministère, dans plusieurs régions du Québec. J'ai senti, depuis le début, une très grande collaboration parce que je travaille à tous les jours avec des gens, au ministère des Transports, à tous les échelons, qui sont convaincus de l'administration publique, qui sont convaincus du service public. Et j'ai même senti également un enthousiasme à créer une nouvelle institution publique qui va leur ressembler, qui va les rassembler et qui va déterminer une vision nouvelle de ce que sont les transports au Québec.

Évidemment, l'agence ne sera pas soumise à la Loi sur la fonction publique, ce qui veut dire : plus de souplesse dans l'embauche, plus de souplesse dans la rémunération, plus de souplesse dans le classement des employés et plus de possibilités évidemment, de ce fait, de retenir, d'avoir un effet sur la rétention des employés. Présentement, au ministère des Transports du Québec, on compte autour de 6 500 employés. Nous évaluons que, dans l'agence, 90 % d'entre eux seront transférés à l'agence pour les fonctions dont je vous parlais tout à l'heure. C'est une grosse opération. C'est pour ça que la loi n° 68 prévoit la mise sur pied d'un comité de transition pour faire ce passage-là, entre le ministère et l'agence.

Je termine en vous disant que le geste d'aujourd'hui, c'est un geste très fort en matière d'intégrité. C'est un geste de confiance envers l'administration publique. C'est un geste de rupture avec les années libérales. Et surtout, surtout, la création de l'Agence des infrastructures de transport incarne une vision audacieuse et contemporaine de ce que doivent être la gestion des transports au XXIe siècle. Merci beaucoup.

Le Modérateur : On va maintenant passer à la période des questions. Je vous invite à respecter le une question, une sous-question. On va commencer avec Hugo Lavallée, Radio-Canada.

M. Lavallée (Hugo) : Bonjour, M. Gaudreault. Vous avez dit tout à l'heure qu'un des objectifs importants derrière la création de l'agence est d'éloigner l'influence politique de la réalisation des travaux. Par contre, tout ce qui est le développement du réseau routier, ça, ça va demeurer au ministère des Transports. Est-ce qu'il n'y avait pas lieu aussi d'immuniser le développement du réseau routier de l'influence politique et, dans ce cas-là, pourquoi ne pas avoir inclus cette portion-là de travail sous l'égide de l'agence?

M. Gaudreault : Le développement du réseau routier au Québec dépend de multiples facteurs, et c'est pour ça également que nous élisons des gouvernements. Mais ce qui compte, c'est, à partir du moment où les choix de développement sont faits, tout bascule de l'appel d'offres à la coupure du ruban, pour reprendre cette expression, au sein de l'agence. C'est ça qui est important.

Mais ce qu'il est très important aussi de comprendre, c'est qu'il y aura une collaboration étroite entre le ministre des Transports et l'agence, parce que, moi, je suis convaincu qu'avec le geste que nous posons aujourd'hui, l'agence des transports va se développer une expertise très fine en matière de gestion routière et d'infrastructures routières. Elle pourra donc faire des recommandations au ministre des Transports sur les prochains développements, sur ce qu'on doit faire en termes de développement routier. Mais il appartiendra toujours au ministre de faire les choix pour le bien des Québécois et des Québécoises, mais qui vont correspondre à cette vision que développera le ministère des Transports, parce que ce sera son rôle et sa tâche de faire une vision des transports au Québec.

M. Lavallée (Hugo) : Et quelle garantie on a de l'indépendance réelle de cette nouvelle agence, dans la mesure où les membres du conseil d'administration, si je comprends bien, vont être nommés par vous, enfin, par le gouvernement? Qu'est-ce qui nous garantit que ce ne seront pas des nominations partisanes?

M. Gaudreault : Nous aurons l'obligation, et c'est dans la loi, d'un profil de compétence très strict. On ne veut pas nommer n'importe qui, on ne veut pas nommer n'importe comment. On veut s'assurer d'avoir un profil de compétence qui va faire en sorte que nous aurons les personnes les plus compétentes pour la gestion des infrastructures et des actifs routiers au Québec.

Il y aura également de la reddition de comptes auprès de l'Assemblée nationale, auprès du gouvernement, et on pense que, de cette manière, on se donne le plus grand nombre de garanties possibles. Mais, vous savez, c'est un ensemble de mesures, hein? Parce qu'il y a l'agence des transports qui est un élément-phare, mais les autres mesures qu'on a mises en place depuis un an vont continuer de s'appliquer, que ça soit, par exemple, la programmation sur deux ans; que ce soit le plan d'action qu'on vous a présenté il y a deux semaines; l'application de la loi n° 1 sur les contrats dans le secteur public; que ça soit la loi sur la gouvernance des sociétés d'État, des sociétés publiques; la politique-cadre sur les grands travaux va continuer de s'appliquer, le rôle de la Société québécoise d'infrastructures. Alors, nous avons ici l'occasion de créer une expertise très forte en gestion d'actifs routiers au Québec et de maintien des actifs, et c'est vers ça qu'on doit aller.

Le Modérateur : Merci. Véronique Prince, TVA.

Mme Prince (Véronique) : Dans le meilleur des mondes, vous espérez que cette agence-là soit mise en place à quel moment? Et j'imagine que vous avez déjà une liste de candidats potentiels pour le P.D.G.

M. Gaudreault : La réponse à la première question, nous, on souhaite, évidemment, être capables d'étudier à l'Assemblée nationale le plus rapidement possible. L'objectif dans la loi… je ne me souviens plus c'est quel article, là, mais ça doit être le dernier, mise en oeuvre de l'agence, pour le 1er avril 2015.

Pour ce qui est de la question du P.D.G., des V.P., très sincèrement, nous n'en sommes pas là.

Mme Prince (Véronique) : Il y a eu une perte d'expertise au ministère des Transports, entre autres, due au fait que les salaires n'étaient pas suffisamment élevés. Donc, c'était plus tentant pour les ingénieurs de qualité d'aller travailler dans le privé. Je sais que vous avez dit, là, qu'il va y avoir des règles, plus de souplesse au niveau de l'embauche, mais est-ce que vous êtes quand même capable de vendre votre salade pour dire : Aïe, les ingénieurs de qualité, là, il va y avoir des jobs intéressantes pour vous, là?

M. Gaudreault : Oui. Ma salade, elle sera très bonne, d'ailleurs, parce que c'est l'agence des transports… Il faut le voir de différentes manières. Bien sûr, il y a les conditions de travail. Il y a les conditions de travail, et, là-dessus, ça nous prend une souplesse, une flexibilité. Je suis d'accord avec vous, on pense tout de suite aux ingénieurs, mais je veux tout de suite vous dire qu'en ce qui me concerne, je pense aux ouvriers. Je pense aussi aux techniciens en travaux publics. Je pense à toutes les gammes d'emplois, à travers le ministère actuel, qui doivent aussi avoir des conditions intéressantes pour rester au ministère. Moi, quand je parle d'expertise, là, je ne pense pas juste aux ingénieurs. Pour moi, des ouvriers, ça a aussi une expertise très forte et très riche.

L'autre élément, c'est peut-être mon côté lyrique, mais vous allez très bien le comprendre. Moi, je suis convaincu qu'il y a quelque chose de profondément stimulant à pouvoir créer une agence propre à nous, qui nous ressemble. Moi, c'est le défi que je lance aux employés du ministère des Transports, aux futurs ingénieurs, aux futurs ouvriers, aux futurs techniciens qui vont se joindre à nous. On a l'occasion, dans ce 100 ans d'histoire des transports au Québec, de créer une nouvelle institution qui va marquer le coup, qui va faire une différence, qui va avoir une culture d'appartenance, une culture forte, différente. Et ça, je pense que c'est profondément stimulant pour des gens qui croient fondamentalement à l'importance de leur travail et à leur profession. Merci.

Mme Prince (Véronique) : …avec la passion, mais ça prend quand même de l'argent.

M. Gaudreault : Bien oui. Bien, c'est pour ça.

Mme Prince (Véronique) : Est-ce que vous en promettez, de l'argent de plus?

M. Gaudreault : Bien oui, mais, écoutez, c'est exactement ce que je viens de vous dire, il y a différents éléments. Bien sûr, renforcer l'expertise, c'est aussi offrir des conditions qui sont avantageuses pour être compétitifs par rapport au privé. Mon objectif, c'est de recruter des nouveaux ingénieurs, de nouveaux techniciens, de nouveaux ouvriers, mais mon objectif, c'est qu'ils restent avec l'agence aussi.

Le Modérateur : Merci. Simon Boivin, Le Soleil.

M. Boivin (Simon) : M. Gaudreault, un peu dans la même foulée, j'ai cru comprendre que vous disiez que 90 % des employés du ministère migreraient vers l'agence, une agence où il y aurait une souplesse, là, dans la rémunération, donc des conditions meilleures. Ça va avoir un coût. Est-ce que vous l'avez évalué?

M. Gaudreault : Oui. Il y a deux réponses à votre question. Premièrement, on estime à peu près les coûts de transition pour créer l'agence autour de 10 millions de dollars qui seront assumés à l'intérieur des budgets qui sont dédiés déjà au ministère des Transports du Québec. En ce qui concerne maintenant les coûts relatifs, par exemple, aux salaires, je ne peux pas me prononcer à ce moment-ci, parce qu'évidemment ça va dépendre des mandats qui seront confiés par le Conseil du trésor et des marges de manoeuvre qui sont confiées aux négociateurs de futures conventions collectives et de conditions de travail. Mais l'objectif est vraiment d'offrir des conditions avantageuses. Pourquoi? Pour mieux préparer les estimés, pour mieux surveiller les chantiers. Et, en bout de ligne, c'est un investissement pour l'État québécois.

M. Boivin (Simon) : …ordre de grandeur, là, on parle d'une centaine de millions, moins que ça? Avez-vous une idée…

M. Gaudreault : Je ne veux pas embarquer là-dedans à ce moment-ci, parce que ça va dépendre des décisions d'un futur Conseil des ministres qui vont mandater le Conseil du trésor pour aller négocier cela. Mais je peux vous dire que ce sera certainement des conditions qui seront intéressantes.

M. Boivin (Simon) : …rapidement, un peu plus tôt aujourd'hui, Mme Maltais a fait savoir que, selon elle, il y aurait, de toute évidence, du covoiturage sur Henri-IV…

M. Gaudreault : Oui. On va s'en parler tantôt. Je suis vraiment dans l'esprit de l'agence des transports, là.

M. Boivin (Simon) : Bon, bien, à ce moment-là… Donc, à ce moment-là, ma deuxième question sera sur la question de l'influence politique. Vous dites : Influencer… Éloigner l'influence politique de la réalisation des travaux. Vous avez donc constaté, nécessairement, qu'il est arrivé qu'il y ait de l'influence politique dans la réalisation des travaux. Pouvez-vous nous donner des exemples?

M. Gaudreault : Il faut arrêter de penser qu'on va gagner des élections sur des bouts d'asphalte et, pour ça, il faut se donner une expertise, au ministère, dans l'appareil public. Il faut qu'on passe à cette étape-là, et ça, pour moi, ça m'apparaît extrêmement important.

M. Boivin (Simon) : ...réalisations, là, pas de choix du projet, là, la réalisation.

M. Gaudreault : Oui, mais il va y avoir… je vous l'ai dit, il va y avoir également une collaboration très étroite entre l'agence et le ministre, parce que l'agence va développer une expertise sur l'état des lieux, sur le maintien des actifs.

Le Modérateur : Robert Dutrisac, Le Devoir.

M. Dutrisac (Robert) : Bonjour, M. Gaudreault. Vous faites le lien entre l'éloignement de l'influence politique et la lutte à la... à l'intégrité. Donc, la proximité entre le politique puis la réalisation des travaux implique une question d'intégrité. C'est bien ça? C'est ce que je comprends?

M. Gaudreault : Ce que je vous dis, c'est qu'il faut éviter... Et ça dépend de plusieurs mesures, comme, par exemple, la loi sur le financement des partis politiques a été une mesure très importante. Il faut éviter que des gens qui auraient des mauvaises intentions veuillent influencer le développement des transports par de l'influence indue sur des représentations politiques.

M. Dutrisac (Robert) : Donc, l'agence contribue à ça.

M. Gaudreault : Exact.

M. Dutrisac (Robert) : Maintenant, pourquoi créer une agence si l'objectif, c'est de donner de meilleures conditions aux employés puis d'augmenter leur salaire? Je veux dire, c'est une chose qui peut être faite aussi au sein du ministère.

M. Gaudreault : C'est parce qu'on veut aller plus loin et on veut faire en sorte que l'agence, comme une nouvelle entité, soit retirée de la Loi sur la fonction publique, ce qui va donner plus de souplesse à cette entité que sera l'agence.

M. Dutrisac (Robert) : Maintenant, avec les histoires qui entourent les C.A., les C.A. du CHUM, de l'AMT dans le domaine des transports, est-ce que vraiment très rassurant de savoir que l'agence va être contrôlée par un C.A. indépendant alors qu'il y a beaucoup de problèmes avec ces C.A. indépendants?

M. Gaudreault : Oui, bien, écoutez, c'est une agence qui sera soumise à la loi sur la gouvernance dans le secteur public. C'est également, je pense, l'élément le plus important, et on a vraiment misé là-dessus. Vous pourrez regarder dans le projet de loi, là, dans le libellé des articles, sur le profil de compétence. On veut un profil de compétence strict pour les membres du conseil d'administration, mais aussi le P.D.G., les vice-présidents, le président du conseil d'administration. Il y aura, au sein du conseil d'administration, des représentants d'ordres professionnels comme l'Ordre des ingénieurs, l'Ordre des comptables agréés. Il y aura des représentants du public, il y aura des gens avec une expérience très forte, par exemple dans la haute fonction publique, des choses comme ça, qui seront... qui siègeront sur l'agence. Il y aura également l'adoption d'un code d'éthique. Et je pense que c'est des garanties très importantes.

Mais, plus politiquement, ce qu'il faut dire également, c'est que les situations que nous vivons à l'heure actuelle — vous faites référence au CHUM, par exemple — c'est des situations qu'on déplore. Et je souhaite évidemment qu'on puisse s'enrichir, je dirais, de ces mauvais exemples là pour ne pas répéter les erreurs.

Le Modérateur : Merci. Merci. Michel Pépin, Radio-Canada.

M. Dutrisac (Robert) : Est-ce qu'on doit comprendre que quelqu'un comme Nicolas Girard ne pourrait pas être nommé P.D.G. d'infrastructures… transports.

Le Modérateur : Michel Pépin, Radio-Canada.

M. Pépin (Michel) : M. le ministre, bonjour.

M. Gaudreault : Bonjour.

M. Pépin (Michel) : Est-ce que n'est pas un peu précipité? Et j'explique ma question. Il y a eu le rapport Duchesneau qui a été un élément très important, probablement le dernier clou qui a mené à la création de la commission…

M. Gaudreault : Qui recommandait l'agence.

M. Pépin (Michel) : Oui. Je veux… bien, et aussi qui illustrait un paquet de problèmes au sein du ministère des Transports, mettait en lumière cela. La commission Charbonneau n'a pas touché du tout à ça jusqu'à présent, si je ne me trompe pas, hein?

Comment vous pouvez savoir que c'est la… véritablement la bonne direction? Comment savez-vous ce qui s'est passé au ministère des Transports, étant donné que la commission Charbonneau ne s'est pas penchée là-dessus? Est-ce que, vous, vous le savez? Est-ce que vous savez quelque chose que les Québécois ne savent pas?

M. Gaudreault : Non, je suis très transparent. Moi, je dis ce que je sais, puis, en plus…

M. Pépin (Michel) : Alors, est-ce que ce n'est pas précipité?

M. Gaudreault : … ça s'adonne que je dis ce que je fais puis je fais ce que je dis, alors tout va bien. Mais ce que je peux vous dire, c'est que vous remarquerez également que j'ai toujours dit que nous n'attendrions pas les recommandations de la commission Charbonneau pour bouger. C'est pour ça, depuis un an, qu'on s'est mis tout de suite au travail pour rédiger ce projet de loi là. Il n'est pas précipité, je pense qu'il arrive au bon moment. Vous savez, ce n'est pas évident de préparer le transfert, quand même, vers… la mutation vers une autre structure. 90 % des employés, c'est quelque 5 000 employés quand même qui passeront à l'agence.

On a posé beaucoup de gestes, que ce soit la programmation sur deux ans, le rapport Secor-KPMG, la composition des comités de sélection des firmes de génie-conseil. On a travaillé étroitement. On est toujours en train de surveiller ce qui se dit à la commission Charbonneau puis on s'ajuste en cours de route. Mais je pense qu'on doit agir tout de suite en ce qui concerne les transports.

M. Pépin (Michel) : Sans savoir vraiment ce qu'il en est, à moins que vous considériez que le rapport Duchesneau décrivait bel et bien la réalité au ministère des Transports, que c'était tout à fait ça, est-ce que c'est le cas, M. Gaudreault? Est-ce que vous considérez que le rapport Duchesneau disait la vérité, finalement?

M. Gaudreault : Je pense que le rapport…

M. Pépin (Michel) : Il est assez dur, je pense, à l'égard du ministère des Transports, si ma mémoire est bonne.

M. Gaudreault : Oui. Oui, mais je pense que le rapport Duchesneau a effectivement énoncé un certain nombre d'éléments très importants dont on a tenu compte très… de façon très importante, très fortement, comme aussi… souvenez-vous du rapport Johnson sur l'effondrement du viaduc de la Concorde, et, à la suite du rapport Johnson, M. Johnson s'était dit favorable à un projet d'agence ou, en tout cas, d'une institution du même type.

Alors, c'est tout ça qui nous a conduits à proposer le projet de loi n° 68, et j'espère que maintenant que M. Duchesneau est rendu député à la Coalition avenir Québec, il va influencer son caucus pour nous aider à appuyer et à adopter rapidement le projet de loi n° 68.

Le Modérateur : M. Gentile, Radio-Canada.

M. Gentile (Davide) : À l'article 11, on indique : Le ministre tient compte de l'ordre des priorités transmis par l'agence. En quoi est-ce que ça, ça brise le vieux problème que vous avez mentionné, à l'effet duquel on utilise souvent le béton à des fins électorales et qu'on priorise le prolongement du réseau aux dépens de l'entretien?

M. Gaudreault : Bien, c'est justement, je suis heureux que vous cibliez cet article, parce qu'avec d'autres articles celui-ci évoque justement cet aller-retour qu'on souhaite entre l'expertise qui sera développée par l'agence, très fine, et la décision politique, je dirais, d'aller de l'avant avec un projet de développement routier plutôt qu'un autre. Alors, il y aura des recommandations qui seront faites par l'agence, mais il appartiendra toujours au ministre de déterminer, comme société, où on veut aller en termes de développement.

M. Gentile (Davide) : Pouvez-vous essayer de nous expliquer, en quelques mots maintenant, qu'est-ce qui reste comme responsabilités au ministère des Transports?

M. Gaudreault : Oui, ça me fait plaisir. C'est une…

M. Gentile (Davide) : Est-ce que c'est un rôle d'architecte, de supervision?

M. Gaudreault : Bien, d'architecte au sens figuratif, là. C'est vraiment un rôle de vision. Moi, je dois vous le dire, là, puis je l'ai répété à plusieurs reprises depuis plus d'un an maintenant, comment, par exemple, les Affaires municipales sont, avec l'aménagement du territoire, c'est fortement influencé par les transports aussi, les transports, l'aménagement du territoire. On l'a vu, entre autres, lors des dernières campagnes électorales municipales, les questions de transport à Québec et à Montréal, ça a toujours été au sommet des priorités. 

Alors, moi, je pense, comme société, avec les défis qu'on a en termes de réduction de gaz à effet de serre, d'avoir un aménagement du territoire qui est durable, d'avoir des transports qui sont efficaces en termes de transport collectif, par exemple, et de transport des marchandises aussi. On le voit encore avec le pont Champlain hier. J'étais avec les premiers ministres sur ce sujet-là.

Alors, il faut que le ministère des Transports prenne à bras-le-corps cette mission-là. C'est une mission politique, c'est une mission sociale. Les transports, ce n'est pas juste rouler de l'asphalte, c'est transporter du monde, c'est ça, c'est transporter des marchandises, c'est de la mobilité. Alors, c'est ça, le rôle du ministère, puis ça sera ça, de déterminer les grandes orientations, la vision où on doit aller. Est-ce qu'on veut plus de transport collectif dans une société? Est-ce qu'on veut plus de transport routier? Ça sera ça, le rôle du ministère. Ça sera aussi un rôle, un pouvoir de réglementation, un pouvoir législatif, aussi favoriser l'intermodalité entre les transports actifs, piétons, cyclistes, transport routier, transport collectif, et ça, c'est profondément stimulant, et je pense qu'un ministère doit se concentrer sur le rôle politique.

Le Modérateur : Dernière en français, Jean-Luc Lavallée.

M. Lavallée (Jean-Luc) : Bonjour, M. Gaudreault. Vous parliez de M. Duchesneau tout à l'heure et du caucus caquiste. Ça s'annonce assez difficile, là, de faire adopter votre projet de loi, assez ardu. La CAQ est contre, les libéraux, a priori, ont un préjugé défavorable aussi, vous reprochent de sortir une partie du MTQ du périmètre comptable, parlent de l'imputabilité ministérielle aussi. Bref, comment vous allez faire, là, pour les convaincre?

M. Gaudreault : Bien, je suis un peu déçu de ce que vous me dites sur la CAQ, parce que j'ai travaillé très fort pour que le numéro du projet de loi soit pair, parce que je me disais : Avec un numéro pair, ils seront pour le projet de loi. Ça tombe bien, c'est le numéro 68. Alors, je m'attendais à ce que la CAQ soit pour, mais, bon, évidemment, ils changent souvent. Mais, vous savez, la CAQ est certainement un des partis qui plaident le plus, puis avec raison, je pense, pour une gestion plus serrée des finances publiques, que les Québécois en aient pour leur argent, et je pense qu'on va pouvoir les convaincre de cela. Ce n'est pas vrai qu'on va sortir ça du périmètre comptable, là. Il va y avoir le PQI qui va continuer de s'appliquer, il y aura de la reddition de comptes. Le ministre des Transports va pouvoir répondre aux questions en Chambre. Il y aura le conseil, le P.D.G. de la future agence qui va venir témoigner en commission parlementaire à l'étude des crédits. Alors là, il ne faut pas que la CAQ parte en peur avec ça.

Du côté des libéraux, c'est sûr qu'avec Philippe Couillard on ne sait plus trop sur quel pied danser depuis quelques semaines et quelques mois, là, mais ils se sont déjà prononcés favorablement, mais de façon timide, je dirais, sur la création d'une agence il y a quelques années. Nous, on va beaucoup plus loin. Alors, j'espère qu'ils vont embarquer aussi dans ce train-là, avec nous, en faveur d'une agence.

M. Lavallée (Jean-Luc) : Est-ce que vous pensez que… vraiment, là, que l'agence est un rempart contre toute tentative de fraude, de collusion ou de corruption? On apprenait, par exemple, ce matin que l'UPAC enquête sur un appel d'offres de l'AMT. Alors, quelle est la garantie, là?

M. Gaudreault : Bien, écoutez, des garanties, on se… Moi, mon rôle, là, c'est de donner le plus grand nombre… de mettre le plus grand nombre de barrières possible contre la corruption puis la collusion. Je pense qu'on en a une très forte ici, une puissante barrière avec l'agence. Il va toujours falloir rester vigilant. Je pense qu'on se met suffisamment de normes à ce moment-ci pour éviter cela, mais il va falloir toujours rester vigilant pour ce faire. Alors, moi, c'est l'engagement que je prends.

Le Modérateur : …questions sur l'AMT? On passe en anglais, Caroline Plante.

Mme Plante (Caroline) : Mr. Gaudreault, hello. You said that the agency will focus on developing a fine expertise. So what was stopping the Transport Ministry from developing that expertise?

M. Gaudreault : Between the Ministry and agency?

Mme Plante (Caroline) : Well, you said the agency was going to work on developing this fine expertise. What was stopping the Ministry from doing that?

M. Gaudreault : Yes. I think it's very important to share the responsibility. And the role of a ministry is to build a vision about transportation in Québec. His first role is to make bills, rules and not to construct roads. And this is why I think it's very important to create the agency.

Mme Plante (Caroline) : In a context where we're trying to save money, why are we spending more?

M. Gaudreault : I think it's an investment, because, with the agency, we will save a lot of money for all the Québec because we will have more flexibility to hire engineers, for example, but every employee inside the agency. And I think, in a long-term, but also in middle-term, I think it's a very good investment for Québec.

Mme Plante (Caroline) : To repeat my colleague's question from Le Devoir in English, do you think that Quebeckers will be reassured to know that an independent board will be running this agency, given that we've heard that… you know, about so many problems with governance and boards.

M. Gaudreault : Yes. I think we have many rules inside the Bill n° 68. For example, we want «compétence»… «profil de compétence»…

Mme Plante (Caroline) : Specific skills.

M. Gaudreault : Specific skills, yes, for members of the board, for president, general director of agency, and I think it's a very basic route for that, yes.

Mme Plante (Caroline) : But the Government name these boards…

Une voix :

Mme Plante (Caroline) : Oh! C'est juste que je suis la seule… the Government…

M. Gaudreault : With the specific skills and very specific skills. I think this is the key.

Mme Plante (Caroline) : But the Government still names these board members. So what make you say that we'll be removing the political from these nominations?

M. Gaudreault : Because it's a nomination on the base of specific skills and this is a very important… and the specific skills will be fixed by the board.

Le Modérateur : Merci.

Mme Plante (Caroline) : I have one left question.

Le Modérateur : Non, non. Merci, Caroline.

Mme Plante (Caroline) : What are the chances that this project will see the light…

Le Modérateur : Merci. Rhéal Séguin.

Mme Plante (Caroline) : Oh! I thought I was the only one. Sorry, Rhéal. I thought I was the only one.

M. Séguin (Rhéal) : I'd like to know exactly how much money would we be saving? How much money would Québec… is receiving. Have you made the count? Have you…

M. Gaudreault : No. We don't have exact count about the money we will save. But, if you take the example about programmation, in the last year, on 10 months, we saved around $240 million. So I think it's a very good expectation.

M. Séguin (Rhéal) : But you spoke earlier about a change of culture. You have said what you think this agency will do.

M. Gaudreault : This change.

M. Séguin (Rhéal) : Yes. But you haven't told us what was the culture before. What was it? A culture of corruption, kickbacks and collusion? Is that it?

M. Gaudreault : No. I think it's very important to change the culture and sometimes it's important to create a new institution to create this new culture.

M. Séguin (Rhéal) : But what was the old culture? Tell me that, explain to me what was the old culture.

M. Gaudreault : This old culture is, for example, the mix between the vision about transportation and the construction of the roads. And I think it's two things very different. And the ministry will keep the role about vision and the… yes, about the vision, about law, about roads. And the agency will be focussed on construction on the roads and expertise about construction. So it's very… two spaces very different.

M. Séguin (Rhéal) : Vous ne répondez pas à la question, M. le ministre. Je vais la poser en français.

M. Gaudreault : Je peux la poser… je peux peut-être y répondre en français.

M. Séguin (Rhéal) : Vous expliquez clairement ce que vous voyez comme étant cette agence-là plus tard, mais expliquez-moi la culture qui existe maintenant. C'est-u une culture de corruption, de collusion que vous voulez changer en ce moment?

M. Gaudreault : Nous avons présentement, comme vous le savez, un certain nombre de rapports. On a parlé tout à l'heure du rapport Duchesneau, on a également parlé, il y a quelques semaines — je pense, vous y étiez — du rapport de Secor-KPMG sur les extras, et nous voulons changer ces façons de faire là et nous pensons qu'il faut changer d'institution pour pouvoir créer de nouvelles façons de faire. Et on veut se mettre le plus de frontières ou le plus de barrières possible pour éviter les risques de collusion et de corruption.

En ce qui concerne la culture ou les pratiques passées, peut-être même actuelles, il appartient à la commission Charbonneau de faire son travail. Nous, en tout cas, on pourra dire une chose : on a passé à l'action puis on continue de passer à l'action pour éviter cela. Maintenant, s'il y a des preuves à faire, s'il y a des choses à démontrer, il appartient à la commission Charbonneau de le faire.

Le Modérateur : Merci. Max Harrold.

M. Séguin (Rhéal) : …ces preuves-là, pour la nouvelle agence.

Le Modérateur : Merci. Max Harrold, dernier en anglais.

M. Harrold (Max) : Yes. Hello, sir. Will you be able to hire more… better qualified engineers with their performance be, you know, more… Will you be able to have higher expectations for those engineers?

M. Gaudreault : Yes.

M. Harrold (Max) : In the agency.

M. Gaudreault : Yes.

M. Harrold (Max) : We'll be able to hire better qualified people who cost more money?

M. Gaudreault : It's very important to give to agency the possibility and the flexibility to hire engineers and keep them, but not just engineers, but technicians for example. And we can hire engineers, or technicians, or many employees now, but our challenge is to keep them inside the public administration.

M. Harrold (Max) : OK. So you pay them more money.

M. Gaudreault : Yes. But I cannot answer exactly how much now because it depends to the mandate to the Treasury Board.

M. Harrold (Max) : And I guess… you answered it a little bit, but I'm still going to ask again : how will this change make corruption less likely…  in road projects like people see on the roads? How will that make a difference on the «chantier»?

M. Gaudreault : Yes. I think it's a very big change, now, with the agency, but, of course, we must stay alert, vigilant for the future, and I don't say that it's just this agency to resolve the corruption, but I think it's a very important thing.

Le Modérateur : Merci, tout le monde. Au revoir.

M. Gaudreault : Merci.

(Fin à 12 h 23)